Jean Jambon comme à Aubel ?
Il y a deux exceptions en Belgique francophone dans la francisation des noms et prénoms venus d’ailleurs. La première va aux artistes et aux politiciens anglophones. Il faut entendre les fans d’une vedette américaine prendre l’accent inimitable du Texan récemment débarqué à New-York, alors qu’ils ne parlent pas un mot d’anglais, parler des artistes connus : Dee Dee Bridgewater, déjà du passé, Fountains of Wayne ou plus difficile, If These Trees Could Talk. On assiste à une bonne partie de rigolade.
Et la seconde exception, plus à portée, c’est la langue flamande dans toute sa splendeur. Presque tous les Wallons se sont frottés aux rugosités du vocable des gens du Nord et se sont plus ou moins bien adaptés, dans la peur de les perdre !
Voilà bien leur tort.
Un de mes grands-pères était néerlandais et s’appelait Jan à Maastricht. Aussitôt en terre francophone on a dit Jean. Il a trouvé cela normal.
Tout ça pour dire qu’il n’y a aucune honte de prononcer les « J » à la française et comme « Yan Yambon » en a deux, il serait séant qu’en francophonie on appelât le titulaire Jean Jambon, même s’il n’est pas d’Aubel.
On fait moins d’histoire pour franciser du danois ou du norvégien.
Donc Jean Jambon défraie la chronique ces temps-ci. On l’aurait vu, lui le chef de groupe N-VA à la Chambre, dans une réunion de l’amicale d’extrême droite Sint-Maartensfonds en 2001. Il faut quand même rappeler que le Sint-Maartenfonds, est une amicale d’entraide au profit d’anciens combattants du front de l’Est. Il ne doit plus en rester beaucoup. Il est vrai que Jean Jambon s’est produit sur la scène et s’est fendu d’un discours un 30 juin... Il y a de cela treize ans. (1)
Et alors ?
Il existe bien une photo de Bart De Wever serrant la main de Jean-Marie Le Pen, comme on a vu plastronner à la tribune du Club Lorraine – club qui ne passe pas pour être modéré non plus – Rudy Demotte, comme d’autres socialistes francophones.
Même si les accointances d’extrême droite disent bien ce que cela veut dire pour Jean Jambon et les autres, ils ont bien le droit de s’aller produire où ils le veulent.
Ce qui compte, n’est-ce pas le programme qu’ils proposent à leurs électeurs futurs, espérant être élus avec ça ?
Celui de Jean Jambon et de son patron De Wever, est explicite de ce qu’est une opinion de droite, puisque l’Open Vlaamse Liberalen en Democraten (Open Vld) est, à quelques nuances près, identique, à part le confédéralisme (Si l’ex-gros a du succès en mai prochain, ça leur viendra).
Le programme de la droite flamingante est simple. Pour se débarrasser en Flandre de tous les maux actuels, il faut se défaire de l’État fédéral et surfer sur le confédéral, avant de faire de la Flandre un État souverain.
Ce n’est pas vrai pour l’Open Vld dirait Alexandre De Croo. Il est vrai que le discours n’est pas le même que celui de Jean Jambon, quand on l’interview à la sortie d’un conseil des ministres. Il suffit d’écouter Gwendolyn Rutten, l’actuelle présidente du parti d’Alexandre, de même que les ministres du même bord, pour se demander si la dame ne fait pas du Jean Jambon sans le savoir, comme ses collègues.
La recette est bien là, avec le confédéralisme plus de hausse d’impôts, de dettes et moins de fonctionnaires.
Qu’une pareille alternative survienne et qu’un type plus intelligent que Demotte menace Anvers d’aller s’approvisionner à Dunkerque et voilà les Flamingants reconvertis en fédéralistes !
Deuxième formidable réforme capable de relancer l’économie : supprimer l’indexation automatique des salaires. « Ce système sera remplacé par des accords sur les salaires fixés tous les deux ans par secteur ». Là, Jean Jambon est même rejoint par Didier Reynders.
Abaissement de l’impôt des entreprises de 33,99 % à 27,13 %, cela va sans dire.
Les allocations de chômage évidemment limitées à deux ans et adaptées au salaire, réforme aussi désirée par le MR, l’âge de la pension reste à 65 ans comme avant, mais la réglementation pour arrêter plus tôt sera drastiquement revue.
La tarte à la crème de la sécurité provoque le lyrisme chez Jean Jambon : beaucoup plus de policiers dans les rues et exécution de toutes les peines.
Jean Jambon laisse pour la bonne bouche et pour plus tard, le soin de régler le sort de Bruxelles.
En quelques mots, l’application de ces mesures dans une Flandre seule ou fédérée aux autres Régions conduirait l’ensemble de la population à rivaliser avec le niveau de vie d’États comme la Bolivie ou le Paraguay, en attendant de pouvoir concurrencer le Bangladesh. Par contre, le gros pognon sort gagnant dans la combine de la Flandre éternelle !
Une seule question : la population a lâché le socialisme révolutionnaire parce qu’elle pensait que le système capitaliste lui procurerait plus de bien-être et qu’elle pouvait espérer davantage pour l’avenir. Est-ce que Jean Jambon ne craint pas avec les mesures libérales qu’il préconise, que la population ne revienne au socialisme révolutionnaire ?
Posée autrement, on pourrait se demander jusqu’où le peuple est capable d’accepter qu’on lui botte le cul par des politiciens amoureux fous de capitalisme ?
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1. Adolphe, moine puis évêque d'Osnabrück (✝ 1224) se fête le 30 juin.
Commentaires
Très jolie liégeoise. Le peuple, ça n'existe pas. C'est comme Dieu. Mais certains y croient.
Postée le: Joseph Meyer | octobre 30, 2013 05:08 AM