Sale temps pour la gauche.
Pas la gauche des salons, des partis de gouvernement, non, la gauche des syndicats, des petits boulots, du chômage et de la débrouille avec moins de mille euros le mois.
C’est pourtant un gros paquet de citoyens, la moitié du pays…
Cette gauche-là est sans voix depuis que tous les esprits et les regards sont concentrés sur l’islam et ses détraqués de la gâchette.
Faire entendre d’autres plaintes que les râles des victimes innocentes est indécent. La question ne se pose pas pour la droite qui ne se plaint pas elle de bien vivre, de réaliser des bénéfices et d’encourager les banques à prospérer aux affaires.
Verser une larme sur le malheur des victimes accablées par la bêtise criminelle des religieux de Daech, dans ces conditions, ne coûte rien.
Au contraire, elle peut rapporter gros en équipements de sécurité, en nominations « spéciales » dont on sait les partis friands, bref en calculs stratégiques électoraux et en bonnes affaires.
Charles Michel l’a bien compris qui en rajoute à chaque fois une couche sur la sécurité. Même si c’est tout à fait légitime de rester sur ses gardes, on ne peut pas empêcher l’observateur de constater l’échec d’une économie, le mauvais vouloir du gouvernement à considérer le dénuement des plus pauvres et la jubilation des autorités à renfermer dans les placards tous les problèmes sociaux.
Dans le concret, Charles Michel a jeté un voile sur l’affaire Jacqueline Galant, avec l’accord de l’opposition. On est au niveau 4, vous pensez ! Ce n’est plus le moment. L’intéressée a dû fêter ça au champagne, car il y avait bel et bien une « affaire Galant ».
Les patrons ont dit, d’accord pour le niveau 4 le week-end, mais lundi, faudra pas faire les zouaves, tout le monde au boulot avec métro, train tram, bus et pas un qui manque !
Devant la conjoncture, le peuple est devenu irascible et en veut terriblement au laxisme des partis œcuméniques, à ces mandataires à la double nationalité qui poursuivent leur travail de sape à la culture et aux transformations de cette société devenue composite, comme dirait un minéralogiste désignant un agglomérat. C’est encore tout bénéfice pour la droite qui joue sur le racisme des gens pour augmenter son audience.
La grande question de savoir si l’économie mondialisée est bonne pour ceux qui la vivent est remise aux calendes. La seule qui compte et qu’on n’ose développer en public, c’est la question religieuse, étant bien entendu que tout le monde voit que la religion musulmane est fortement impliquée dans la situation dégradée actuelle. Les partis d’opposition et ceux qui sont aux affaires se gardent bien d’aborder frontalement la question religieuse, de par l’énorme population nouvelle d’immigrés musulmans dont on craint les réactions.
Ainsi, on ne va pas au fond de l’égout pour le curer, comme on ne va pas sur le terrain qui produit la pestilence, on se contente de l’arroser de bombes. Qu’importe, la fascination pour la sécurité intérieure est suffisante pour que le public délaisse le reste.
La grande absente dans le battage médiatique est donc bien la gauche, celle des combats sociaux pour la justice et une vraie démocratie.
Madame Ska et Marc Goblet l’ont bien senti. Ils ont jeté l’éponge et carrément fait l’impasse sur les mesures actuelles destinées à faire payer la crise aux plus pauvres.
Dorénavant les syndicats abandonnent tout ce qui avait été fait jusqu’à présent en matière de protestation. Qui ne dit mot consent, dit le proverbe, toute critique est devenue impossible.
Tous ceux qui se sont dépensés sans compter depuis les mouvements de grève du début de l’année jusqu’au vendredi noir, les malheureux qui sont déférés au Parquet pour avoir bloqué l’autoroute, tous les piquets tapant du pied dès l’aube dans les froidures, en butte à la haine des nantis et des imbéciles heureux qui n’ont rien compris au combat, doivent avoir une belle amertume sur le cœur !
Échaudés, reviendront-ils à la pointe du combat populaire pour une meilleure vie, demain ? Rien n’est moins sûr. Et cela, ce sont les dégâts collatéraux imputables à la droite libéralo-flamingante de ce gouvernement.
La gauche de la gauche, quelle gauche ? Di Rupo ne s’attendait pas à s’en débarrasser aussi vite, ni aussi facilement ! Reste à savoir comment Charles Michel va se débarrasser de Di Rupo ? Un emploi de ministre peut-être pour une mobilisation de toutes les "forces vives" ?