Désendetter le citoyen !
La contestation des politiques d’austérité budgétaire ne faiblit pas en Europe. En Belgique, c’est moins visible, puisque les partis gouvernementaux et d’opposition sont à peu près sur la même ligne libérale. Mais nous y assistons à un décalage entre la parole officielle et celle des citoyens.
La dette publique est-elle vraiment le mobile des politiques d’austérité ?
Le Pacte budgétaire européen agit comme un croquemitaine dont on craint les sanctions.
Et si tout cela n’était qu’un décor destiné à nous culpabiliser, alors que les éléments déclencheurs de la dette sont à chercher dans les politiques désastreuses des années 60-70 ?
Les journaux évitent de revenir sur les origines de l’effondrement des finances publiques et « oublient » de mentionner dans l’actualité la campagne qui se développe en faveur d’une approche radicale de non-remboursement ou d’effacement d’une partie des dettes.
Des expériences d’audit citoyen ou de restructurations unilatérales de dettes ont eu lieu dans des pays d’Amérique latine, par exemple en Équateur.
Pourquoi ne pas transposer de manière généralisée ces expériences dans les pays européens ? Une récente étude estime que la moitié de la dette belge serait illégitime. Elle proviendrait de cadeaux fiscaux et de taux d’intérêts jugés excessifs aux ménages fortunés et aux entreprises. (Ex. récent la tax shift).
Les citoyens sont victimes d’un transfert de ressources à rebours en faveur des créanciers et des ménages les plus aisés.
En Belgique, en se basant sur l’évolution et le niveau des taux d’intérêts réels sur la dette publique depuis les années 70, la dette publique se serait trouvée en l’an 2000 à un niveau inférieur de moins de 50% de PIB de l’époque.
Si l’État emprunte aujourd’hui à presque 0 % d’intérêt, il rembourse toujours des prêts supérieurs à 6 %. Le tournant néo-libéral des années 80 a bétonné ces remboursements, alors qu’ils auraient dû être renégociés.
Comment annuler des dettes publiques « excessives » émises il y a plus de vingt ans ? C’est délicat, puisqu’elles ont depuis changé de mains (de créanciers) parfois plusieurs fois. Quand bien même on identifierait les détenteurs actuels de la dette existante, départager créances légitimes et illégitimes, héritées d’un passé d’au moins 15 ans, soulève des difficultés inextricables.
Ne vaudrait-il pas mieux supprimer l’ensemble des dettes souveraines antérieures à 2000 ?
N’ont-elles pas été payées dix fois ? Les intérêts ont été réinvestis de façon spéculative et parfois sans discernement. Ils sont, en partie, responsables des bulles spéculatives qui ont produit la crise 2008/09.
Le débat sur l’austérité est-il correctement posé ? La dette publique est-elle le problème central à l’origine de l’austérité budgétaire ?
Ne sommes-nous pas victimes d’une façon de banaliser une ponction publique anti-redistributive ? La dette publique est au cœur de la crise et responsable des politiques d’austérité. L’annulation suffirait à inverser le cours des choses et notamment du chômage.
Les politiques d’austérité se sont soldées par la poursuite de l’explosion des taux d’endettement public (et du chômage) suite à l’effondrement économique et social et à l’enlisement dans le chômage de masse consécutifs à la crise financière.
On assiste à un déclin structurel marqué des revenus financiers privés perçus sous forme de rentes, au profit d’une montée des revenus financiers actionnariaux perçus sous forme de dividendes et autres profits distribués par les entreprises, et ce en contrepartie de la baisse tendancielle persistante de la part salariale. Une annulation des dettes anciennes ne ruineraient pas le petit rentier ou le travailleur pensionné qui s’est constitué un bas de laine sur les emprunts souverains. Elle toucherait les gros revenus et les banques et serait le juste retour d’une contribution des fortunes au redressement financier d’un pays dont leurs détenteurs ont voulu que la dette soit la rente éternelle de la sphère dirigeante néolibérale.