La Belgique de Joëlle Meskens
Joëlle Meskens est correspondante à Paris pour le quotidien belge Le Soir depuis quinze ans.
On la voit sur les médias parisiens. Une notoriété lui est venue de son statut de journaliste belge en résidence permanente à Paris. Nous avons une réputation de blagueur surréaliste et si en plus on nous croit dotés d’un gros bon sens, Joëlle Meskens symbolise ce que l’étranger croit ce qui se dit et se fait de mieux en Belgique.
Hier encore, Yves Calvi l’avait invitée dans « Mots Croisés » le magazine politique de la 2 française.
J’ai ressenti durant ses interventions tout ce qui se dit et s’écrit de conventionnels à propos de la Belgique et de l’Europe dans lesquels je ne me reconnais pas et je ne suis pas le seul. En réalité, madame Meskens représente l’opinion moyenne belge dans toute sa passivité et ses douces croyances, envers la France (Hollande fait son possible), envers l’Europe (Ce sont les États qui font mal leur travail), envers le taux d’imposition des Français (les Belges sont plus taxés que les Français et ils ne bronchent pas) etc, etc.
Le voilà ce jeu de miroir de la politique qui assimile à une majorité tout ce qu’il y a de bourgeois et de convenable pour établir une règle qui stipule que ce qui dépasse à gauche et à droite doit être passé à la tondeuse.
Et Joëlle tond en notre nom, si bien que les journalistes pourtant subtils qui sont encore nombreux en France, nous considèrent comme des phénomènes de bêtises banlieusardes, champions hors catégorie du lieu commun et qui, malgré tout, se révèlant parfois intelligents. Escamoté le sentiment d'insécurité salariale que produisent le chômage de masse, l'augmentation des emplois précaires et des travailleurs pauvres qui permet de maintenir le salarié en état de subordination. Oublié, le divorce permanent d’une Belgique coupée en deux avec, outre le problème des langues, celui des rejets : la Flandre ne veut plus de la royauté et s’en remet pour l’essentiel au cadre européen, la Wallonie adhère à la dynastie et plébiscite la royauté, tandis qu’elle se méfie de l’Europe, de ses directives et de son laxisme dans sa gestion de la mondialisation.
Qu’Yve Calvi demande à Joëlle Meskens son opinion sur des polémiques entre partis politiques en France, en sa qualité de témoin extérieur, c’est normal ; mais qu’il lui demande de faire des comparaisons avec ce qui se passe en Belgique sur des situations à peu près semblables, les Français n’auront que l’opinion d’une journaliste au Soir.
En Belgique aussi la piteuse situation du marché du travail pousse les employeurs à maintenir une pression sur les salaires vers le bas. La pauvreté joue un rôle important en poussant ceux qui souffrent à accepter les emplois et les sacrifices qu’ils n’accepteraient pas dans une situation prospère sans des avantages et des salaires en conséquence.
On ne sait pas d’où sort Joëlle Meskens pour ignorer le fond de mécontentement des Belges au point d’assurer les Français qu’ils broient injustement du noir, sous-entendant qu’en Belgique, on a courageusement fait face avec optimisme aux dangers qui pèsent sur notre société et que les Français ont grand tort de ne pas espérer en l’avenir.
De même pour la dette, la France prend du retard. Cette année, quelques milliards la grossiront encore. Comme Calvi ne demandait pas l’avis de Joëlle Meskens sur la dette belge, par rapport à la française, nous ne saurons pas quel message d’espoir elle nous aurait envoyé depuis Paris.
La dette individuelle fonctionne comme un mécanisme disciplinaire. Plus on a des crédits à rembourser, plus on doit travailler. Acculé à rembourser ou être saisi par l’huissier, on accepte n'importe quel emploi. La dette publique c’est à peu près la même chose. Elle n'est pas que le résultat d'une politique aventureuse des comptes publics, elle fonctionne comme un instrument soutirant de la richesse au plus grand nombre pour la reverser sur les intérêts dus aux riches, augmentant ainsi les inégalités, poussant les travailleurs au silence.
Le mérite de Joëlle Meskens aura été de rassurer les classes bourgeoises françaises et belges satisfaites d’elles-mêmes, avec la certitude qu’elles sont sur la bonne voie.
Peut-être bien que le numéro pas trop critique à l’égard du gouvernement français de Joëlle Meskens a le mérite d’assurer sa carte d’accréditation de journaliste étranger ? Et que, à titre privé, Joëlle Meskens est plus intéressante à fréquenter que sur les plateaux de télévision ? Car c’est une femme intelligente et d’un bon niveau de connaissance des politiques des deux pays.
La suite payante sur le Soir.
Commentaires
Très bon article sur la pratique partisane de Madame Joëlle Meskens. Son rôle en France est très apprécié par la classe bobo. Tous les journalistes ayant cette soumission aveugle mais intéressée sont bienvenue sur tous les médias en France. Donc, rassurez-vous ce ne sont pas que les journalistes Belges qui oeuvrent de cette façon. Ce sont les médias français qui aiment ce journalisme là. Le débat contradictoire n'existe plus dans le pays des lumières. Même nous peuple souverain, nous sommes souvent considéré comme des gens ayant un QI de CE1 ou CE2. ( discours off de PERRUCHOT-Marianne, la semaine dernière) Article à lire absolument. Pour ma part, j'aime la Belgique et je sais que les belges comme les français sont abusés par une oligarchie bienpensante qui va de plus en plus vers des politiques autoritaires qui briment les citoyens... Cette presse française que je critique car elle n'exerce peu ou plus son rôle de contre pouvoirs et c'est bien normal puisque qu'elle est détenue par ceux qu'elle sert... Tout ceci ne présage rien de bon en France, en Belgique , ni même dans les autres pays membres de l'Union Européenne. L'idée était belle mais elle se vide de ses espoirs et devient une machine qui affole les peuples et amuse les lobbyistes qui détiennent eux le vrai pouvoir . Merci de m'avoir apporté un éclaircissement différent. J'ai pris la liberté d'accompagner votre article de mon avis sans savoir la date de parution. Je vous souhaite le meilleur et une agréable continuation.
Postée le: Rolland | octobre 4, 2020 09:13 PM