La honte sport national.
Les gens en transit, les ombres entre les buissons, sont des abstractions, des fantômes qui vont et viennent, montent dans des camions, sont pris en chasse, disparaissent… le public s’en effraie, préfère les voir loin de chez lui, puis soudain, une enfant de deux ans prend une balle, je veux bien qu’elle ne lui était pas spécialement destinée, mais c’était tout de même pour elle, et tirée dans sa direction, quand la tête de cette petite fille a éclaté. Elle aussi avait tendance à n’être qu’une abstraction… une cible, sans en être une.
Alors, tout change. On n’est plus dans les abattoirs d’Anderlecht à faire de l’animal encore sur pied, un steak à 17 € le kilo à la sortie, on est dans l’humain, dans le cannibalisme à l’état pur quand des sagouins défendent leur pré carré à coups de révolver et veulent bouffer à la marmite tout qui résiste à leur graisse, leur patrie, leur coin de table, leur mégot et leur bière du dernier match de foot.
Et ces gens qui n’étaient rien que des consommateurs avachis par des boulots de merde se révèlent soudain d’ardents patriotes, derniers remparts, d’un pays dont ils se sont toujours fichus et inconsciemment voulu la perte depuis toujours.
Ce qui se passe en Belgique à propos de la petite Mawda, tuée par un tir maladroit d’un policier, dépasse l’indécence la plus crasse de la part des ministres et de Theo Francken en particulier. Il faut dire que la presse n’y est pas pour rien non plus.
Au lieu de s’écraser, de regretter qu’on en arrive à tirer sur des camionnettes bourrées de pauvres gens, on a eu droit pendant dix jours à des suppositions, des doutes, des atermoiements et jusqu’à l’ignominie d’un journaliste donnant à penser que les passeurs exposent les enfants pour faire cesser les tirs de nos flingueurs.
Comment ce pouvoir n’a-t-il pas honte ?
S’il y a bien des gens envers lesquels on ne saurait rien dire que leur demander ce que l’on pourrait bien faire pour soulager leur peine, ce sont bien les parents de Mawda. À la place, on a droit à la gueule enfarinée de Theo Francken se posant la question de savoir comment il pourrait réembarquer ces gens pour l’Allemagne !
Dame, les ministres de la N-VA, comme leur chef de file, pensent surtout au terreau de voix qui les ont élus, de ces « patriotes » locaux dont on dit le populisme raciste. Il faut bien cultiver ce terreau et y planter les petites graines qui font les bons députés.
On oublie trop souvent que les personnes en situation irrégulière sont des êtres humains.
En France, l’un d’entre eux est devenu un héros national en sauvant un enfant de quatre ans. En Belgique, on en tue un. C’est la loi des compensations ?
Certains citoyens belges, par ailleurs irréprochables, traitent mieux leurs chiens que ces fugitifs des pays en guerre ou économiquement invivables.
Dans quel pays vit-on ? Vais-je finalement avoir honte d’être natif de Liège ? Faut-il rappeler que la cascade tragique s’est passée en Wallonie ?
C’est tellement chaud cette décision pourtant toute simple de proposer aux parents un asile qu’on leur refusait avant à coup de révolver, que Charles Michel doit réunir ses ministres pour trouver quoi dire et surtout mettre la N-VA dans le bain, pour un dénouement qui ne nous ferait pas montrer du doigt !
Sans quoi, ce parti sans vergogne pourrait tirer des conclusions que la réaction de Bart De Wever laisse deviner. « Buiten » et pas question de s’apitoyer !
Les parents de la petite Mawda ont introduit une demande de régularisation en Belgique. Faut-il qu’ils soient à bout de ressource et au bord de l’abîme pour quémander auprès des assassins de leur fille ! Mais, avec d’autres ministres, même si leurs électeurs sont pour la plupart des racistes convaincus, ils n’auraient pas même dû faire cette demande. Charles Michel n’aurait fait que son triste devoir et en ne se référant à personne, leur donner le droit de séjourner en Belgique de façon illimitée, en attendant d’être des citoyens comme vous et moi, s’ils ne sont pas trop écœurés de voir nos petites gueules d’hypocrites pleines de faux repentir.
Hélas ! on n’est pas surpris de la réaction de Bart De Wever et de ses lieutenants qui s’affichent comme les piliers de ce gouvernement.
On le sait, les ministres ont toujours eu horreur de traiter les cas exceptionnels. Ils ont bien trop peur de contrarier une partie de leur clientèle, la plus farouche, celle qui crache sur tout ce qui n’est pas Flandria ou Wallonia.
On sait la Flandre en proie à des poussées d’extrême droite, nationalistes en diable et complètement en symbiose avec une partie de l’opinion francophone du même tonneau, unis par la même haine des étrangers, c’est marrant, entre gens qui se détestent sur tout le reste !
C’est bien la faute de Charles Michel et aussi du père qui l’a mal conseillé d’avoir fait un gouvernement pareil, un gouvernement qui ne s’assume pas et qui vit dans l’incertitude à cause d’un certain nombre de canailles carriéristes qui cohabitent avec des gens honnêtes.
Le plus beau dans cette affaire tient dans le lâche soulagement que ce gouvernement aura, puisqu’il n’aura pas à répondre de suite à la demande d’asile des parents.
En effet, les gazettes nous disent que « La décision ne devrait pas tomber immédiatement, car la demande d’asile n'arrivera probablement pas à l'administration avant un certain temps. »
Comble de la bienveillance de Francken, le secrétaire d’État a précisé que les parents avaient demandé à ne pas devoir payer les 350 euros par personne qui doivent être versés pour ouvrir une telle procédure de régularisation. "Je n'ai jamais accepté cela par le passé", a commenté le nationaliste flamand, sans préciser ce qui sera décidé. »
Cela veut dire quoi ?
Qu’on ne demande pas 350 € par personne aux demandeurs ou que Theo Francken n’a jamais exonéré quiconque de payer cette somme ?
Si cela le dérange, qu’à cela ne tienne. Il suffirait de m’envoyer la facture. Ainsi, j’aurai l’impression de sauver l’honneur.