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Fear of missing out.

Un tout nouveau mot, inventé en 2008, la nomophobie, n’a pas fini de faire parler de lui, au sens propre comme au sens figuré. La nomophobie est une phobie liée à la peur excessive d'être séparé de son téléphone mobile. Les scientifiques ont formalisé cette idée de peur de la coupure par l'acronyme FOMO (Fear of missing out).
Son ancêtre le téléphone fixe, devenu sans fil dans un rayon défini par le poste émetteur, interpellait pour les accrocs du verbe à partager, dorénavant, celui qu’on a en poche va développer ce que j’appelle « la téléphonite » syndrome qui prenait déjà un essor inquiétant quand le blabla n’était qu’à domicile.
L’art de communiquer pour souvent ne rien dire d’intéressant a dorénavant ses plus farouches adeptes dans tous les strates de la société de consommation.
Avant, seuls les amoureux éconduits, les emmerdeurs naturels et les solitaires qui refusent de l’être, avaient une vénération pour la manie communicante. En 2018, les principaux renforts viennent de partout, mais principalement de la jeunesse qui dès qu’elle a un moment, en rue sur le bus où à la maison, garde l’oreille au chaud des heures durant.
Si c’était encore pour s’encourager aux études, à discourir à l’infini sur l’économie capitaliste… mais non, on devine plutôt qu’on ne le perçoit que, plus on communique, moins on a des choses à dire.
Vous vous rendez compte de l’importance parfois de ce machin composite dans lequel on parle et qui vous répond ? En panne sur une route ou pire à cause d’un accident, en pleine zone désertique, le bonheur d’appeler un dépanneur ou une ambulance ?
À Waterloo, si Napoléon avait eu ce truc dans son gilet, Grouchy qui s’était perdu dans la campagne environnante serait tombé pile poil sur Blücher et n’en aurait fait qu’une bouchée !
Pourquoi faut-il qu’un progrès aussi merveilleux finisse par tourner au cauchemar ?
On a dans la poche une machine infernale qui réussit parfois à persuader un adolescent de se pendre ! À côté de cette horreur, on a la cavalcade des intempérants de la communication qui font une fixette sur quelqu’un, au point qu’ils finissent au tribunal pour harcèlement.
Le téléphone fixe était déjà un aimant qui accrochait sur son passage tous les inquiets de « est-ce qu’elle m’aime encore », les affreux « si tu n’en veux plus, moi j’en veux encore plus », de tous ceux-là tout aussi enquiquinant, mais moins redoutables, les somnambules qui vous réveillent à deux heures du matin pour vous dire qu’ils ne peuvent pas dormir et l’ardente amoureuse qui téléphone à son amant, au lit avec son épouse, parce qu’elle a envie de faire l’amour tout de suite.
La rupture au téléphone est très pratique pour les lâches, sauf qu’il faut bien connaître la personne qu’on abandonne, parce que, si elle est atteinte de téléphonite, votre calvaire commence.

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Tout ça est très sérieux, c’est un dérapage de plus dû au progrès de la science. La Meuse qui n’a plus que des employés locaux qui jouent aux journalistes, sans téléphone peut fermer boutique. Au lieu du stylo, ils fonctionnent avec des piles. Ils partent en reportage avec des provisions de batterie. À la rédaction, on épluche ce que crachote le fax, entre les recommandations du propriétaire, on a des statistiques.
C’est classique, l’employé de service commence toujours son article par « selon ». Cette fois encore, il ni coupera pas : « Selon une étude britannique relayée dans le Los Angeles Times, 66% des personnes interrogées (1000 au total) seraient accros à leur mobile et ne pourraient pas s'en séparer. La nomophobie toucherait davantage les femmes (70% contre 61% d'hommes) et les plus jeunes (77% des 18-24 ans contre 68% des 24-34 ans).
Les symptômes : angoisse (d'être séparé de son mobile ou à l'idée de perdre), respiration plus courte, nausées, tremblements, rythme cardiaque accéléré... bref la panique !... sont devenus des classiques des nouveautés en psychiatrie.
Nos élites sont tout aussi branchées, mais sécurisées. Leurs numéros n’existent nulle part que sur l’agenda de leurs maîtresse, celui de leur chef de bureau, voire de leur épouse quand ils ne sont pas en instance de divorce.
C’est ça aussi la notoriété. Eux, on ne peut les emmerder que s’ils le veulent bien.
Pareil pour les chefs d’État. Macron appelle Vladimir, comme Trump miss May.
À nos étages, c’est le micmac, tout le monde parle à tout le monde. Mon numéro est proche de celui d’un marchand de couscous célèbre à Liège. Il ne se passe pas un jour sans que j’aie quelqu’un à l’autre bout du système qui veut passer une commande !
Il est vrai que cette parlotte générale cache, en réalité, une impression de solitude tant il est devenu difficile de parler à quelqu’un en rue, sans qu’on ne vous suppose des intentions louches.
Comme on peut être assuré que si on ne communiquait que pour dire des choses capitales et intéressantes, les marchands d’appareils et les facilitateurs d’accès aux satellites feraient faillite.
Comme quoi, pour que cette société tienne encore un petit bout de temps, il est indispensable qu’elle soit futile en tout. Et en réfléchissant à cela, on pourrait ajouter « c’est fou comme elle dessert bien ce qui ne sert à rien, et parcimonieuse et radine, pour le reste ».

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