Jean-Baptiste Say son Charles !
Si les gens s’intéressaient à l’économie, les plus avertis s’effraieraient de l’Europe dans laquelle Charles Michel nous embarque. Les libéraux à vue courte se battent plus avec des slogans que sur des faits. Ils se font les champions d’une cause entendue.
Je ne dénigre pas un système, pour en vanter un autre. La persévérance des libéraux à nous vendre le fourre-tout mondialisé de l’économie a quelque chose de profondément malhonnête.
Après le farceur d’Adam Smith, j’épingle Jean-Baptiste Say, économiste et entrepreneur français, que les croyants du MR fleurissent tous les jours. « La loi des débouchés ou loi de Say », bible de Michel et Reynders, ne tient plus la route depuis longtemps.
En quelques mots : les produits s’échangent contre des produits. La monnaie, le “numéraire”, n’est qu’un intermédiaire entre les échanges. La théorie de Say est simple, pour assurer notre existence, nous devons en échange du numéraire, vendre des produits ou notre travail.
Selon lui, tout produit supplémentaire créé ouvre un débouché à d’autres produits, à condition qu’il ait une utilité recherchée par les consommateurs. Ceci étant, une crise de surproduction ne peut se produire du fait des nouveaux débouchés.
Say admet qu’il peut exister des surproductions partielles. Exemple, on produit tout à coup trop de voitures, cela signifie pour Say qu’il existe un autre secteur où il y a sous-production : on aura par exemple pas assez produit de vélos. Say admet donc qu'on ait employé trop de ressources ici, pas assez là. En raison d'une mauvaise répartition des efforts de production, c'est-à-dire d'une mauvaise distribution du capital. Il rejette comme absurde, l'idée qu'on puisse trop produire dans tous les secteurs à la fois (on ne parle ici que de la capacité d'absorption du marché, et non des besoins de la population : en économie libérale, un besoin qui ne peut pas payer n'existe pas).
Say en vient à l’équilibre idéal entre production et capital résultant du produit. Si l'ensemble des marchandises s'écoule pour 100 millions d'euros, cela signifie que la vente de ces marchandises va générer 100 millions d'euros de rentrées monétaires (quelle que soit la manière dont ces rentrées se répartissent ensuite entre les différentes catégories sociales). Ces 100 millions sont par définition ce qu'il faut pour acheter les 100 millions de marchandises.
L'impossibilité de la surproduction générale saute aux yeux, puisqu'à tout moment, la somme d'argent détenue par les consommateurs est strictement égale à la valeur des marchandises qui sont sur le marché. Tout au plus peut-on envisager que les goûts de consommateurs ne coïncident pas avec les différentes quantités produites, ce qui créera des déséquilibres sectoriels. Mais, il est impossible que toutes les marchandises soient invendables à la fois.
L'argumentation de Say est presque une tautologie : les achats équilibrent les ventes... parce que les ventes équilibrent les achats. En réalité, elle repose sur une hypothèse centrale : celle que la monnaie ne sera jamais détenue pour elle-même, mais uniquement pour acquérir des biens. La conception de Say repose donc sur la conviction que la monnaie est neutre : simple intermédiaire des échanges, elle ne peut jouer un rôle actif (et donc, perturbateur) sur l'économie réelle. Elle ne peut pas être mise (provisoirement) de côté, c'est-à-dire thésaurisée. Selon les propres formules de Say, « la monnaie n'est qu'un voile » ; « les produits s'échangent contre des produits ».
La Loi des débouchés revient à affirmer que l'épargne est égale à l'investissement. Les produits fabriqués se répartissent en deux catégories : les biens de consommations, destinés à être acquis pour un usage direct, et les biens de production d’investissement.
MM Michel, Borsus et consort voient le monde libéral définit parfaitement. Et c’est bien leur grand tort. À cause d’eux, nous sommes les victimes d’une supercherie libérale.
L’expansion de la population – la démographie - met hors compétition un certain nombre de personnes en surnombre dans le processus du renouvellement par tranche d’âge.
Dans sa Lettre à Malthus, Say le critique en expliquant que la loi des débouchés approvisionne mieux la population. La liberté de produire permet de résoudre le problème soulevé par Malthus. On voit le résultat. Les pays industrialisés produisent avec 20 à 30 % de main-d’œuvre en moins, une production supérieure à ce qu’elle était en 1950 !
Nos politiciens vivent dans une démocratie de 2018, avec des arguments du XIXme siècle et ce sont eux qui se moquent des « utopistes gauchistes » !
Depuis la fin des accords de Bretton Woods, le 15 août 1971 par Nixon, organisant le système monétaire mondial autour du dollar américain, mais avec un rattachement nominal à l'or, tous les libéraux du MR au PS libéral poursuivent, comme dans la plupart des démocraties une politique du « cadavre exquis ». Ils habillent par jeu de mots et règles, une absolue aberration qui ne peut conduire qu’à la catastrophe. Le papier monnaie ne correspond plus à la valeur produite, autrement dit le système survit en fantôme, celui des échanges par le truchement du numéraire qui devrait correspondre à la valeur produite.
Déjà bien avant Nixon, Keynes contredisait la loi de Say, pour lui l’offre ne crée pas la demande. La crise de 1929 avait déjà secoué Say et montré les limites des thèses classiques et néoclassiques. On avait oublié l’épargne thésaurisée.
Les compères du MR au pouvoir en Belgique non seulement nous enfument avec des théories d’un autre âge, mais encore ils oublient les recommandations de Keynes – qui n’est pas soupçonné de communisme – lorsqu’il écrit « la demande joue un rôle primordial dans l’économie d’un pays. Il faut encourager la consommation à travers la mise en place de politiques budgétaires, l’intervention de l’État permet de résorber plus vite les déséquilibre des marchés qu’avec le système néoclassique, laisser les marchés s’autoréguler c’est prendre le risque de voir la population souffrir inutilement. »
Le ministre des finances de Michel pense évidemment le contraire. D’évidence les responsables politiques n’ont pas – c’est souvent le cas – les compétences adaptées à leur mandat. Ils trompent le peuple. Ils sont incompétents !
Si on ouvre « Le Capital » (on n’ose plus dire le nom de l’auteur pour s’épargner les sarcasmes des vaniteux), c’est une autre chanson, mais qui a, tout autant, du sens.
« Le pouvoir d'achat et la consommation créés par la production n’existe pas, car les ouvriers sont payés au minimum vital ; d'où la surproduction et un impérialisme pour écouler ailleurs la marchandise, qui ne peut se vendre. »
Voilà où nous en sommes, en Belgique et ailleurs. Charles Michel et Bart De Wever, associés avec les monétaristes et les nouveaux classiques concluent que tout doit être fait pour libérer l’offre.
C’est une ânerie. Sont-ils malhonnêtes ou imbéciles ? Il n’y a pas d’autre alternative.