Il y a con et con.
Olivier Mouton, du Vif-L’Express part en guerre contre la haine des autres. La haine est un sentiment très répandu sur le Net. Il écrit très justement « La liberté d’expression serait un droit absolu, intangible. Faux: il existe des lois contre le racisme, la xénophobie et l’incitation publique à la haine. »
Il a absolument raison et je suis entièrement d’accord avec lui. Mais, c’est après que cela se gâte, lorsque Monsieur Mouton passe aux solutions, pour réduire une liberté déjà réduite.
Au lieu de préconiser une « libéralisation » de la liberté d’expression, il suggère ni plus ni moins de renforcer les interdits, en conséquence de « gendarmiser » la Toile et d’établir une censure, avec amende et prison, s’il y a lieu.
Le hic, afin de concrétiser l’assaut de « la haine de la haine », il faut des censeurs, beaucoup de censeurs, bien plus que les quelques gendarmes chargés de dépister et d’appréhender les pédophiles perpétrant leurs crimes par Internet interposé.
Qui dit interprétation de la loi, dit critères d’interprétation. Autrement dit, pour que toute démocratie soit digne de ce nom, il faudrait qu’un censeur soit surveillé par un autre censeur, cet autre censeur observé par un autre, etc, etc.
Et dans quel but ?
Celui de définir une morale dans une de nos dernières libertés. De fait, elle ne l’est déjà plus, depuis ces lois élaborées à la hâte punissant le racisme et l’antisémitisme, lorsqu’on s’est aperçu que les citoyens de base sont « peut-être » majoritairement racistes et accessoirement antisémites et qu’il fallait tout de suite arrêter le fléau par la peur du gendarme.
On a donc délibérément fabriqué des lois à l’encontre des principes de la liberté d’expression, même si c’était dans un but « louable » : celui de moraliser la société.
Sans vouloir entrer dans la polémique, ces lois en elles-mêmes sont, pour la première fois dans l’histoire de la Justice de la démocratie de ce temps, chargées de réprimer « le mauvais esprit », au nom du « bon esprit ». Elles sont le pendant moderne de la loi Le Chapelier interdisant les rassemblements ouvriers de la belle époque, étant entendu que des ouvriers qui s’assemblent c’est pour comploter contre l’Autorité.
Le législateur se détourne volontairement d’une pensée collective, pour faire triompher une pensée élitiste.
Tout ce qui n’est pas bon et accepté par une élite bien pensante, est donc mauvais et inacceptable, voilà à peu près ce que ces lois signifient.
Il se trouve que je ne suis ni raciste, ni antisémite et, par conséquent, ces lois et la demande d’en durcir les applications que suggère Olivier Mouton, devraient me satisfaire et me réjouir.
Eh bien non ! la seule liberté qui vaille la peine d’être défendue et qui ne devrait jamais être discutée est bien celle de dire ou d’écrire ce que l’on pense. Y toucher, comme le font les lois qui répriment la pensée « illégale », sont déjà insupportables, sans qu’il faille encore les durcir.
Monsieur Mouton est de la graine de censeur « Chaque jour, la haine et le racisme se déversent sans retenue. En ligne. Instantanément. Comme un flux continu de nos instincts primaires. Chaque jour, des citoyens expriment en réponse leur dégoût de voir proférer tout et son contraire sans la prudence la plus élémentaire, sans la moindre retenue ni la moindre pudeur. Un match nul, où les expressions contradictoires se renforcent les unes les autres. »
On a compris à ce constat en tout point conforme à la réalité, que le journaliste se bat contre la connerie, sans savoir que la connerie est si largement répandue que nous en sommes tous plus ou moins les dépositaires. N’écrit-il pas lui-même que le racisme est inhérent à nos « instincts primaires » ? Sauf si Monsieur Mouton s’exonérait du grégaire, en quoi il serait plus con que je ne pensais, le voilà doté d’une seconde nature raciste et antisémite contre laquelle il ne lutte bien qu’en y associant les autres.
Mais ce type est dangereux !
Que Monsieur Mouton se méfie de ce que les lois qui interdisent la pensée raciste, interdisent un jour le droit de se présenter contre ceux qui détiennent le pouvoir.
Notre « démocratie » est déjà en bonne voie qui met des bâtons dans les roues des petits partis de mille et une manières.
Un con peut-il partir en croisade contre un autre con ? S’il reconnaît qu’il est de la confrérie, déclarera-t-il qu’il combat un plus grand con que lui, un con abominable, un concentré de con ? Admettons sa sincérité. On voit jusqu’où un pareil raisonnement conduit. Et croyez-moi, c’est un autre con qui l’écrit.
Commentaires
Intéressant Richard III Duc de Gloucester, je suis tombé par hasard sur votre blo, et de façon plutôt incongrue, mais j'en suis resté fort intéressé ! Tant par votre style qui m'a beaucoup plut, que l'écho de vos pensées à mes idées.
Bonne continuation à vous !
MicaOne
Postée le: MicaOne | avril 23, 2014 07:05 PM