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Le mur.

La nécessité de travailler dans les conditions que nous impose l’économie libérale nous modifie à notre insu. Les natures généreuses, confiantes, naturellement portées à rendre service gracieusement n’ont rien à faire dans l’arbitraire d’une société du donnant/donnant.
On n’y peut rien changer, mais d’avoir transformé l’entreprise en un champ de bataille où le plus fort gagne, où le « meilleur » exécute le moins performant, laisse des traces dans la construction sociale des gens.
Le monde politique s’est laissé circonvenir par la mentalité du monde économique. L’arrivisme, le faux discours sur le collectif, l’occupation des postes par un élitisme copié sur le privé, tout enfin conduit à faire de l’État une entreprise, d’où sa déshumanité et la régression sociale constante.
La parfaite synthèse de la politique et de l’économie est la transformation sous nos yeux d’un édile communal, Stéphane Moreau, ex-échevin, puis bourgmestre d’Ans, enfin CEO, pomponné, rasé de frais et brassant des millions. Qu’au départ, ce phénix ait été socialiste ne manque pas de piment.
Tout cela concourt au ratage des démocraties libérales. De fait, le monde n’a jamais été économiquement aussi inégalitaire. De cette inégalité est née une frustration égalisatrice qui trouve un exutoire dans l’expression bridée des idées et des mœurs en Europe. Toutes sortes de gens se voient ainsi interdire sous peine de procès la prise de parole, ce qui accélère encore le repli sur soi.
Ainsi prend forme, une uniformisation obligatoire, nuisible à la diversité culturelle. Le nivellement culturel est spectaculaire. Tout se fait comme s’il y avait une politique délibérée d’abrutissement des masses ; bien que les responsables politiques affirment suivre tout simplement une évolution inquiétantes tirant les gens vers le bas, sous peine de disparaître.
Les médias de l’ère électronique s’épanouissent dans l’incommunicable. Ils imposent ouvertement l’adoration unanime des valeurs de la société néolibérale. Nous avons le choix entre l’avers et le revers identiques d’une pièce de monnaie truquée.
À ce degré zéro, correspond une technologie des communications très perfectionnée, pour si peu d’originalité. Les médias sont concentrés en quelques mains amies du pouvoir. Ce petit nombre de puissants s’adresse au plus grand nombre de gens jamais regroupés par le passé, si bien que c’est la première fois dans le monde que tant d’hommes soient maintenus dans l’incommunication par un si petit nombre.
Par cet effet, ceux qui ont le privilège d’informer, de s’exprimer, de créer se réduisent de manière exponentielle. « La dictature de la parole unique et de l’image unique, bien plus dévastatrice que celle du parti unique, impose partout un même mode de vie, et décerne le titre de citoyen exemplaire à celui qui est consommateur docile, spectateur passif, fabriqué en série, à l’échelle planétaire, selon un modèle proposé par la télévision commerciale américaine. » (in le Monde Diplomatique)

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Le mode opératoire des télévisions privées américaines envahit l’Europe et cloue sur canapé de nouvelles générations d’ahuris et d’hébétés. Fox News et One American News Network sont les références de ce caniveau audiovisuel. Favorites du 45e Président des États-Unis, la dernière affiche même un "compteur" du nombre de "migrants" présents aux Etats-Unis !
Ce n’est pas le meilleur des mondes possibles, de Voltaire, mais c’est celui que nous ingérons sur prescription obligatoire capitaliste. Les citoyens sont devenus des consommateurs regroupés dans des marchés, les nations sont des entreprises, les villes des entités productives, tandis que les relations humaines ne sont plus que des prises de paroles entre concurrents commerciaux.
Écartées de tout pouvoir par le leurre d’une démocratie falsifiée, les populations n’ont jamais été autant victimes de l’injustice. La Banque mondiale publie les résultats de l’économie mondiale : les inégalités ont doublé ! En 1980, la tranche la plus aisée (20 %) de l’humanité était trente fois plus riche que les 20 % de la plus pauvre. En 1990, celle-ci était soixante fois plus riches...
On n’ose pas parler de 2020 !
Entre les plus riches des riches et les plus pauvres des pauvres, l’abîme est devenu la fosse des Mariannes. En faisant la somme des fortunes privées qu’évoquent les magazines Forbes et Fortune on constate que les cent personnes les plus riches ont une fortune supérieure à tout ce que possèdent un milliard et demi d’habitants de la planète. La Banque mondiale le reconnaît dans son dernier Rapport sur le développement dans le monde, l’ONU confirme dans son dernier bilan mondial sur l’humain.
Pourquoi ce qui est connu, avéré, commenté, rabâché par la gauche n’est-il jamais répercuté par les « grands » du royaume ? C’en est au point, lorsque Michel, Di Rupo ou De Wever s’amènent la gueule enfarinée pour nous dire l’air triomphant qu’ils ont pris 20 euros sur l’indemnité d’un chômeur, que j’ai envie de leur foutre une mandale à travers la tronche.
Comment osent-ils tenir les discours qu’ils tiennent sur l’économie et les effets de celui-ci sur la direction de ce pays ?
Ils ne s’adressent pas à la minorité des gens qui savent, mais à la majorité de ceux qui ne savent pas, dans une course à l’abîme.

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