Sport de riches pour pauvres !
Est-ce qu’on peut arrêter quelques secondes de déconner pour réfléchir un peu ?
Voilà des mois qu’on veut construire un stade de foot de prestige pour accueillir quatre ou cinq matches pour l’Euro 2020 à Bruxelles.
On croirait nager dans des rivières tapissées de billets de banque.
Les sommes avancées pour cette nouvelle lubie, réparties sur les habitants de ce pays vivant en-dessous du seuil de pauvreté, suffiraient à faire revenir sur le champ, le chômeur des Caraïbes en Jet privé, rien qu’à la lecture du Daily News de la Barbade, avançant des chiffres à rendre malade le paradis fiscal, où selon La Meuse, nos chômeurs soignent leur dépression nerveuse.
Au lieu d’éviter de péter plus haut que son cul et de rafistoler le vieux Stade roi Baudouin, nos hardis entrepreneurs ont sorti un de ces plans, qu’à côté la nouvelle gare des Guillemins de Calatrava à l’air d’une baraque à frites.
On combinait déjà des formules pour remplir des valises de fric de l’URBSFA, de l’UEFA, du privé de la Région et de quelques sponsors, qu’on trouve facilement sur les carnets d’adresse des cadors du MR, des bruits couraient sur les enveloppes de commissions à épater Alain Mathot !
Un chaud parmi les chauds, Didier Reynders était prêt au sacrifice un week-end sur deux pour tenir la buvette, afin qu’on appelle la chose « Grand stade Reynders ».
Le sort du stade Baudouin était fixé : on avait trouvé le ferrailleur pour dégager la place et faire des barres d’apparts vendues sur plan qui s’enlevaient déjà comme des petits pains.
Sauf… sauf… que le seul endroit encore disponible pour cette apothéose grandiose footballistique, se trouve à Grimbergen. C’est-à-dire en Flandre. Il y eut comme un coup de froid au comité organisateur, quand on apprit que les Flamands étaient réticents.
Vous pensez, une partie du sol sacré de la Flandre vendue à des bruxellois majoritairement francophones, un raz de marée fransquillon était possible.
Pour doucher les enthousiasmes, la Commune de Grimbergen, avec l’appui de la Région flamande, eut une idée de génie, en découvrant que le parking du Heysel qui allait être sacrifié à la folie bruxelloise, recoupait un chemin communal visible du temps où l’aire bétonnée n’était qu’une prairie à vaches. Soit bien avant l’Expo de 58 ! Les Flamands tinrent six mois là-dessus. Le temps que la polémique s’enfle aussi du côté des promoteurs et des organisations de défense des chemins champêtres.
Si bien qu’on en revint à penser la modernisation du vieux Baudouin.
Trop tard. Il paraît qu’il faut plus de temps pour démolir la chose et la reconstruire en plus hardi, genre arches et parapluie géant, que foncer des pieux et booster tout de suite la production des tribunes, tout ça avant 2020, pour le coup de sifflet de l’arbitre.
C’est alors que mercredi, le jour avant la décision de l’UEFA du foot à Bruxelles, Reynders sentant l’oignon, trente ans de cohabitation avec Louis Michel (maintenant que le vieux à le fils en renfort c’est Clémenceau en 14) s’est mis à râler que le stade était de la foutaise, qu’on n’avait jamais vu une Région construire ses annexes sur le terrain d’une autre (alors que les Flamands ont bien leur parlement à Bruxelles) et de revenir sur le confort du vieux Baudouin, si confortable et économiquement plus acceptable.
À croire qu’il connaissait la décision de l'UEFA prise jeudi après-midi lors de la réunion du comité exécutif de l'instance européenne à Nyon, en Suisse.
Notez qu’elle était prévisible.
Le couperet est tombé, les instances européennes du football ont décidé de porter leur choix sur des solutions existantes, à savoir le stade londondien de Wembley. Tout cela assez logique, puisqu’il n’y a de stade que sur plan et que le Baudouin, même avec ses sublimes ferrailles, n’est pas aux normes, ni à vocation mondiale !
Le match d'ouverture se déroulera à Rome. Le stade londonien de Wembley a récupéré les quatre rencontres prévues à Bruxelles.
Voilà les promoteurs et les bailleurs de fonds emmerdés. Les promesses faites à la société de travaux publics dont personne ne sait la teneur, l’ URBSFA avec ses valises de billets de banque sur les bras, Didier Reynders en pleine palinodie, le beau monde a laissé le dernier mot au groupe de construction Ghelamco. Celui-ci a réaffirmé, jeudi, que le stade national verra le jour. Le promoteur ne souhaite pas que le dossier du stade atterrisse à la poubelle.
Comme on le comprend. Surtout s’il a déjà posté les enveloppes.