Trois semaines en ballon…
Ce n’est pas du Jules Verne, c’est le temps du parcours du président du MR en campagne personnelle, pour la formation d’un gouvernement. Mieux qu’un tour de terre, c’est un tour de popotes qui n’a pas fini de faire jaser.
On voit très bien jusqu’où l’ambition va conduire Charles Michel en demandant prolongation sur prolongation à la mission que lui a confiée le roi Philippe : la constitution d’un gouvernement dans lequel la région wallonne ne sera présente que par les libéraux !
Le sondage commandé par le fils de… pour le compte de son parti n’avait qu’un but, légitimer sa position par l’opinion, non pas publique, mais de son seul électorat.
Vous pensez, frustré de toute représentation libérale dans les deux gouvernements régionaux, comme le sympathisant libéral va bondir de joie à la perspective de placer au moins sept ministres dans un gouvernement ainsi formé !
C’est qu’ils ont soif des pépètes du contribuable, ces libéraux là !
Si, entre 65% et 70% des sondés estimaient qu'un tel gouvernement serait une bonne solution (La Libre Belgique) elle n’en porterait pas moins le nom de kamikaze ! En français courant, cela s’appelle une opération suicide.
Aussi Charles Michel qui entreprend la formation d’un tel gouvernement, juge-t-il utile de prendre quelques précautions.
L’idéal pour masquer une ambition dévorante, c’est de s’abriter derrière des grands mots : patriotisme, nécessité de lutter contre la crise, les dettes de l’État, urgence des résultats, en mettant en avant le rôle expiatoire de victime que serait Charles Michel si l’affaire venait à capoter. On voit d’ici le scénario : Charles s’est jeté héroïquement dans les flammes pour éteindre l’incendie… hélas ! il en est sorti meurtri. Ses efforts furent vains… etc.
Di Rupo, poussé par la même ambition a connu cela, avec les circonstances atténuantes que son gouvernement était moins déséquilibré que celui que Michel veut mettre sur pied.
Nous assisterons sans doute si l’affaire tournait à la catastrophe, à la propre victimisation de sa personne par l’individu lui-même.
Un gouvernement tout à droite, à un moment charnière où même le droitier Jean-Claude Juncker qui va succéder à Barroso à la tête de la Commission européenne penche pour une meilleure gestion sociale de la crise, avec un De Wever qui ne peut pas changer de cap sous peine de perdre tout de suite un tiers de sa clientèle électorale et un CD&V qui parle de rigueur et de faire fondre en Flandre le personnel administratif, faut-il que Charles Michel en ait envie pour tenter le coup et demander des rallonges de réflexion au roi.
Bien sûr du côté du PS, le Napoléon montois est frustré de ne pas rempiler avec les mêmes dans un soap-opera moins drastique, pourtant ce qui se prépare contre lui et malgré lui ne pourrait que renforcer la couleur rose bien pâle ces temps-ci de son parti. Belle occasion de jouer les socialistes réconciliés avec le peuple que cette opposition là ! Un seul obstacle au miracle : à la région, Di Rupo qui se prépare à la présidence ne fera pas de cadeau aux Wallons. Il a trop d’amis à pourvoir, trop de complications administratives et trop de hauts salaires à l’assemblée régionale pour pratiquer moins de taxes et de retenues, moins de mesures contre les chômeurs.
Aussi, entre Charles Michel et Di Rupo, cela va être comme un championnat de vitesse à l’envers au vélodrome. Ils vont s’observer et c’est le plus rapide qui va coiffer l’autre qui portera le chapeau des mesures nouvelles qui nous pendent sous le nez à la région et au fédéral. À ce petit jeu, Charles Michel ne fait pas le poids. Di Rupo est un maître de la tromperie et du faux semblant.
Charles Michel a le bon physique du héros malheureux, victime de la mauvaise foi des autres, le visage du persécuté type. La calvitie précoce est une disgrâce qui le sert. On est valorisé quand on se plaint, parce que les gens, dans le fond, ont bon cœur. Enfin dernier argument, derrière lui se profile le père, ce qu’il sera dans vingt ou trente ans, selon qu’il aura fêté ou non ses mandats successifs. Et on l’en plaindra davantage.