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Adam Smith.

Le caractère irrationnel du libéralisme moderne est aux sources mêmes des origines illustrées par Adam Smith et Alexis de Tocqueville.
Alexis était ce voyageur en Amérique, primesautier et fantasque. Laissons le voir dans ce ramassis d’aventuriers avides d’or et massacrant les Indiens, les ferments d’un dynamisme propice à une civilisation naissante. Je l’abandonne à la dévotion de Monsieur Reynders, avocat et confrère.
Reste Adam Smith l’idole de la rente et du mérite.
La plupart des économistes ne raisonnent pas dès qu’on parle d’économie libérale. Ces messieurs disent qu’elle est irremplaçable, alors qu’ils n’en savent rien. Elle est au-dessus de l’intelligence humaine, il est inutile d’en appeler à la raison. Ils ont la foi.
Dès qu’on s’interroge sur les perspectives d’avenir du système, des fougueux défenseurs voient rouge. C’est le cas de Benoît Lutgen, déclarant avant-hier que le PS dérive vers le communisme, pour deux ou trois propositions de Di Rupo s’efforçant de rattraper la fâcheuse impression que donne son parti depuis l’affaire Yvan Mayeur.
Un raisonnement dérangeant ne passe pas dans la presse. Nous sommes à l’époque black and white, de l’affirmation incontrôlable et de l’effet produit d’une posture. Les arguments contradictoires, sur l’économie libérale dans un climat morose, sont trop explosifs pour être exploités.
Parlons donc d’Adam Smith. Il passe pour être le père fondateur du libéralisme. "Théorie des sentiments moraux" est un ouvrage peu connu. Sa théorie sur "la richesse des nations" a eu un impact considérable sur l’économie. Plus de 250 ans après sa publication, c’est encore un ouvrage de référence pour les économistes de ces messieurs de la Région et du Fédéral.
Malheureusement on ne trouvera jamais la réfutation ou l’exégèse des théories d’Adam Smith, ailleurs que dans des brochures très spécialisées. Par contre, une apologie de l’économie libérale coulera de source. Citer Adam Smith, fait chic.
Adam Smith a oublié de ripper (1) sur le transfert des données entre l’utile et l’inutile, dans son économie modèle. Cela implique l’absence de jugement qualitatif entre les désirs du consommateur. Ils doivent être spontanément convenables, écrit-il. Comme si le consommateur faisait automatiquement une sélection morale dans sa consommation.
Qu’est-ce qui est légitime et qu’est-ce qui ne l’est pas ?
Et c’est justement parce qu’Adam Smith n’a pas su répondre à cette question et les successeurs non plus, que la notion d’utilité en économie libérale est si différente de celle de la vie sociale.
Pour le monde du commerce, l’utile c’est ce qui est capable de satisfaire un désir, quel qu’il soit.
Un superflu qui est utile pour l’économie, mais inutile dans la vie sociale, reste utile du point de vue libéral. Même le nuisible, comme la fabrication et la vente d’armes, la production de drogue, d’alcool, etc. sont utiles pour l’économie libérale. Quand il y a preneur, il y a un marché. Le sens des affaires, c’est d’en créer un, s’il n’existe pas. Créer des désirs est un métier.
Les manuels expliquent ce qu’est la souveraineté du consommateur. C’est la satisfaction de tout désir, là où il y a un deal entre fabricant et consommateur, l’intermédiaire étant le négociant.
Adam Smith avait oublié l’utilité des œuvres d’art et les spéculations en vendant des tableaux achetés pour quelques écus.
C’est Jean-Baptiste Say, l’inventeur de la loi des débouchés, qui va aller dans le sens de Smith sur l’utilité, quand il envisage que de l’inutile à l’utile, c’est encore l’inutile qui a les plus grandes chances d’établir des réseaux de commerce et d’exploitation.
Il suffit de donner de l’utilité à n’importe quoi d’inutile, pour qu’il ait de la valeur.
Le capitalisme pourra dès lors prospérer sur tout, puisqu’il dissocie l’utilité de toute définition naturelle des besoins, hors de toute rationalité.
Ainsi la souveraineté du consommateur devient la primauté du désir.
L’économie est amorale !

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Par cette définition, que ce soit Condillac, Say ou Walras, tous jusqu’en ce milieu charnière du XIXme siècle, ont confirmé « le malsain » de l’économie libérale énoncée en théorie par Adam Smith.
Dans les traités modernes d’économie, le business est, en principe, « contrôlé » par un contre-pouvoir politique. La réalité est bien différente. Le pouvoir politique n’est que ce que le pouvoir économique veut bien qu’il soit. La démocratie est sous tutelle.
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1. Parler de « ripper » pour quelqu’un qui ignorait l’électricité et ses usages, c’est risqué, mais bon…

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