En chair, en os et trompe-l'oeil.
Si le Web peut remplacer bien des dictionnaires, rafraîchir des mémoires et revenir sur des promesses généralement non tenues de nos élites, il peut aussi monter en tête d’épingle le bruit des tuyauteries de salle de bain et faire d’un égocentrique moyen, un m’as-tu-vu hors pair, pire, un mégalomane de l’exhibition !
La jubilation qu’ont certains d’exposer à des milliers d’utilisateurs les éléments les plus anodins de leur vie privée est pour moi incompréhensible.
C’est le côté le plus inutile et le plus idiot du Web.
Cela n’offre aucun intérêt.
Renseigné sur les visages, les âges, les vêtements, l’état civil des exposants, et après ? Quelle importance ! Marié, pas marié, cocu, veuf, lesbienne, entretenue, qu’est-ce qu’on en a à foutre ?
Le curieux passe à côté de l’essentiel, à savoir ce que L-F Céline appelle « le trognon ». Et pour cause, la plupart des informations, ainsi semées à tous vents, n’ont strictement rien à voir avec la réalité de l’être. Le web est le pays du mensonge. Le portrait y est flou, quoique flatteur. L’autoportrait est toujours trafiqué, même quand il est tiré par quelqu’un de sincère.
Quel est l’intérêt de faire partager ses photos de famille avec des inconnus, alors qu’on ne peut ouvrir chez soi cette galerie de portraits, sans bailler ?
Qu’un fan de Hallyday signale sur le Web qu’il a vu tous les concerts de sa vedette en 2011 et 2012, franchement, est-ce intéressant ? Un accroc de l’écran plat pourrait répliquer que ça permet de savoir ce que font les autres, sans leur poser la question.
Tout ça, en-dehors de ce qu’on appelait sur les champs de foire « en chair et en os », vu que tout est numérique, chimérique, électronique, fantasmé en deux dimensions.
Autrement dit, ça manque d’épaisseur.
Nous faisons semblant de croire que « la pancarte » qui nous représente a quelque chose de nous, pourtant nous avons conscience que cela ne sert à rien… rien de plus faux que le trompe-l’œil.
J’ai été surpris, de « rencontrer » sur le Web, une personne dont il me semblait, jadis, avoir perçu des qualités mêlées à des défauts, au cours d’un certain nombre d’années de relations assidues. Il m’avait paru que les défauts étaient en plus grand nombre que les qualités.
Retrouvailles en virtuel, l’artiste avait inversé la tendance !
Peut-être m’étais-je jadis trompé ? C’est possible après tout. Notre jugement en contact réel est presque toujours faussé par nos aprioris. Il en va différemment sur le Web. Plutôt que faire de la psychologie, il faudrait se contenter du rapport de police : âge, poids, taille et couleur des yeux. Tatouage au-dessus du nombril. S’exprime en français et anglais.
C’est utile pour qui veut copuler par petites annonces. On peut même aller jusqu’à donner ses pratiques sexuelles : sado, maso, bondage, fouet, la simple, la double. Pour autant, rien ne vous dira si l’éventuel partenaire est chiant, odieux, désinvolte, généreux, sincère, etc…
On ne saura même pas s’il a une belle gueule et son âge réel !
Il paraît que la démarche du Web pour les timides est désinhibante !
Que dire du malheureux qui décrit les progrès d’un cancer, se raccrochant à la pensée qu’on va le plaindre sur le Web ! Ou cette autre qui accouche quasiment en direct. C’est tout juste si elle ne vous invite pas à couper le cordon !
Le Web est aussi l’occasion de libérer ses bas instincts et on en voit qui dénoncent à tour de bras, avec photos à l’appui, la voiture mal garée, ou un voisin gênant.
Les enseignants y sont brocardés et les photos de « bagarres » organisées dans les cours d’école, prises par des portables, sont seulement révélatrices d’une autorité nécessaire à toute transmission du savoir qui se perd.
Reste que les connections si elles ouvrent les loges des concierges, emmerdent aussi les princes des régimes forts, perturbent la suffisance des exploitants de la démocratie et sont une bouffée d’air pour les citoyens, comme en Chine, qui doivent ruser avec les autorités pour des contacts avec les utilisateurs d’autres pays.
Commentaires
Des fois , tu es chiant et pourtant, je ne peux pas m'empêcher de lire tes chroniques parfois tellement débiles, même si c'est un érudit qui les écrit...Bon dimanche mon vieux Richard.
Postée le: reiter | août 25, 2012 11:27 PM
De cette chronique je n'ai retenu que les mots : cocu, lesbienne, chiant, nombril, copuler, loges et démocratie.
Richard III quand vous êtes fatigué, abstenez-vous !
Postée le: Henry | août 26, 2012 10:30 AM