Le sar Rabindranath Michel.
Les MR regroupés à Louvain-la-Neuve pour entendre leur grand leader Charles Michel, ont assisté à un des plus mauvais discours jamais prononcé par un élucubrant responsable du néolibéralisme.
Entendez par là qu’un Ducarme aurait fait mieux, malgré la médiocrité de l’art oratoire du ci-devant libéral, très éloigné du souffle et du lyrisme d’un Jean-Luc Mélenchon. Quant au fond, ce n’est pas à l’applaudimètre qu’il faut le juger, la claque était bien fournie en barons de complaisance.
On sait que l’éloquence n’a jamais été le fort de la famille Michel. C’est une question de conviction. Chez le père, c’était physique. Chez le fils, c’est métaphysique. On s’étonne que ses études d’avocat ne lui aient pas plus donné le goût du verbe, la recherche de la métaphore, l’élégance de la litote. Assurément, de ce point de vue, Didier Reynders est plus doué. Le défaut chez ce dernier qui emporte tout, c’est le cynisme du parvenu.
Attention, Charles Michel n’est pas plus sincère, mais son art est de faire croire à des convictions qu’il n’a pas. Il eût été bon dans le rôle de Titus du Bérénice de Jean Racine. Un Titus renonçant à l'amour pour obéir à la raison d'État, c’est ce qu’il nous joue tous les jours, jusqu’à tirer des larmes du petit Chastel qui époussette le sol devant ses pas.
Pourtant, pour un observateur, rien ne passe dans son discours. Le bon orateur doit avoir la rhétorique de la persuasion, groupant des faits d’amplification et de style soutenu.
On pourrait le croire contraint à la métaphore banale par le souci de se ménager des sympathies parmi un auditoire d’intelligence moyenne et peu vive. On a le sentiment que Michel est à la limite du possible de ce qu’il comprend lui-même !
D’emblée, la banalité du discours le dévoile. Dans la salle, l’esthète, pour tout autant qu’il y en ait un, voit de suite l’apprêt du faiseur.
« Vous le savez, et je le sais. Ce congrès, ce moment entre nous, est important. Parce qu’il va fixer notre vision et notre projet pour les 5 prochaines années. Parce que ce moment est important, je me tourne vers les fondamentaux de notre pensée politique. »
L’incipit qui aurait pu être une anaphore avec « vous savez, je le sais » l’énumération de ce qu’il sait ne va pas plus loin, sinon pour employer deux fois « ce moment » et deux fois « important ». Il reprendra plus loin, le principe, mais c’est fini l’anaphore est sans effet.
On a compris, les premiers mots disent tout.
Le reste est ce qu’on entend depuis des années sur l’émancipation, l’épanouissement personnel, les capacités des individus avec le potentiel de chacun : l’emphase habituelle des successeurs d’Adam Smith, celle des marchands drapiers qui ont tenu tête au roi, sous prétexte de faire payer la dîme par leurs commis.
Je m’en voudrais de casser les pieds des lecteurs de Richard3.com en détricotant par le menu, le reste du discours. Juste pour le plaisir ce morceau de bravoure : « Etre libéral et réformateur, c’est défendre toutes les libertés : la liberté d’expression, la liberté d’entreprendre et de créer, la liberté de conscience… C’est vouloir la tolérance et refuser les discriminations… C’est considérer que chaque être humain est porteur de droits et de devoirs universels. »
Sans être allé jusqu’à Louvain-la-Neuve pour entendre ça, j’entends de chez moi les murmures flatteurs, les « oui-oui » et les attendrissements sur soi-même de la salle énamourée.
Cependant, s’il y a bien un parti qui méprise la liberté individuelle, qu’il confond avec la liberté d’entreprendre, c’est bien le Mouvement Réformateur !
L’avocat-président-premier ministre s’empresse d’ajouter à propos de la liberté « ce n’est pas la licence de faire ou de dire n’importe quoi. C’est au contraire une exigence de parler vrai, une obligation d’agir dans la dignité. ». Dans l’appropriation des vertus morales et civiques, cet histrion est sans pareil. On aura beau le chercher en vain sur le terrain, il a disparu.
Qu’il se garde bien de transmettre à mes petits enfants, ce qu’il compte transmettre aux siens !
Qu’à Louvain-la-Neuve, il ne se soit trouvé personne capable de monter sur scène pour gifler ce malotru, montre bien l’absence de dignité de ce parti.
Charles Michel a meublé son discours des noms de ses grands disparus, comme un rappel au champ d’honneur. Il n’y manquait qu’un clairon et une minute de silence !
« Walter Frère-Orban, Paul Janson, Paul Hymans, Jean Rey, Omer Vanhaudenhove » tous plus ou moins accablés par le passé d’affaires louches, d’escroquerie, de malversations, de détournement au service d’une oligarchie de la bourgeoisie se perpétuant, comme des punaises de lit, de génération en génération.
Enfin, Charles citant Victor Hugo « Tant que le possible n’est pas fait, le devoir n’est pas rempli », finit par lâcher quelques réformes de son programme. Manifestement le devoir ne sera pas rempli. Les intérêts des affaires privées que Monsieur Michel défend sont incompatibles avec l’intérêt public.