Cumul et décumul.
Encore un débat inutile parce que complètement à côté de la plaque, ce midi chez Deborsu. Le décumul avec son lot de prestataires de mandats fait penser à ces cadres américains qui se jaugent d’après les sommes qu’ils perçoivent pour leurs prestations.
Les vertueux ne le sont pas davantage que les CDH et MR dont certains avouent à demi-mot qu’ils aiment l’argent. Les vertueux briguent souvent un emploi à la Commune et un autre de député. Ensuite, il suffit de déclarer qu’ils n’en feront qu’un, s’ils sont élus des deux côtés, étant bien entendu que leur popularité va servir à des compères de l’une ou l’autre liste, de faire le plein de voix qui ne leur étaient pas nécessairement destinées. Un autre confort tient dans l’intention d’avoir deux chances au lieu d’une, de se voir mandaté par le peuple.
Le cumul va à l’encontre des règles de la démocratie, puisqu’un individu s’octroie la place d’un autre citoyen. Outre le fait qu’il risque de faire un travail à moitié ou pas du tout dans un des deux mandats, le cumul met en évidence que presque tous les mandats sont surpayés, puisqu’ils peuvent se cumuler et qu’un travail à mi-temps ne devrait pas être rétribué comme s’il exigeait le plein temps.
Reste que le problème de fond est à peine effleuré par le cumul/décumul, vu que les arguments avancés ne sont que des projections personnelles sur les situations particulières. Le vrai problème tient à la représentation proprement dite du peuple par délégation de pouvoir. Est-ce la seule forme moderne possible d’exercer la démocratie ?
Je n’en suis pas certain.
Il faut repartir du simple postulat que les gens sont le peuple qui fait l’État. Il est nécessaire d’avoir ce postulat présent en tête pour imaginer un retour du peuple sur la scène politique.
La tendance à inviter dans des débats politiques de simples particuliers, en voix off ou en représentation à égalité avec les mandatés, est un petit mieux dont s’inspirent les médias qui veulent conserver de l’audience.
C’est un timide début chez certains. Pour ne pas l’avoir compris à la RTBF, ils ont stoppé l’émission concurrente à « C’est pas tous les jours dimanche » quoique Deborsu soit loin du compte. Quand les auditeurs s’apercevront que les chroniqueurs ne les représentent pas et que leurs avis ne peuvent pas rassembler l’ensemble de l’opinion des gens et sont donc personnels, il faudra trouver une autre tribune contradictoire aux professionnels discourant.
D’autant qu’au fil des émissions, l’appartenance à des partis de la droite à la gauche a fini par transpirer des personnages supposés honnêtes et de bon sens. Ils font bien partie des mêmes partis qui de l’opposition à la majorité constituent le fonds de commerce d’une démocratie piégées par les intérêts de la classe politique, dans un dangereux immobilisme.
Pas plus qu’eux, le représentant politique ne peut pas représenter la masse, parce qu’il capte à son profit la parole de celle-ci, exerçant par elle un pouvoir de domination.
À l’intérieur de son groupe politique, il doit s’intégrer à un leader qui est lui-même un porte-parole concurrent.
Cette confusion aboutit à un système bloqué dont les aspects inégalitaires finissent par apparaître tellement insupportables que la masse s’en émeut. C’est alors que le personnel politique résiste et divise la masse pour durer.
On voit ensuite cette chose particulière : une résistance des élus à la volonté des gens.
À bien considérer l’état des lieux de la Wallonie, nous n’avons jamais été aussi éloigné d’une représentation « correcte » dans un État fédéral qui voit la double minorité du parti libéral censé nous représenter, puisqu’il représente à peine 20 % des citoyens wallons et bien moins encore au niveau du pays. Ce n’est pas en trustant la moitié des ministères de ce gouvernement que le seul parti francophone au pouvoir pourra « représenter » 4 millions de personnes, puisque tous ces emplois lucratifs sont répartis providentiellement dans cette seule formation politique avide d’emplois et faisant opposition au décumul. On comprend pourquoi.
L’histoire que nous vivons de cette législature reste encore à écrire. Les historiens retiendront sans doute la régression du processus démocratique dans ce cas particulier.
La contestation de la légitimité du MR est nécessaire au niveau fédéral. Ce parti a osé le pari du citoyen analphabète, votant contre ses propres intérêts.
Mais jusqu’où le nombrilisme de quelques-uns poussera-t-il les citoyens ?
C’est la grande question, trop brûlante d’actualité pour pouvoir y répondre sereinement.