Travailler moins sauve des vies.
Les peuples sont facilement et donc dangereusement vite influençables. Dans l’histoire sociale récente, cette influence leur avait assez bien réussi. C’était une période heureuse où la nature humaine primitivement dolente était en symbiose avec les conquêtes ouvrières de Léon Blum à nos jours… enfin presque, depuis, cette société tend à disparaître pour son contraire : une société qui fait travailler davantage les peuples pour de moins en moins de reconnaissance et d’intérêt.
Voilà plus d’un quart de siècle que pour cela on tend à donner au travail une valeur qu’il n’a pas et une déconsidération sociale au temps de repos.
La réduction du temps de travail à 35 heures en France aura été le chant du cygne pour tous ceux qui voulaient convertir une partie des prestations de travail en des loisirs culturels et l’obligation de travailler pour vivre, en une sorte de pis-aller que les progrès s’ingénieraient à réduire encore. Pour beaucoup, le travail représente toujours une aliénation grave et un empêchement à se réaliser complètement, par exemple les artistes, les créateurs et les inventifs en général.
En 2016 (en 2017 ce sera pire), sous prétexte de faillite collective, les responsables enjoignent à travailler plus et à repousser l’âge de la retraite.
Tous incriminent les prestations sociales, les pensions, les indemnités de maladie comme des fléaux gonflant la dette, alors qu’il est très peu question des sommes dépensées de prestige de l’État et d’entretien du personnel politique, considéré en surnombre et surpayé, tenant pour rien la productivité inouïe sans intervention humaine des machines, etc.
Les pouvoirs se défaussent sur les administrés et ça marche !
Il n’y a plus que les philosophes et l’extrême gauche pour lutter contre ce nouveau courant qui tend à se généraliser, en passant sous silence les profits monstrueux de certains par rapport à la misère des autres.
Nos enfants emportés par ce courant ne connaîtront pas l’équilibre de leurs parents selon lequel ils vivaient un temps pour eux, sans la contrainte de la subordination à un maître qui décide des gestes et des pensées.
Aujourd’hui le philosophe Lafargue est pris pour un dangereux anarchiste, au mieux pour un farceur. Le droit à la paresse qu’il justifiait physiologiquement et physiquement comme un état naturel est en train de sombrer, détruit par des discours behavioristes des théoriciens mondialistes, au nom d’une compétition fabriquée de toutes pièces par des irresponsables.
C’est le discours libéral, tant apprécié par ceux qui au départ faisaient travailler les autres pour leur seul bénéfice et dont les rejetons dépravés font de ce gouvernement une responsabilité collective, vulgate pour tous.
Qui n’a pas d’emploi est suspecté de ne pas en faire assez pour en trouver par les autorités compétentes et par celui qui en a un et à qui on fait croire que le premier vit à ses crochets. On oublie, évidemment de situer l’oisif aisé, l’actionnaire, le personnel élu et le patron qui tous sont censés travailler, sinon nous font croire qu’ils ne dépendent pas de la collectivité.
Dans certaines remises « en forme » pour ce qui est devenu l’essentiel de la vie moderne, des professions sont accusées de manquer d’efficacité. On y trouve les enseignants, les employés des postes et des chemins de fer, tout qui est accusé de manquer d’efficacité par comparaison à des normes et à d’autres performances. Avançant d’un cran l’ardillon de la ceinture, presque tous les salariés sont suspectés de ne pas en faire assez et doivent donc travailler davantage. D’où la volonté des tenants de l’économie libérale d’allonger l’âge du départ à la retraite et de faire pression dans le courant des carrières sur les travailleurs en facilitant les licenciements par la réduction des protections sociales.
Ceux qui usent de cette politique, comme le gouvernement Michel, appellent ce tour de vis une mise en condition indispensable des entreprises, pour la confrontation avec des nations émergentes.
Pour rappel, le Droit à la paresse de Lafargue était un pamphlet contre les pratiques patronales des années 1880.
Réduire la place du travail dans la vie au XIXme siècle était primordial. L’espérance de vie d’un ouvrier par rapport à son employeur était inférieure de plus vingt ans. C’est toujours une priorité aujourd’hui en vertu des mêmes principes qu’hier, le stress ayant remplacé la fatigue et la lassitude pour certains et pour d’autres, le stress venant en sus de la fatigue et de la lassitude.
Veut-on revenir à ces temps épouvantables ?
Sait-on qu’une autre organisation de l’emploi, idéale il est vrai, pourrait sans diminuer en rien les biens produits, n’être que de trois ou quatre heures par jour, soit vint heures semaine ?