Trahison, indécence et sans-gêne.
La croissance est la tarte à la crème des mondialistes. Ils y greffent diverses théories, qui ont toutes un point commun : la croyance qu’il n’y a pas d’autres alternatives que le système économique en cours, admiré par l’ensemble de la classe politique, si l’on excepte l’extrême gauche.
Par contre, les philosophes et les naturalistes sont convaincus depuis toujours que la croissance, ne peut être éternelle, cette idée même d’éternité allant à rebours de la raison et de la nature.
À les entendre, la croissance est donc un élément passager dans le paysage économique. Personne ne sait au juste quelles seraient les fréquences de passage et surtout ce qui surviendrait dans les plus ou moins longs intervalles sans croissance, qu’on pourrait appeler des crises ou des stagnations prolongées. Comme par exemple celle que nous traversons.
Le cycle n’est donc pas régulé. Ce qui l’actionne est inconnu, sinon interprété de façon extravagante. Son mécanisme donne lieu à des disputes d’école.
À l’heure où l’on n’entend que « croissance » dans la bouche des hommes de pouvoir, ceux-ci tentent de nous persuader que la croissance règlera finalement les problèmes de la dette et du chômage, sans en être convaincus eux-mêmes ! Voilà bien les politiques pris au piège. Une relance de l’économie profiterait à leur réélection, puisqu’ils n’ont pas d’autre plan que celui-là pour se faire réélire. C’est donc la panacée du PS au MR : ramener la prospérité et le réembauchage grâce à la croissance !.
Une thèse agite le monde de l’économie, suffisamment argumentée pour être prise au sérieux : et si la stagnation était durable, voire séculaire ? Des économistes, avec des points de départ différents, se sont retrouvés d’accord sur des conclusions à peu de choses près identiques : la croissance mondiale sera faible, voire nulle, pendant longtemps.
La croissance rétablie aux États-Unis ne peut pas servir de référence aux autres pays, parce qu’elle n’est qu’un regain dû au gaz de schiste, au détriment d’une destruction des sous-sols qui oblitère l’avenir de la génération suivante. La croissance chinoise se dégonfle. L’Inde se replie sur elle-même et construit une barrière à la frontière du Bangladesh.
En Europe, à deux exceptions près, pas de croissance. On n’y peut compter que sur une avancée significative des découvertes et des technologies.
Que va-t-il rester de la tendance d’une social-démocratie qui abandonne le socialisme pour un centrisme libéral, en France comme en Belgique ? Si le PS ne peut rien offrir d’autres que l’austérité et le chômage à ses électeurs de gauche, à défaut de pêcher suffisamment des voix au centre et celles de gauche faisant défaut, il pourrait disparaître !
Comment aménager ce nouvel espace stagnant d’une économie qui n’en aurait plus que pour le capital et qui offrirait de moins en moins de chance au travail ?
À moins d’un bouleversement produit par ces forces contradictoires que sont la banque dominante et l’usine aléatoire, la conciliation des deux par un PS rallié au libéralisme absolu semble avoir fait long feu. Le temps n’est plus lointain où ce socialisme là devra faire un choix.
Les grandes innovations du numérique sont à leurs débuts. C’est un changement majeur qui améliore les techniques, en diminue les coûts sans créer de croissance, comparée à celle qu’a connue le siècle précédent avec la machine à vapeur, le moteur à explosion et l’invention du téléphone, grands consommateurs de main-d’œuvre.
Les plus pessimistes pensent que nous sommes entrés dans une phase de déflation à durée illimitée. On le constate d’après les taux d’intérêt qui n’ont jamais été aussi bas qui ne permettent pas, malgré cela, à revigorer les entreprises. Mieux, les innovations par le numérique rationalisent les fonctionnements, maîtrisent à moindre coût les rythmes de production, donc font licencier plus qu’embaucher !
La croissance, dite endogène, qui génère le progrès technique, serait possible sans le facteur essentiel de l’économie libérale : le profit. Ce serait même le seul moyen de faire monter en puissance les solutions industrielles aux problèmes écologiques. Mais, il ne faut pas rêver : le riche est puissant, il préférera crever sur son tas d’or, plutôt que le convertir en un travail utile pour la planète et les hommes, il entraînera dans sa perte les partis de pouvoir, ralliés à sa cause. L’utilisation par nos illustres des termes société «postmoderne» ou «postindustrielle» ne prouvent qu’une chose, l’abus des mots pour une situation future dont ils n’ont aucune idée.
Quand on sait les difficultés de l’Europe à s’accorder sur l’asile des réfugiés des pays en guerre, alors qu’elle devrait être sans limite, on se demande comment la reconversion à une société postindustrielle qui doit justement laisser plus de place à l’humain est possible. La conférence de Paris fin d’année sur le climat procède de la même incapacité, redoublée en ce cas parce qu’il ne s’agit plus de l’Europe, mais du monde !
Alors, messieurs de la politique, détenteurs d’un messianique message ou non, un peu de retenue, s’il-vous-plaît. Cessez de prendre vos électeurs pour des imbéciles heureux.