La démocratie, de « Chez Bruneau » à Davos.
La presse flamande est bien meilleure que la presse francophone !
Les bilingues savent de quoi il retourne : plus incisive, moins lèche-botte, sans apriori sur les sujets scabreux, on tombe de haut quand on ouvre La Meuse ou Le Soir !
Seuls points sensiblement identiques entre gazetiers : la dévotion pour l’économie libérale, l’espèce d’eczéma à la seule évocation d’une possible catastrophe économique mondiale, le dégoût profond de Chavès au Venezuela et de Lula au Brésil.
La presse flamande réchauffe notre intérêt sur les fricots que mangent ensemble Bart De Wever et Didier Reynders. Pour l’ogre anversois, Michel 1er, c’est déjà plié et remis dans l’armoire sous boules de naphtaline. Nos athlètes du gymnase politique s’attèlent à Michel II !
Les journalistes flamands s’amusent de l’art de paraître, essentiel pour « durer » en démocratie dans l’esprit des gens. Les Wallons écrivent des lettres d’amour aux puissants.
La Meuse en est encore à exciter ses lecteurs sur l’impertinent de la RTBF qui vient d’être sanctionné sur ordonnance de Chastel, alors que la presse flamande suit à la trace, du restaurant trois fourchettes bruxellois, au gîte de week-end dans les faubourgs de Davos, ce nouveau couple glamour de la politique belgicaine, Bart et Didier.
Ah ! Davos, ce monde idéalisé des richissimes qui se paient des tangos avec l’autre versant du capitalisme mondain, le personnel politique, bien démocrate et bien solidaire des fortunes colossales à ce sommet, donne le tournis !
Chaque année, c’est le cor qui fait la chasse ! Sur la sonnerie « Au château du roy François » à la Chabot, les écuyers montent élégants. Le blé bluté un max, le ronflant démocrate et Mister tirelire à gogo échangent leur vue sur le monde de demain, combien il y aura de chômeurs en plus, quels culs-terreux mourront de faim, si une belle famine supplémentaire n’arrangerait pas le cours d’actions GAFAM ? Bref, on fait le point sur les bienfaits de la mondialisation et des technologies.
« Comment trouver une solution au problème des inégalités quand on fait soi-même partie du problème ? » écrivent les Flamands talentueux, tandis qu’à La Meuse, la rédaction décide de pousser la liste libérale de Christine Defraigne et Gilles Foret, afin d’avoir jusqu’au caleçon brodé main par madame, la peau du bourgmestre Demeyer.
La fine-fleur belge se devait d’être à Davos en représentation.
On a la chance d’avoir une dynastie. C’est le moment de la sortir du musée Grévin, de Laeken. La Belgian Power Reception est un événement de networking permettant à ceux qui composent l’élite belge de discuter en anglais avec des investisseurs étrangers, mais surtout entre eux. Le mauvais sort de nos deux langues nationales serait-il conjuré ? Même pas d’accord entre elles quand une éminence troue son papier-cul au petit endroit et s’enfonçant un index mal venu dans l’anus s’écrie versant fédération wallonne des entreprises « merde ! » et côté VOKA (Vlaams Economisch Verbond) « stront ! », alors que l’anglais réconcilie tout le monde « shit ! ».
L’alopécie rutilante de notre Premier ministre sous les lustres de Davos fait cossu et le compère ministre-président flamand a le sourire éclatant des bridges à 30.000 €. Ils ne font pas du tout SDF comme ceux des pays de l’Est, pour souligner la bonne santé économique de la Belgique et de la Flandre. L’autre, le Wallonie-Bruxelles, Rudy Demotte est trop petit, on ne le voit pas derrière nos belles carrures de première ligne. Même monté sur talonnettes, il a intérêt à rester sur les marches du haut de l’escalier pour la photo de famille. Je crois même que si son épouse s’écriait « on ne le voit pas, mais lui, au moins, a une grosse queue ! », ce serait du temps perdu. À Davos, ils ont Trump pour la partie salace du discours.
Si la démocratie belge dépendait tout à fait de Bart, ce qui ne saurait tarder, le gouvernement Michel serait déjà reconduit sans attendre les élections de 2019. Pour Bart De Wever, le fils de Louis Michel a rempli son contrat.
Chastel a de la chance, le petit-fils de Louis est encore trop jeune, sans quoi il serait président du MR et l’autre n’aurait plus qu’à retourner vendre ses pilules à Charleroi.
Le raisonnement de De Wever est simple : dans cinq ans, avec un Charles Michel qu’on dirait presque vice-président de la N-VA, la Belgique à la Suédoise aura changé bien plus que ne l’aurait fait une quelconque réforme de l’Etat. Comme l’avait fait remarquer Didier Reynders il y a dix ans : la plus grande réforme de l’Etat, c’est un gouvernement sans le PS.
De Wever ne doute plus de la valeur électorale de Michel Ier. Vive Michel II. En marge de Davos et un peu avant de ceindre son beau veston de cérémonie, Bart s’était rendu discrètement « Chez Bruneau », casser la graine avec Didier Reynders.
L’intrigant chef de la diplomatie belge pourra enfin obtenir en 2019 ce qui lui avait échappé en 2014 (info Daardaar) : un poste très élevé, avec la bénédiction de la N-VA.
Charles Michel poursuivra en beauté jusqu’au printemps 2019. Il récoltera les fruits de sa politique et rempilera avec le soutien de ses nombreux amis flamands.
Tout le monde sera content et bien casés.
C’est ce qui compte, non ?
Nous ?... on l’aura bien profond. Mais comme on en a la pratique en Wallonie, ce n’est pas grave. En philosophie, comme en médecine, à force d’habitude, ça fait moins mal.