Entre faits et déclarations.
On peut se demander à quoi sert d’accuser les importants, trop prompts à saisir toute occasion de rémunération ?
Ils ne sont jamais punis avec toute la rigueur de la loi. Aucun parlementaire ou ministre, n’a fait de la tôle. Claude Guéant, condamné à deux ans de prison, dont un « ferme » pour abus de biens sociaux, ne fera pas un jour de ballon (1).
Ce n’est pas faute de gros titres « Les administrateurs fantômes de Publifin sur la sellette. » ou « Fillon encourt dix ans de prison et 100.000 € d’amende ! ».
L’élite, en délicatesse avec la loi, se fait oublier dans sa résidence secondaire. Le temps est un merveilleux apotropée, un excellent produit de nettoyage.
Certains se retirent en étant payé par leur administration. Armand De Decker, bourgmestre d’Uccle et avocat, s’est fait porter pâle, un certificat médical à la clé. Il reçoit son enveloppe de bourgmestre les fins de mois comme s’il était là ! Pas belle la vie ?
François Fillon ne finira pas triquard. Il ne fera pas un jour de prison et ne paiera pas un sou d’amende. Mieux, s’il se la joue finement, il se pourrait même que les Français le placent à la tête de la République. Pénélope sauvée de la honte, François renouvellerait sa garde-robe de première dame, bien catho et franchouillarde.
Son affaire qui inclut son épouse dans une combine d’emploi fictif est vieille de huit ans. La prescription est de 3 ans pour ce genre de délit. On fait du cinéma pour rien, juste pour le plaisir d’une boule puante.
Sauf que l’opinion n’aime pas ce genre d’embrouille pour un élu à prétention présidentielle. Perdre l’élection, c’est la seule sanction possible ! La combine de ce sycophante tardivement dénoncée n’a pas besoin de boule puante pour sentir mauvais.
Dans un autre registre, Polanski, le génial metteur en scène, ne sera jamais quitte avec l’opinion qui lui reproche d’avoir « violé » une gamine de 13 ans il y aura bientôt 50 ans. La dame, aujourd’hui d’un âge respectable, a beau réexpliquer qu’elle était consentante et qu’au moment de l’extase, elle paraissait 18 ans, rien n’y fait. Roman Polanski est classé définitivement dans les salauds complets.
Il y a une énorme différence entre salauds.
Les mœurs dissolues ou simplement libertines dépassent en horreur les crimes pour le fric.
Les délits d’argent touchent le subconscient de tout le monde. Des indulgents se demandent ce qu’ils auraient fait à la place de Fillon, Sarko, Kubla, De Decker, les Publifin ?
Le crime sexuel, c’est différent. Même si certains passent l’éponge sur le passé de Polanski, le sexe reste tabou dans les mémoires. Quand un soir d’ivresse, on drague plus qu’on aurait dû, on n’est pas fier. La libido c’est du privé, on passe sous silence ses petits péchés, martinet, costume de Mickey, latex, gode et livres pornographiques.
Les salauds sexuels, sans le moins du monde excuser leurs crimes, paient cash la main dans un slip non consentant, en préventive tout de suite.
Les lourds dossiers du genre ne passent pas le double filtre, celui de la justice et de l’opinion.
Vous verrez Fillon s’en sortir. Kubla fatigué de ses rhizomes souterrains, attend l’éclaircie au printemps prochain. De Decker ne désespère pas de retrouver son sourire légendaire d’honnête homme face à Hakima, sur fond d’images subliminales heureuses. Le ministre Furlan de la Région friponne, se trouvera grandi par sa démission héroïque, comme Madame Delvaux, ex CDH liquidant vite fait sa part honteuse de jetons de présence de chez NETHYS ex Publifin, l’a été dès les premiers jours de « l’horrible scandale ».
DSK, Polanski ou l’autre branque en touche-pipi à la piscine d’Herstal, jamais !
On applique le Code partout dans sa sévérité ou on ne l’applique nulle part dans sa sagesse. Tant que la justice ne servira qu’à garder les gens sur les trottoirs, pour les salauds qui roulent dans les grosses bagnoles, l’opinion publique suppléera à la carence, avec des dossiers incomplets et des relations mensongères de bouts d’actualités.
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1. Claude Guéant n’ira pas en prison, bien qu’ayant été condamné à deux ans, dont un an ferme. Selon la jurisprudence française, «les aménagements de peines courtes peuvent s’effectuer ab initio, c’est-à-dire avant leur mise en exécution». La loi Perben de 2004 le dit, la loi Taubira de 2014 l’a complété: l’article 723-15 du code de procédure pénal permet de dispenser de prison effective toute personne condamnée à une peine inférieure ou égale à deux ans. Effet quasi automatique s’agissant de Guéant, il ne moisira pas au ballon.