Un faux mou, un vrai dur !
Les faits sont têtus. Ils contredisent l’engouement des partisans d’Erdogan qui ont proprement aidé le nouveau sultan à se débarrasser d’un putsch militaire.
Depuis des mois on lit sur les gazettes qu’Erdogan entend faire la pluie et le beau temps partout en Turquie. Le nouvel Kemal Atatürk, c’est lui, mais pas pour de nouvelles libertés, pour raboter celles qui le gênent. Il chasse des journalistes de leur rédaction, voire, il les emprisonne. Il met au pas de la Mecque toute la population et prône le retour à un islam rigoureux. Il déchire un pacte de non-agression avec la minorité kurde et entend changer les lois de protection de leurs parlementaires. Il joue un double jeu avec Daech. Enfin, il rameute ses propres partisans disséminés sur le sol européen par des meetings de propagande sous l’œil bienveillant des États de l’Union. Il accuse un de ses opposants réfugié aux Etats-Unis et le réclame avec force auprès des autorités américaines. Il abat un avion russe à la limite de son territoire et refuse de présenter des excuses.
La liste pourrait s’allonger. L’opinion occidentale est convaincue. Erdogan n’est pas un démocrate, mais un de ces nouveaux pachas dont le Moyen-Orient est le principal fournisseur.
Et voilà qu’un putsch sérieux engageant des milliers d’hommes s’organise pour abattre le tyran, et le peuple le protège et finit par triompher des factieux !
C’est clair. La rue, c’est-à-dire le peuple, instrumentalisé certainement, mais résolu quand même, défend « démocratiquement » un « antidémocrate » !
On ne peut comprendre la chose qu’en revenant à 1933 en Allemagne, quand Hitler, suite à des élections démocratiques, prit le pouvoir jusqu’en 1945, sans plus jamais procéder à des élections, mais avec l’adhésion de près de 80 millions d’Allemands, tout au moins jusqu’à la défaite de Stalingrad.
Ainsi, la démocratie peut facilement dérailler avec l’assentiment du peuple. Un dictateur sans scrupule et sachant façonner l’opinion, se hisse à sa tête et y demeure, parfois longtemps, en usant de son bon plaisir et en transformant petit à petit la démocratie en dictature, le tout sous les vivats de la foule !
Décidément, l’année 2016 et qui n’est pas encore finie, nous a fait tomber de haut. Le peuple souverain peut souverainement se tromper. Les élites grassement payées pour défendre la démocratie ne sont là que pour elles-mêmes et sont susceptibles de marcher derrière un dictateur après avoir trompé le peuple. La morale au niveau politique est une chimère qui devient dangereuse dès qu’elle est menacée par la morale tout court.
Et maintenant que fait-on en Europe de ce voisin gênant ?
Erdogan veut rétablir la peine de mort, il a hâte d’officialiser les crimes obscurs de sa police au fond des geôles de l’Etat. Il transforme la justice en licenciant les magistrats qui ne sont pas à sa botte, il démet des généraux et place ses créatures, etc.
Allons nous poursuivre, comme si de rien était, les discussions pour l’entrée de cette Turquie là, dans l’UE ? Quelle est la nature de l’accord sur les émigrés retenus en Turquie par les autorités de ce pays ?
Avec sur le dos une forte population maghrébine en instance d’être naturalisée européenne, loin d’être en accord avec nos modes de vie, allons-nous avoir maille à partir avec les millions de Turcs résidants (surtout en Allemagne) puisqu’il est avéré que la presque totalité d’entre eux sont de chauds partisans d’Erdogan ?
Rappelons-nous Chamberlain et Daladier venus à Berlin en 1938 signer des accords de paix avec Adolphe Hitler et revenant sous les ovations en Angleterre et en France !
Allons-nous récidiver cette lâcheté ?
De part les leçons de l’Histoire, des accords de paix n’ont jamais ralenti les processus de guerre quand ils sont signés par des gens de mauvaise foi.
Empêtrés dans nos faiblesses, obnubilés par le commerce et la croissance, trompés par les engouements pacificateurs de partis politiques qui croient de leur intérêt d’accueillir tout le monde pour gonfler le nombre de leurs électeurs, hachés menus par des illuminés d’une religion dont les plus fervents se moquent de la laïcité à l’intérieur même de l’Europe, quand allons-nous nous réveiller ?
Sinon, allons applaudir nos ministres des affaires étrangères revenus enchantés de Turquie après les accords de paix renouvelés par Erdogan et résignons-nous à une fin de siècle obscurantiste. Apprenons le coran pour avoir une chance d’intégrer nos enfants dans un futur des mille et une nuits de la connerie humaine. Et dès à présent, fermons nos gueules et attachons-nous au business que nos « élites » aiment tant, puisque nous ne savons faire que cela !