Le flou et le loup.
Ivan Rioufol, artiste des variétés du Figaro, est l’employé de Dassault chargé de dire tout le mal qu’il pense de François Hollande.
Audience garantie au journal de la droite française où l’on déguste du socialiste en amuse-gueule et en plat de résistance. Rioufol puise dans sa détestation de la gauche un talent qui n’est pas loin de valoir celui de Chamfort, son prestigieux aîné du genre.
Hollande avec 57 % d’avis négatifs après seulement cent jours de présidence, est quasiment au coude à coude dans les sondages avec Sarkozy, près de couler à pic dans l’opinion.
Martine Aubry aux primaires socialistes avait vu juste, quand cherchant à refaire son retard dans les sondages, elle avait lancé la fameuse réflexion attribuée à sa grand-mère : « quand c’est flou, il y a un loup ». Oui, c’est un président flou, comme dans un film de Woody-Allen, il échappe à la mise au point des objectifs.
Rioufol en jubile, évidemment. Il ne se sent concerné de la gravité de la crise qui frappe son pays, que par rapport aux erreurs et aux tergiversations du président.
Le Top 50 des personnalités préférées des Français prend soudain plus d’importance pour le journaliste que les sombres perspectives de la rentrée.
C’est ainsi que nous savons désormais que « Le "président des bisous" prend la 15e place au Top 50 des personnalités préférées des Français, dans le classement publié dimanche par le JDD. François Hollande rejoint ainsi une cohorte de comiques et d'artistes de variétés, menée par le no 1 du palmarès, Yannick Noah, qui était venu saluer d'un show à La Bastille la victoire de la gauche en mai dernier. »
Et Rioufol, qui n’a jamais été autant heureux depuis que les socialistes au pouvoir sont en train de faire pire que Sarkozy, entendez par là, qui se trouvent concernés par une crise sans précédent, de conclure : «Les hommes politiques avaient disparu des premières places de ce genre de podium. La 15 e position prise par Hollande, l'homme qui "aime les gens" (mais "pas les riches") et qui aurait voulu que le mot "race" disparaisse, illustre la régression de la politique, ramenée au niveau des professionnels du divertissement, du spectacle et des bons sentiments à foison Alors que l'Etat est proche de la faillite, que la société française vit sur une poudrière et que le monde est particulièrement instable, singulièrement dans les proches pays du Maghreb et en Syrie, l'angélisme que développe la gauche au pouvoir ressemble de plus en plus à une démission collective. Il est louable de préférer la paix à la guerre et de vouloir protéger le faible du fort. Encore faudrait-il que le chef de l''Etat se montre à la hauteur des situations. Sa médaille du Top 50 annonce le pire. »
Malgré la mauvaise foi évidente, il y a du vrai dans cette pénultième déclaration de guerre de Rioufol à la gauche et à son chef de file, devenu président de la république par l’envie qu’avait surtout les gens, de ne plus voir Sarkozy un nouveau quinquennat.
Mais la vérité qui se dégage de cette critique de Rioufol, tient dans le manque d’audace du président pour sortir de la crise. Il n’a pas pris le contrepied de Sarkozy. Il refait le coup de Jospin en 2002, lorsqu’il annonçait ingénument que « sa politique n’était pas socialiste ».
François Hollande n’ose pas prendre les décisions qui s’imposent pour une véritable politique de gauche.
L’héritage de la droite est trop lourd à porter, l’opinion n’est pas prête, bref, toutes les excuses sont bonnes pour masquer un manque de volonté, une peur de faire pire en provoquant les détenteurs de capitaux, avec la conséquence de se mettre l’Europe libérale à dos.
Rioufol a raison. Si Hollande avait été le loup au lieu d’être le flou, Rioufol aurait eu tort.
Certes, il aurait braillé que le président « assassinait » la France ; mais, au moins, on aurait vu autre chose que le sarkozysme dilué dans de l’eau de rose.