Merci papa !...
Ils ont tout pour se comprendre. Ils ont eu les mêmes diplômes de droit. Plutôt que faire le métier d’avocat, ils ont choisi la politique. Ils militent dans le même parti (le MR). Ils en ont été présidents. Leurs convictions néolibérales et pro atlantistes sont identiques. Rompus à la technique de se faire valoir, l’un y a fait son beurre, l’autre engrange aussi. Toutes raisons qui pourraient les unir et pourtant, ils se détestent. L’ambition les ronge !...
Après l’aubade à Reynders, façon Bagad de Lann-Bihoué de ces dames du journal « Le Soir », il était logique que par compensation (comme à la banque), Charles Michel ait aussi son divertimento.
À l’inverse des dynasties où les successions se passent en mode interne dans la famille régnante, les successions familiales en démocratie politique se passent toujours au détriment des membres extérieurs au noyau familial.
Le plus bel exemple est la famille Michel, le fondateur ayant facilité l’accès des postes directeurs du parti à ses fils dans un premier temps, il fallut se débarrasser de l’encombrant Reynders pour que le plus doué des deux : Charles prenne la succession du père.
Pour bétonner ce droit de succession et assurer la pérennité du nouveau leader libéral, les Michel ont verrouillé la présidence du MR en offrant le poste à un comparse, sans envergure, le petit Chastel, fait et défait par Reynders donc allié des Michel, ainsi, la famille pouvait affronter l’avenir, même en cas d’échec de Charles au gouvernement, et voir la suite d’une belle carrière.
Dans ce cas de figure, on voit bien l’intérêt d’être épaulé par une famille. Didier Reynders, sans autre aide que des « amis » dont on sait bien la fragilité (des gens, comme Gérard Deprez, passèrent dans le camp Michel avec arme et bagage). Deprez n’avait pas oublié que Reynders voulait lui reprendre son casse-croûte à l’Europe, pour le donner à une autre créature. Reynders a aussi humilié Chastel quand celui-ci fit ses premiers pas en-dehors de sa nursery de Charleroi, sous prétexte qu’il parlait assez mal l’anglais !
La démocratie là-dedans ? On sait ce qu’il en est dans tous les partis en Belgique.
La tradition des dynasties familiales n’a jamais été aussi florissante. En Région Wallonne les familles Mathot, Onkelinx, Wathelet, Daerden, Ducarme, tiennent la cote. Mais il y en a d’autres, plus secrètes, volontairement masquées. En Flandre, c’est pareil !
Le nombre de parlementaires dynastiques a sensiblement augmenté ces 20 dernières années. Il faut dire que 5 gouvernements ouvrent des perspectives pour sauveurs de la patrie de père en fils. Pas moins de 26 parlementaires sur 150 (17%) de la Chambre des représentants ont un membre de la famille qui possède un passé parlementaire.
Quoi qu’en disent les « Fils de… », avoir un père célèbre aide drôlement. Une étude américaine révèle que les politiques issus d'une lignée politique ont trois fois plus de chances d'être élus. Ils sont plus médiatisés, montent plus vite dans la hiérarchie et dépendent moins de la ligne du parti. Et selon une étude norvégienne, les candidats dynastiques obtiennent plus facilement une meilleure place sur les listes, ce qui augmente encore leurs chances d'obtenir un bon résultat.
« La politologue Brenda van Coppenolle (London School of Economics) a calculé que les politiques à arbre généalogique bénéficient d'un avantage dynastique d'environ 25%. En d'autres termes, si deux candidats, l'un issu d'une lignée politique et l'autre pas, dotés des mêmes capacités étaient opposés l'un à l'autre, le premier obtiendrait 25% en moyenne de voix de préférence supplémentaires. D'après une étude du scientifique politique Benny Geys (VUB), les politiques dynastiques nécessitent moins de capacités pour être élus. »
Nous tombons dans le piège du fils méritant et plus capable que le père ! Si ça se trouve, le père n’était déjà ni méritant, ni capable. Il n’est qu’à voir la fin de carrière de Louis Michel à la Commission européenne. Personne ne se souvient de son passage !
Rien ne nous oblige à voter pour ceux dont on nous rebat les oreilles en périodes électorales. La filiation, de plus en plus, dérange l’électeur ! Quand on voit Charles, on voit Louis ! Le vieux cassait les pieds de beaucoup de monde, on se demande ce que Charles pourrait apporter de neuf ! Mais la rengaine joue toujours, le « déjà vu » crée l’habitude et pas encore le « trop vu », la lassitude.
Les experts nous disent que nous sommes victimes d’un effet sociologique. Les enfants de politiques professionnels sont dans le mouvement dès leur plus jeune âge. On parle davantage de politique à la table familiale. Le désir de faire comme papa qui se fait du blé rien qu’à pérorer et qui a l’air d’aimer ça, donne au fils un pouvoir de séduction auquel la foule se laisse prendre.
Nous laisserons la conclusion au journal « Le Vif/L’express »
« Cependant, les dynasties politiques vont à l'encontre des principes de base d'une démocratie. Il est préjudiciable qu'un candidat obtienne 25% de voix supplémentaires parce qu'il a un nom de famille célèbre. Ce phénomène remet en cause les principes méritocratiques puisqu'un politique issu d'une lignée politique nécessite moins de compétences pour être élu. Il est injuste que les enfants de politiques puissent utiliser les réseaux politiques de leurs parents pour prendre de l'avance. Il est inquiétant qu'aujourd'hui un nombre croissant de sièges parlementaires semble réservé aux "fils et filles de". »
Juste encore un mot : de nos jours le politique côtoie l’économique étroitement. Sans être taxé de corrompu, il est aisé de se faire des « à côtés » légaux. Les dynasties familiales ne s’en privent pas.
Les corrupteurs le savent. Pour faire « mieux » que papa, les fils de… ont un abord plus facile, une conception moderne de la fonction publique. Puisque la politique est devenue « un métier », il faut qu’ils en acceptent les termes comme « gratifications », « paiement au mérite », « primes », etc…