Fin d’une session d’Assises.
L’épilogue du procès Wesphael condamne implicitement l’appareil flamand de la justice. À cause de sa lourdeur et de l’intime conviction des personnels ostendais, on a jeté l’argent des contribuables wallons par les fenêtres.
La bataille des experts a toujours été quelque chose d’incompréhensible pour moi, qu’ils aient été commissionnés par la partie civile ou par la défense de l’accusé, leurs conclusions sont différentes !
Que l’accusé bénéficie du doute paraît être juste. Il vaut mieux un coupable relaxé qu’un innocent en prison. On peut se demander si Maître Mayence avait été partie civile, qu’elle aurait été la sentence ?
Ce n’est pas tant le talent de Mayence qu’il faut souligner, mais l’absence d’un équivalent pour lui faire face. On voit bien que la partie civile n’avait pas les moyens financiers de Wesphael. Mayence n’a pas plaidé pour rien, je suppose ? Alors, pour quelqu’un qui se dit fauché !
Pour le reste quelle importance, puisqu’aussi bien partie civile et accusé ont fait la démonstration de leur culpabilité morale vis-à-vis de Madame Pirotton. Son addiction à l’alcool, son excessive attachement au sexe quasiment hystérique, sa mélancolie chronique, la sujétion morbide à l’antithèse de ce que doivent être les psychologues en la personne d’un de ses amants, omniprésent, l’odieux Oswald, ses tentatives de suicide à répétition, tout enfin aurait quand même dû alerter ceux qui l’aimaient. N’oublions pas les médecins spécialisés dans le bourrage des anxiolytiques, du baclofène (un antispasmonique atropinique), etc dont ces messieurs de la faculté pour en être débarrassés, parce qu’elle devait être envahissante quand elle était en manque, la fournissaient abondamment en ordonnances, personne vraiment pour lui venir en aide, mais cette femme aurait dû partir pour un temps indéterminé dans une clinique spécialisée pour se refaire une santé !
N’en avait-elle pas expressément senti le besoin en s’enfuyant seule à Ostende ?
Pour son malheur, il a fallu que la meute, le mari, l’amant, les parents poursuivent une sorte de harcèlement, croyant bien faire pour certains, pour d’autres retirer un plaisir sadique supplémentaire de sa souffrance.
Cet exemple (la raison pour laquelle je profite de ce procès assez particulier) est la démonstration d’une société qui paraît secourable, équilibrée et prévoyante ! En réalité, elle n’est rien d’autre que ce que les parents et amis en font vis-à-vis des mal portants, des laissés pour compte, des vieux, des handicapés, etc.
L’hôpital, l’hospice, les abris sécurisés sont les cache-misères d’un monde devenu profondément égoïste, obnubilé par l’égo et l’individualisme forcené. Madame Pirotton en était un produit extrême probablement tout autant égoïste que les autres, se débattant dans un cloisonnement invisible dressé par des individus faussement intéressés, eux-mêmes initialement programmés pour que chacun puisse « crever » à sa petite place, sans pour autant perturber leurs menus plaisirs.
Cette société à la dérive n’a jamais autant réclamé la paix dans le monde, l’amour du prochain, l’accueil des victimes, l’affection aux vieux parents, le dévouement aux handicapés, alors qu’elle s’en fout, qu’elle laisse le soin à quelques mabouls de secourir les faibles, de protéger jusqu’aux animaux qui témoignent comme nous du vivant et que notre besoin de place élimine partout.
À ces doux rêveurs, tant qu’ils veulent, on veut même bien y aller de sa petite larme à la télé sur la souffrance des enfants d’Alep, au massacre des gorilles dans des amalgames télévisuels, l’empathie pour madame Kim Kardashian voisinant avec la lutte des bénévoles d’OXFAM . Mais ne leur demandez pas de bouger le cul des fauteuils, de sacrifier le prix d’un paquet de chips pour une bonne cause, d’aider la vieille du troisième étage à monter ses pommes de terre ou considérer Madame Pirotton en danger de mort de part ses addictions, ses souffrances et son entourage mortifère.
La fin d’un procès. Le nôtre continue.