On solde à #Evolve-RTL.
Les restructurations de RTL-Bruxelles qui ont abouti – comme toutes les restructurations à des licenciements – n’ont pas fait l’objet de longs commentaires. Les quelques rares manifestations de mauvaise humeur du personnel ont eu lieu sur le pavé en face de l’établissement sans soulever beaucoup d’émotion.
Bref, le CEO Philippe Delusinne et le conseil d’administration se sont frotté les mains. La purge, c’est de l’argent qui reste dans les coffres.
La réputation de sérieux est aussi importante que la diffusion des programmes eux-mêmes, il en va des finances que les annonceurs laisseront à l’entreprise pour les temps d’antenne, au même titre que les tarifs de diffusion au prorata du nombre d’auditeurs et téléspectateurs.
Les personnels de ces établissements censés informer les Belges en même temps que les divertir, que ce soit à RTL ou à la RTBF sont toujours en porte-à-faux vis-à-vis de l’employeur et de l’opinion publique. Ces établissements ne sont pas que des diffuseurs d’actualité et des amuseurs publics, ils sont aussi la base d’une formation politique déguisée de la population. Formation politique formatée par la respiration même de cette société libérale, sur fond d’unité européenne et d’économie mondiale.
Delusinne et Jean-Paul Philippot attendent donc de leur personnel un engagement tacite dans la continuité de l’organisation sociale de l’État belge. C’est difficile de faire carrière à RTL hors des convictions clairement démontrées tous les jours par l’entreprise dans ses interprétations de l’actualité et jusque dans ses jeux télévisés et de se retrouver dans la rue, en instance d’être licencié, une pancarte à la main dénonçant les turpitudes de l’employeur.
Certains syndicalistes penseront même « c’est bien fait pour leur gueule », traduisant par là l’espèce d’irritation d’entendre à longueur d’année la somme de contre-vérités dite d’un ton péremptoire par l’ensemble des personnels, ceux qui n’apparaissaient pas directement sur l’antenne étant impliqués dans les programmes par leur élaboration ou par la technique de leur diffusion.
Je ne partage pas cette opinion, étant entendu que la plupart des travailleurs (et pas que dans l’audiovisuel) sont contraints d’adopter le point de vue de l’entreprise, à défaut, de devenir un cas social.
La clause de conscience est rarement avancée en cas de conflit.
Tout le monde n’a pas la chance à RTL de faire un triomphe d’un départ comme Hakima Darhmouch que l’on aurait pu attribuer à l’imminence d’un licenciement, mais que la notoriété de la personne avait sans doute fait hésiter Delusinne, tout heureux de pouvoir à grands renforts de démonstrations de gratitudes et de regrets, se séparer de cette journaliste connue et de refiler la patate chaude à son concurrent Philippot.
Les obscurs et les sans-grades n’ont pas eu de tels égards. Si cette incapacité du système à conserver un personnel qui n’a démérité en rien, éclate au grand jour, dans la logique impitoyable du propriétaire près de ses sous et sans apitoiement affectif, alors même que la situation économique de l’entreprise est tout juste un peu moins florissante qu’elle ne l’était le bilan précédent, c’est bien la preuve qu’il n’existe aucune structure industrielle capable d’intégrer les travailleurs !
Le reste : démonstration solidaire de la direction, désolation générale des cadres et de l’administration, serment de ne laisser personne sur le carreau, volonté d’accomplir toutes les démarches en conformité à la loi, n’est qu’enfumage, pleurs hypocrites et regrets masquant la joie cruelle d’un accroissement, sinon d’un rétablissement des bénéfices.
Si ce personnel partant et le personnel restant se convainquaient que ce système froidement meurtrier attente plus aux libertés qu’il ne les sert, cette leçon cruelle ne serait pas perdue.
Au total, 88 personnes sont concernées par le plan #Evolve. 50 personnes ont été licenciées le 27 mars et les 38 autres partiront sur une base volontaire, moyennant des indemnités de départ et un plan de reclassement professionnel. Certaines personnes auraient en effet estimé qu’elles n’avaient plus aucun avenir chez RTL et ont préféré partir.
Un qui ne l’a pas compris et qui a cru, dur comme fer, que le système avait besoin de lui, c’est Stéphane Rosenblatt, directeur général des contenus télévisés de RTL, qui avait lancé une action en justice contre son employeur afin d'être à nouveau en charge des contenus de la radio Bel RTL.
En voilà un qui aurait besoin de revoir sa théorie de l’indispensable et du superflu. Delusinne l’aurait conservé compte tenu des énormes indemnités que RTL aurait dû verser à ce vétéran haut placé dans la cage aux folles directoriales.
On pensait l’écœurer en flattant la haute opinion que Rosenblatt a de lui-même. On lui aurait préparé une fin de carrière dans un bureau où il n’y avait qu’une table et une chaise, sans autre activité qu’y faire des mots-croisés en attendant l’heure de la sortie.
Philippe Delusinne, le CEO, avait décidé de retirer à Stéphane Rosenblatt son titre de responsable des contenus de Bel-RTL. L'absence d'avancées dans le redressement des audiences de Bel RTL a été fatale à l’indispensable collaborateur qui ne savait pas que les cimetières sont pleins de gens irremplaçables !
L’action en justice ayant tourné court « les conditions de confiance et de loyauté qui doivent présider à une collaboration ne sont plus rencontrées", explique le CEO Philippe Delusinne.
On ne sait pas si Rosenblatt n’a pas imaginé ce cirque pour toucher des indemnités de licenciement, plutôt que faire des mots-croisés dans un bureau vide, tout en ayant l’air de revendiquer sa part d’activités directoriales .
On ne sait pas ce qu’il fera du pactole de Delusinne-RTL. À sa place, je financerais un nouveau journal qui pourrait s’appeler « Le Drapeau Rouge » (1921-1991), ce serait un hommage à l’histoire d’un journal, à la perte duquel lui et ses pareils ont contribué. Il y a bien des jeunes gens qui sortent une feuille tous les deux mois sous le même titre, il pourrait utilement leur téléphoner ?