François Brabant assume.
Histoire secrète du PS liégeois. Cools, Mathot, Onkelinx, Daerden et les autres, par François Brabant, Editions Jourdan, 372 p.
Je l’écris tout de suite, je n’ai pas lu l’ouvrage, mais j’ai lu les commentaires que des confrères de l’auteur ont fait de ci, de là, à TV7, au Soir et au Vif-l’Express.
Les scoops dans « l’Histoire secrète », il n’y en a pas, les confrères se seraient précipités sur cette provende. L’histoire du PS liégeois est tellement connue, y compris dans ses recoins les plus maçonniques… Alors, qu’est-ce qui pourrait bien captiver le lecteur ?
Je n’y vois qu’un intérêt : celui de mettre en évidence le déclin de la section la plus importante du PS wallon, bien réel, augurant l’usure du socialisme de collaboration, afin d’en dresser un tableau pour ceux qui y croient encore, qu’ils se fassent une raison et votent enfin à gauche !
Le socialisme n’est plus qu’une variante gestionnaire à l’intérieur du capitalisme, reconnu comme seul modèle de la société industrielle.
Et ce phénomène encore mal défini, dont on redoute les effets dans les milieux de pouvoir, mérite qu’on s’y attarde. L’Histoire déclinée comme « secrète » est de bonne guerre pour appâter le badaud.
La mécanique du pouvoir, à Liège, n’est pas enrayée. La différence par rapport à 1991, date de l’assassinat de Cools, c’est l’absence dorénavant de grands formats. Il n’y a plus que des grandes gueules que personne ne connait. Résultat, ce beau monde a presque disparu du pouvoir central du PS, remplacé par les Borins.
La dernière pointure en vedette, n’est même pas le porte-parole du parti liégeois, c’est Marc Goblet propulsé à la place d’Anne Demelenne au secrétariat général de la FGTB. Et encore… ce type a blanchi sous le harnais. Il a usé ses fonds de culotte dans la salle d’attente du rez-de-chaussée de la section place Sainte-Véronique. C’est dire comme il est téléguidé.
Marc Goblet dit regretter "le centralisme technocratique du Boulevard de l'Empereur", décrypté cela veut dire qu’il déplore l’absolu effacement de la section liégeoise du PS dans les instances supérieures occupées par les créatures du Montois Di Rupo.
Les instances actuelles n’ont plus rien à voir avec le PS ancien. Ils ne brassent aucune idée nouvelle. Au reflux prochain, s’ils disparaissaient, à peine retiendrait-on leurs noms, puisque déjà on les ignore à l’heure présente.
Alors, le « thriller implacable » de François Brabant, avec un Marcourt trop longtemps sur les estrades pour trois fois rien, un Mabille qui se pointe, mais avec prudence et en assurant ses arrières, ce serait plutôt le supplément liégeois de la « Semaine de Suzette ».
Parce que le thriller pour captiver doit être celui que l’on découvre et dont l’issue tumultueuse est incertaine. Les bains de sang ont fait place aux cocottes en papier des ronds de cuir.
L’auteur n’a pas écrit un thriller, il a simplement rappelé que le temps d’André Cools, le plus scandaleux événement de l'histoire politique belge, l'affaire Agusta-Dassault, avec les bêtes de scène Mathot, Daerden, Van der Biest, Laurette Onkelinx, Coëme… c’est bien fini place Sainte-Véronique, même si les ambitions et les « attentats » à la Machiavel persistent, pour que l’ange gardien Demeyer ne se sente pas tout seul. C’est de l’opérette !...
Le livre a raté l’occasion de prévenir les lecteurs que, du temps de ces furieux grandioses, le PS avait déjà plié bagage et quitté le socialisme. Ces messieurs-dames essayaient les fauteuils de bureau de la social-démocratie, dans des costumes et des décors de la Belgique bourgeoise.
Dès 1970, on pouvait observer le lent délitement du socialisme ouvrier. Les défaites successives, la perte des journaux d’opinion, de l’Union Coopérative et la ferveur décroissante des Premiers Mai.
Le départ peu glorieux de Laurette Onkelinx pour une nouvelle carrière bruxelloise et celui de l’opposant éminent Didier Reynders pour Uccle est le dernier signal désignant le désert liégeois, pour ces deux avides des premières places et des gros plans télé.
Un dernier regard - pour rire - sur les éloges que l’on fait au livre de Brabant, lorsque le critique se laisse aller jusqu’à écrire « Enfin, que les appétits de pouvoir individuels n'éclipsent pas l'authenticité de l'idéal socialiste. Son livre l'illustre remarquablement. »
Alors là, c’est du délire « l’authenticité de l’idéal socialiste » ! Tout beau, il faudrait pour qu’il fût authentique, qu’il y en eût encore un.
On se demande si François Brabant ne vient pas de renouveler sa carte du parti. Les journalistes sont tellement fragiles de nos jours…