La métamorphose.
Ces temps de confinement peuvent être mis utilement à profit par des moments consacrés à la lecture et à la réflexion. Pour l’heure, ce serait plutôt à ceux de l’indignation. Maggie De Block s’est défendue d’avoir fait détruire un stock de masques entreposé dans des locaux de l’armée en prétextant que, par négligence, il avait été endommagé et déclaré inutilisable. C’était se décharger de ses responsabilités sur les militaires.
Le journal « La Meuse » a retrouvé l’un d’entre eux, préposé à la garde du dépôt des masques. Il a démenti catégoriquement les propos de la ministre. On a brûlé des masques en bon état et dont on pouvait faire usage. Il donne pour preuve qu’une société folklorique en a eu gracieusement quelques centaines… pour un carnaval !
Maggie De Block fait l’erreur de beaucoup d’intellectuels. Elle a cru que pour n’être point fautive, il s’agit d’agir conformément à une opinion probable. Cette opinion est celle du MR, de l’Open VLD et en général de ceux qui n’ont qu’une obsession : celle de voir un communisme rampant s’installer profitant des circonstances. Cette politique de veulerie et de lâcheté faite sur une opinion d’électeurs-ectoplasmes est bousculée par l’imprévisible. La démocratie pourrait se désembourber du système et, pour le coup, faire passer Maggie à la trappe !
Ce n’est pas le moment qu’elle démissionne ? Pour ces gens-là ce n’est jamais le moment !
Cette chronique débutait par l’espoir que le confinement n’est pas tout à fait perdu grâce à la lecture qui revient en force et à l’intelligence qui reprend ses droits.
Voici un livre de circonstance, publié en anglais en 2007, mais traduit depuis et en librairie :
The Black Swan (Le Cygne noir) ou La puissance de l'imprévisible, de Nicholas Taleb. La conséquence de cet imprévisible qui vient de mettre en pièces ce que croyait des milliards de gens, à savoir l’indestructibilité de la société libérale, s’appelle aujourd’hui corona virus. Pour ceux qui aiment des livres à caractère philosophique tout à fait opposés aux cucuteries que l’on fait apprendre aux rhétoriciens (1), du même auteur des traductions sont en librairie : Le Hasard sauvage (2001), Le lit de Procuste (2010-2016), Antifragile (2012) et Jouer sa peau (2018).
Mais aux malheurs de Maggie, il faut encore ajouter une autre crise grave, celle de l’économie mondialisée par la volonté des gouvernements libéraux de l’Union européenne. N’oublions pas que sans concurrence avec Covid-19, sans pandémie, ni ravage de l’Afrique par des criquets, sans que n’explose le Vésuve en baie de Naples, la crise économique de 2008 avait causé directement des centaines de morts. On n’est pas en train de faire le choix entre une crise sanitaire et une crise économique. On est en train de faire le choix entre une crise sanitaire et une autre crise sanitaire qui est la conséquence de la crise économique !
Or, si l’insouciance des ministres libéraux d’une crise sanitaire pouvait comprendre des risques aléatoires, donc relatifs, puisque la précédente pandémie (la grippe espagnole) avait eu lieu il y a cent ans, la crise économique était annoncée. Elle était certaine !
Le virus n’est que l’accélérateur de l’histoire, de plus il sera peut-être l’élément qui aura permis de changer nos modèles économiques. Cela dépendra du choix de chacun de nous. Après deux mois de confinement total, la vie reprend ses droits à Wuhan. Tout n’est pas clair dans cette fin de pandémie en Chine. Trump ne se fait pas faute de rappeler d’où elle vient. Mais comment éviter de basculer d’une tyrannie des marchés à un absolutisme d’Etat ? Le confinement avec défense de circuler sauf pour s’approvisionner, n’est-il pas une excellente répétition pour une prise de pouvoir plus ferme des libéraux qui feraient la sourde oreille aux injonctions citoyenne de déguerpir ?
Les temps sont aux mutations rapides. La métamorphose en papillon butinant les fleurs, c’est pour l’école à la maison. Celle de Kafka, pourrait voir des cloportes partout, enchaînés solidement au système, la force des événements ayant cédé la place à la force de la police.
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1. Je ne citerai pas des noms de peur de me faire des ennemis parmi des enseignants de ma connaissance, encore moins des auteurs qui risquent d’éveiller leur attention. Le livre qui a pour thème l'impact extrême de certains types d'événements rares et imprévisibles, est très didactique. Il aide à comprendre la tendance humaine à trouver, rétrospectivement, des explications simplistes à ces événements. Cette théorie a été popularisée sous le nom de théorie du cygne noir. Il couvre aussi des sujets se rapportant à la connaissance, à l'esthétique et aux modes de vie, utilisant des éléments de fiction pour présenter ses arguments. Il a été publié en 32 langues.