Le fiasco social-démocrate.
La grande difficulté des partis socialistes européens est d’organiser le virage vers la social-démocratie sans perdre d’adhérents. La pêche aux voix pour le PS est nécessaire. Le nombre d’adhérents et de sympathisants conditionne sa diffusion, son audience, et sa fonction distributrice d’emplois administratifs et d’emplois représentatifs. On l’a bien vu lorsque le PS, sous prétexte d’ouverture, a privilégié des représentants des communautés turques notamment, au grand désenchantement des défenseurs de la laïcité. Il a fait de la pêche aux voix et joué les conciliateurs en oubliant les principes de la laïcité, entre autres. Or, les électeurs ont encore une vision très manichéenne des partis. Un parti socialiste, en principe, fait du socialisme.
Le système électoral dépend cependant encore du suffrage universel. Quoique le courant social-démocrate y soit fortement aidé par la propagande de fait des journaux y compris de droite, après tout, le MR peut aussi se dire social-démocrate, le parti socialiste est obligé de tenir compte de ses électeurs, sous peine d’une sanction. Pour l’heure, il est social-démocrate de façon à ce qu’on ne le sache pas trop !
La question est « Peut-on encore faire du socialisme dans une société centrée sur l’économie libérale de profit ? ». La réponse est carrément « non ». Voilà pourquoi la gauche en-dehors du PS reste logique avec elle-même en revendiquant un pouvoir pour la création d’une autre société, moins individualiste et donc moins libérale.
Or, le Ps est partie prenante et candidat au pouvoir. On voit le dilemme.
Pour que ce parti s’adapte au courant libéral, il doit lâcher l’espérance des peuples d’un socialisme « à l’ancienne » et faire en sorte que le marché prospère au point qu’il satisfasse une grande partie de la population dans son consumérisme au quotidien.
On en est loin actuellement.
Voilà pourquoi en cas d’échec du système économique, le PS risque de disparaître à l’occasion d’une nouvelle crise que les bulles actuelles mettent dans le domaine du possible.
Il est heureux que Di Rupo ne soit plus au pouvoir, sinon il se heurterait aux syndicats, comme Charles Michel en fait l’expérience.
La quadrature du cercle n’échappe pas à l’observateur. Pour réussir, la social-démocratie doit établir une fructueuse relation entre le pouvoir politique, les syndicats et les entreprises, le tout dans une période de bonne croissance. Dans l’état actuel de l’économie et des projections qui sont faites pour les cinq années suivantes, ce n’est pas le cas.
Il y aura tôt ou tard un clash entre les producteurs et les exploiteurs, non pas que les producteurs et les exploiteurs ne pourraient pas s’entendre, on a vu en 1936, par exemple, le patronat accepter beaucoup de concessions pour conserver son patrimoine, mais la production pour être performante n’a plus besoin d’une grande partie de la main-d’œuvre, surtout celle non qualifiée et c’est ce facteur, avec le vieillissement de la population qui est inconciliable avec le système économique actuel.
Le rêve de Hollande est celui de Di Rupo : transformer le socialisme traditionnel à la façon du modèle germanique, c’est-à-dire faire fonctionner la machine étatique et sociale d’après le réalisme d’une économie franchement libérale. Cela signifie : faire de gros sacrifice à la base pour que ça reparte et, quand c’est reparti, laisser à la vie spartiate une bonne moitié de la population.
C’est un échec, parce que l’industrie est vieillissante, peu innovante et la conjoncture défavorable.
Il est impossible au PS de revenir en arrière. Il le pourrait peut-être si la perte en voix et donc en emplois représentatifs devenait catastrophique, mais connaissant l’électorat belge, les pertes qu’ils pourraient subir en l’état ne sauraient convaincre les dirigeants de ce parti, déjà tellement coupés des réalités des banlieues et de la pauvreté. Une révolution au sommet du parti serait nécessaire pour que cela change. Vous voyez une jeune pousse bousculer les anciens ténors ? Le parcours d’un Magnette qui aurait pu être celui-là, est édifiant. C’est encore un cas où l’appareil aura eu raison de tout.
La satisfaction de quelques-uns à contempler les progrès financiers de leur carrière, plutôt que s’inquiéter des bas salaires, est telle, qu’il faudrait au moins que la moitié de l’appareil perde ses mandats, pour entrevoir un léger frémissement socialiste.