Charles et Bart, le bruit court…
La psychologie du témoignage dans les affaires judiciaires alimente les rumeurs. Mais c’est surtout les bruits de couloir qui ont un rapport avec la politique qui nourrissent la moitié des pages d’une gazette.
Intuition, déduction, savantes recherches, témoignages anonymes parfois créés de toutes pièces, rumeur ou pas rumeur, on pourrait ainsi trébucher à chaque pige. La fameuse règle du recoupement et la déontologie sont de la foutaise, la peur de se faire avoir ou de tomber dans le collimateur de ses supérieurs est le seul argument qui retient d’en dire plus, que ce que l’on sait, surtout quand on ne sait rien et qu’on croit savoir.
Parfois les lecteurs qui ne sont pas d’accord sur certaines affaires, disent leur opinion sur un droit établi, mais qui les dérange. La justice, par exemple, on voudrait que les lois ne s’appliquent pas à certains criminels, quand on les estime trop clémentes.
En foi de quoi, les grands criminels ne devraient jamais sortir de prison pour qu’on les oublie. À la limite, on leur saurait gré, puisque la peine de mort n’existe plus, de se suicider discrètement dans leur cellule.
De ce thème récurrent toutes les rumeurs sont permises. Ces rumeurs signifient quand même autre chose : la méfiance d’un large public pour l’institution judiciaire qui est très loin d’avoir établi une égalité de droit entre les citoyens.
En ce moment, c’est Michèle Martin en passe d’emménager chez un juge à la retraite qui rassemble le plus sur sa tête les rumeurs les plus étranges et, par ricochet, le juge à la retraite aussi.
On voit d’ici le tableau romanesque que cela pourrait faire, si ces deux là fricotaient ensemble. Mieux encore, comme on n’en sait rien la rumeur prend d’autant plus du corps…
Il est vrai aussi que dans le doute, opter pour la rumeur la plus noire, la plus infamante, c’est souvent l’instinct du plus grand nombre.
Pour Charles Michel, on n’est pas en reste non plus. Sa connivence avec la N-VA et son président De Wever semble faire des effets dans l’opinion francophone. En mariolle, le bourgmestre d’Anvers tresse une couronne de fleurs à Charles Michel, qui, compte-tenu de l’opinion francophone, ressemblerait plutôt à une couronne d’épines. Il est des amitiés dont on se passerait volontiers. Quand je m’exprime de la sorte, j’entre dans la rumeur, parce que s’il est fort possible que ce soit l’intention de Bart de compromettre Charles Michel, raisonnablement, je n’en sais rien. Je lance une rumeur.
C’est très difficile d’émettre une opinion impartiale à l’encontre de quelqu’un qu’on n’aime pas. À fortiori quand les deux sont antipathiques, c’est dire la force d’entraînement qui pousse à accréditer la première rumeur malveillante qui passe.
Pour MM. Kubla et De Decker, ce qui a été publié ne sont plus des rumeurs, mais des faits. Alors là, on dispose d’un matériau de base, libre à chacun de l’orner de ce qu’il sait ou qu’il ne sait pas. On peut donc se lancer dans une sorte de rumeur qui dénature les faits établis. Comme on est assez indulgent pour la promiscuité entre un homme politique et les acteurs de l’économie, on aurait plutôt tendance à dire que se servir au détriment de l’État, ce n’est pas du vol, c’est prendre une précaution pour les vieux jours.
Difficile de définir ce qu’est une rumeur. Ovni social non identifié, il fait partie de la vie de tous les jours. On en use sans s’en apercevoir, comme du papier toilette.
Depuis Nessie, le monstre du Loch Ness revêt toutes les apparences. Bien avant Walt Disney que l’on a dit cryogénisé, les célébrités se faisaient déjà de la pub. Depuis les énormités qu’on leur suppose ont dépassé les espérances. Certaines ne sont pas du meilleur goût, qu’importe, c’est de la pub gratis.
Les rumeurs nous concernent tous. Même ceux qui disent ne jamais mordre à l’hameçon.
Quand on n'a rien à dire elle alimente les conversations et fournit une tapée d’acteurs qui en vivent sur la scène de façon pas toujours humoristique. Le peuple n’est pas dupe sur le coup et est franchement rigolard. Sauf qu’à la longue, il finit par confondre rumeur et réalité. Une variante de la rumeur est la description des travers d’un vieux par exemple. Du coup, c’est toute la confrérie qui en prend un coup.
Où finit la rumeur et où commence l'information ? Parfois le bruit qui court se vérifie être exact. Les modes de propagation de la rumeur et d’une information vérifiée ne sont-ils pas finalement identiques ?
La rumeur inquiète par son côté incontrôlable.
On en a même tiré des jeux pour la télé. Le téléspectateur est invité à choisir une réponse vraie entre deux fausses.
Si la rumeur circule partout, c’est parce qu’elle établit un lien dans les relations de sociabilité. Elle aide même certain à survivre dans une société tout entière préoccupée à faire de l’argent. La rumeur apparaît alors, comme une féérie. Certains en ont besoin, juste pour supporter l’existence.