« La Flamanditude anti-taupes ! | Accueil | Des nouvelles de l’Hôtel Mondo. »

Sganarelle - « Mes gages ! ».

La création dans le mode littéraire est un échec. Dans le mode théâtral, c’est une tragédie sans cesse répétée et jamais jouée.
Dans ces domaines, la création quoique intéressant un grand nombre d’actifs reste velléitaire dans la mesure où l’on a autre chose à faire pour gagner sa vie.
La voilà bien cette foule anonyme de créateurs dans l’incapacité d’être des montreurs. Ils habitent des petites villes comme Liège à prétentions artistiques, mais qui n’ont pas assez de public pour remplir deux salles en même temps.
L’échevin de la culture règne en satrape au milieu des desservants de l’Art subventionné. Il joue le rôle de Puntilla expliquant à son valet Matti l’étendue de ses propriétés, dans l’optimisme du propriétaire qui distribue des bourses forcément dans l’intérêt de sa gloire, mais aussi selon sa formation et ses connaissances souvent réduites aux chicanes politiques.
À moins d’une fortune personnelle, il faut tout plaquer pour savoir ce que l’on vaut à courir l’aventure d’une grande ville comme Paris, Lille ou Bordeaux, avec son petit bagage serré dans une serviette de fonctionnaire et un paquet de cartes de visite qui sont autant de reproches aux promesses non tenues de ceux que l’on a approché.
Courir les éditeurs ou les directeurs de théâtre c’est une gageure qui tente tout le monde mais vite abandonnée. Reste alors les fausses maisons d’édition où l’impétrant doit être davantage représentant de commerce qu’écrivain et les théâtres de seconde zone où les subsides de la ville font que l’on retombe vite dans l’émirat d’un pacha politique local. C’est-à-dire que l’on a devant soi un directeur de théâtre qui n’a pas son mot à dire dans les créations, qui n’en convient pas pour ne pas perdre la face, mais qui mène tous les auteurs inconnus en bateau.
La vérité de l’exploitation de la créativité est l’aliénation des auteurs s’ils s’y croient victimes de discrimination. Puisqu’ils le sont tous, à l’exception d’une infime minorité, ce n’est pas d’une aliénation qu’il s’agit, mais d’une incompatibilité de notre époque avec la création artistique.
Et ce n’est pas les quelques têtes d’affiche au service de pièces sublimes dans le bruissement des générales ou les dédicaces en librairie du dernier prix de la critique qui feront croire que la crème est devant nous et que les refus sont mérités.
Je parie même le contraire. Cette époque excelle dans le gâchis, qu’il soit industriel ou intellectuel.

3rostt.jpg

Les trésors les plus sublimes resteront à jamais anonymes et les grands talents ignorés pour toujours. Ce n’est pas pour me rendre agréable auprès des déçus et des refusés, mais pour simplement m’aligner sur la statistique et l’étouffement dans le nombre d’un « renouveau de l’art contemporain » qu’on ne pourra pas connaître, comme si à des époques antérieures Van Gogh n’avait pas eu un frère et Casanova le comte de Waldstein.
Qu’ainsi faute de choix, le public cultivé puise dans ce qu’on lui présente comme le meilleur une infime partie des productions de l’art en y éprouvant encore du plaisir, c’est toujours ça de pris sur l’inculture et les bruits furieux qui se préparent, mieux encore, qui sont déjà des best of de librairie ou des éclats divers des théâtres dits expérimentaux.
Le seul regret est qu’il y confond les goûts des maîtres avec le sien propre, depuis qu’on lui a enlevé celui de la critique, dans un univers binaire, comme s’il n’y avait que deux éléments, blanc ou noir, dans l’ignorance des cathédrales enfouies sous ses pieds.
Nous sommes entrés dans la civilisation du simili, de la photocopie, du 3 D.
L’exposition Salvador Dali aux Guillemins était une escroquerie. Il n’y avait là que des reproductions, plus moins bien réussies et bien présentées, certes, mais tout de même, faire payer les gens pour des reproductions !
La dernière étape sera de faire croire que la copie est de meilleure facture, ce qui sera possible avec les avancées de la technique, mais ce sera compter pour rien le travail de l’artiste et son inventivité. L’art poétique, c’est encore plus facile, il suffit de changer quelques mots et dire que c’est une œuvre de jeunesse personnelle, dès lors qu’on aura vieilli le papier et l’encre aux dates que l’on veut.
Tout fout le camp… surtout l’art !...

Poster un commentaire