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Distance et proximité.

On ne peut voir Bart De Wever au départ d’une course à pied et François Hollande à la confrontation de mercredi avec Nicolas Sarkozy, sans les créditer d’une belle performance physique, celle de présenter au public des silhouettes fortement amincies. Les journaux parlent de cinquante kilos de tissus graisseux disparus chez le président de la NV-A.
L’image du « bon gros » correspond à une époque antérieure au cours de laquelle l’aspect de la personne avait moins d’importance que pour le public d’aujourd’hui.
Ce n’est pas parce que nos deux curistes font preuve de volonté, qu’ils ont changé du tout au tout. Ils doivent rêver au cours de leurs repas hyper-protéinés sans glucides, aux gueuletons qui firent leur rondeur. On ne peut pas passer de l’obésité à la minceur, sans une modification des comportements, bien au-delà des seules modifications alimentaires et qui touchent au caractère, en transformant l’état d’esprit de la satiété, à la nostalgie du-dit !
Di Rupo a conservé un corps d’adolescent. C’est probablement par un souci de plaire très jeune et qu’il n’a jamais abandonné. Il gardera sa mince silhouette sans faillir. Tandis que les deux autres seront au régime à vie, s’ils ne veulent pas prendre vingt kilos tout de suite après un mois de relâchement.
Ces trois personnages illustrent bien l’importance de l’image, dans la visibilité qu’ils donnent à des électeurs qui sont - bien avant de l’être - un public. Dans une proximité inconnue il y a seulement un quart de siècle, ce public bénéficie des techniques qui abolissent les distances et favorisent l’illusion la plus parfaite du contact.
Les candidats, l’un veut être "un président normal", l’autre un « un bourgmestre comme les autres » ne sauraient l’être, puisqu’ils forcent leur nature à paraître, sous une forme empruntée aux magazines de mode !
Par souci d’efficacité, ils sont des imitateurs. Leur modèle est « une norme » que la mode impose à la majorité.
Mincir est aussi un acte politique qui traduit une volonté de pouvoir.
La crise que nous vivons est avant tout une crise de civilisation. Les valeurs et croyances vacillent. Il va de soi que le socle ancien pouvait accepter des rondeurs, comme celle de Pompidou, mais qu’en 2012, être regardé en une soirée par plus de « voyeurs » que ne l’eût jamais Pompidou au cours de toute sa vie politique, change la donne au niveau de l’apparence.
C’est ainsi que l’on confond aisément "changer de destin", comme le souhaite le candidat Hollande, avec « changer l’être ». Il faudra, par conséquent, que le postulant soit la vivante image du changement.

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Philosophiquement, c’est un concept tout à fait ridicule et pas si anodin qu’il y paraît. Si le lien entre un élu et le public tend à se raccourcir, cette proximité ne rend pas pour autant l’action du personnage politique plus lisible. Au contraire, nous entrons dans une ère de confiance sur la bonne mine. Tout le monde sait comme les escrocs ont le génie de se rendre sympathique.
La confusion entre un homme public et une vedette de cinéma ou de télévision est le produit d’une constante évolution de l’homme public vers la reconnaissance de la star.
En-dehors des milieux artistiques, l’homme politique est le seul qui participe à l’évolution de l’importance du paraître. Un écrivain aussi corpulent que Balzac a encore toutes les chances de se faire éditer. Le coup de pouce dont il a besoin n’a rien à voir avec son physique, mais avec ses relations. Albert Einstein, tel que certaines photographies nous le montrent, aurait tout aussi bien été reconnu comme un physicien hors pair, s’il avait vécu de nos jours.
Encore que « le domaine artistique » comporte sa part d’ombre. Les musiciens d’une fosse d’orchestre ne sont pas reconnus individuellement, mais dès qu’ils entrent dans le champ des projecteurs en qualité de chanteur ou de soliste, c’est-à-dire lorsqu’ils ont des admirateurs qui les regardent en qualité d’individus, ils soignent leur aspect défini comme un look.
C’est tout le paradoxe de la démocratie : pour réussir à se faire élire, il faut sortir de l’anonymat en se pliant aux normes du vedettariat, tout en conservant une originalité, c’est-à-dire en se singularisant !
D’emblée, on voit bien que la démocratie, quoiqu’on dise pour faire valoir le côté emblématique d’une société de liberté, est un exercice impossible, dans le sens d’une égalité réelle de tous les citoyens.

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