Ministre mode d’emploi.
Tout le monde peut devenir ministre. C’est un droit des citoyens. Il suffit de le vouloir. S’y préparer exige un effort, de l’entraînement et la conviction d’être le meilleur. Le reste est livré à la chance et au hasard !
D’abord, il faut s’informer, se tenir au courant des enjeux, des rapports de force et suivre les statistiques sur l’opinion, flairer d’instinct le parti fort dans les années à venir. Celles qui précèdent ne sont d’aucune utilité. Il est plus facile aujourd’hui d’être sans conviction qu’avant, vu que les partis de gouvernement sont de plus en plus semblables. Seuls quelques joueurs peuvent miser sur un petit parti, qui a des ambitions.
Par exemple la N-VA. Première condition, parler néerlandais, avec l’accent anversois ou celui de Hasselt, c’est sans importance. En 2005, un wallon qui sentait que Leterme faisait une gaffe monstrueuse en alliant au puissant CD&V d’alors, la N-VA, pouvait louer un kot à Wijnegem et fréquenter les réunions de Bart De Wever.
Le même peut encore s’installer à Mons et s’inscrire au PS local. Il s’arrange pour devenir indispensable, placer les chaises, monter la sono, accrocher les drapeaux, vanter la nouvelle gare, se rendre utile et applaudir ostensiblement au discours du grand homme.
Les diplômes.
Détail important, quoiqu’on n’ait jamais expliqué ce qu’est l’intelligence - qui en a beaucoup et qui en a peu - on s’est habitué à croire que ceux qui fréquentent de grandes écoles, en ont suffisamment. Ils ne sont pas plus intelligents que d’autres qui n’en ont pas fréquenté, mais ils passent pour davantage pourvus, parce que cette société n’a pas le temps d’évaluer les hommes au cas par cas C’est ainsi que sur la bonne mine et avec de bons diplômes, on sort aujourd’hui des 1500 € le mois, pour plafonner à quinze fois plus en faisant de la politique. Statistiquement, les avocats sont les plus nombreux aux bonnes places. Cela s’explique par l’habileté qu’ils ont à s’exprimer et qu’on leur apprend dans les écoles. L’éloquence, c’est encore autre chose. Mélenchon est éloquent qui n’est pas avocat. Marcourt n’est pas éloquent, alors qu’il est de la corporation !
Le seul critère d’intelligence ne se voit qu’en fin de carrière, quand le politique prend sa retraite sans aucune condamnation, s’étant faire réélire à chaque élection.
Le Soir, qui n’en rate aucune dans le domaine de la bêtise, a même publié un article sur l’importance d’avoir un diplôme adapté au ministère qui vous est attribué. Très peu sont dans le cas. Sabine Laruelle est ingénieure agronome et s’occupe d’agriculture, c’est bien la seule et on peut voir au résultat que le diplôme adapté n’est même pas un critère de garantie !
L’essentiel n’est donc pas dans une capacité qui serait en adéquation aux études et à la fonction ministérielle, mais d’avoir un papier signé d’un recteur d’une école de prestige, peu importe si vous êtes allé le chercher en Suisse avec l’argent de papa.
Vous n’en avez pas ? Ce n’est pas grave. Vous faites le voyage de Saint-Pétersbourg. Dans le quartier Udelnaya, il y a un énorme marché aux puces qui va de Volcovskaya à Kuptchino, là pour deux cents kopeks, vous sortez de Sandford ou de Berkeley, au choix.
De la gueule, de la prestance et de l’humilité feinte feront le reste. Regardez jusqu’où Di Rupo a poussé la modestie.
On se rappelle Joëlle Milquet. A ses débuts Elle n’en menait pas large devant Gérard Deprez, au PSC, avec les vieux bourges de sacristie en outsiders ! Et dire que le Gérard joue aujourd’hui une partie minable, accroché aux basques des Michel, alors que « la petite » fait la belle carrière que l’on sait au cdH !
Jusqu’où a-t-elle été pour se faire adouber par Deprez ? On ne le saura jamais.
Pour être au-dessus du panier, il manque l’élément essentiel : la reconnaissance des urnes… la notoriété de la rue. C’est le plus difficile. Tout le monde ne capitalise pas des voix de préférence en profitant des circonstances, comme les Happart : trente ans de rente pour une résistance aux Flamands !
Il faut saisir le bon moment. La notoriété électorale se guette, se prend et s’amplifie parfois en exagérant un défaut de la personnalité qu’on vous suppose. Papa Daerden est l’exemple type d’une ivrognerie vraie ou supposée – sans doute en alternance – qui lui a permis de mettre dans son escarcelle des dizaines de milliers de voix de préférence. Après, il faut gérer. C’est tout un art. Et puis, il y a le football. Passer par un club et en être le supporter acharné, c’est indispensable pour être élu dans une ville où le stade entasse des milliers d’aficionados locaux sur ses gradins.
Croire en son étoile, ne pas s’en laisser compter, interrompre tout qui pose des questions désagréables et jouer les indignés quand des militants vous accusent de forfaiture, vous aurez des chances de rester à flots.
Ceux qui sont honnêtes n’arriveront jamais à rien dans le métier. On dirait que la vertu et la scoumoune sont jumelles !
Dix-sept salopards ?
Ils sont bien plus nombreux !
Je ne fais pas de l’antiparlementarisme primaire. C’est le plus beau et le plus noble destin au monde, quand il est fait par des gens honnêtes et de conviction.