La politique attendra !
Il ne faut pas se raconter des histoires. Ce n’est pas l’urgence d’une lutte immédiate contre Covid-19 qui a permis la deuxième mouture d’un gouvernement minoritaire, mais l’impossibilité de former un gouvernement stable entre les deux grandes Régions.
Cette hypocrisie n’échappe à personne. C’est d’autant flagrant que ce gouvernement se compose d’une « coalition orange-bleue » MR, Open VLD, CD&H. Ensemble, ils disposent de 38 députés sur 150, soit 25,3 % des sièges de la Chambre. Cela implique une impossibilité de faire une vraie politique, en-dehors de celle contre la pandémie.
Dans un gouvernement ordinaire, de par son incurie, Maggie De Block aurait été obligée de démissionner. Avez-vous entendu les partis politiques de cette coalition minoritaire évoquer la moindre allusion du départ de la ministre ?
Les lourds antécédents de la gestion des hôpitaux publics d’un gouvernement américanisé dans sa politique des soins de santé accablent De Block et ses prédécesseurs. Elle a sa part de responsabilité, du numerus clausus freinant l’arrivée de médecins, aux carences logistiques, la destruction de masques FFP2, les incohérences des consignes de confinement aux citoyens, Maggie De Block doit démissionner !
Et que croyez-vous que fera Madame Wilmès, quelles pressions extérieures seront exercées ? Rien, sinon un désaveu implicite par un adjoint qu’on a collé à Maggie pour pallier à ses carences.
Les ministres de ce gouvernement sont inamovibles et pour cause, derrière eux, il n’y a que le vide ! Il suffirait d’un geste de mauvaise humeur de Paul Magnette pour que Sophie Wilmès tombe. Il ne le fera pas. Ce gouvernement bancal, pas démocratique pour un sou est le plus solide depuis très longtemps.
Il ne tient que parce qu’on n’a rien d’autre à montrer à l’opinion et que c’est la dernière palissade d’un chantier que les Flamands ont voulu et qui cache un immense chaos, un foutoir comme on n’en a jamais eu : une pléthore de gouvernements locaux, une armée de responsables indemnisés, des lois imbéciles, et l’impression que ce monde politique s’est tellement emballé sur la cohabitation de deux mentalités différentes, qu’elle est devenue impossible.
Il faut quand même rappeler qu’on en était à se poser la question de nouvelles élections quand Covid-19 s’est invité, comme par miracle, pour calmer l’angoisse des bourgeois cocardiers. La crainte de ne pas pouvoir suivre la mondialisation de leur rêve, à cause de deux tribus indiennes qui se regardent d’un mauvais œil, crispent les sphincters de la Haute.
Ce gouvernement est donc providentiel. Fait-il notre affaire à nous ? C’est autre chose. D’abord, il remplit mal sa mission face au coronavirus.
Et il est nul parce que les américanolâtres l’ont voulu ainsi dans la perspective d’une privatisation générale de tout le social à la Trump, avec le feu vert de l’Europe. Manque de pot, dans ce volet spécial pandémie, ce ne sont plus les Sioux contre les Comanches, mais les événements qui plaident pour un retour des industries stratégiques sur le territoire national.
Sophie Wilmès est donc à la tête d’une coalition qui poursuivra jusqu’au bout sa mission de bon petit soldat capitaliste, parce que telle est sa feuille de route. Elle repoussera tant qu’elle peut de ses petits poings, les nationalisations nécessaires !
À regarder l’avenir, on peut en déduire que ce gouvernement ira cahin-caha jusqu’au bout de la législature. Après la pandémie, Wilmès ne démissionnera pas et les autres partis, opposition comprise, ne feront strictement rien. La démocratie entre parenthèse, c’est pour longtemps.
On aura enterré la possibilité d’élections anticipées, parce qu’une élection qui donnerait les mêmes résultats serait la confirmation que ce pays n’a plus d’avenir, dans sa forme fédérale.
Quels que soient les informateurs nommés par le Roi, les chances de former une coalition pour un gouvernement fédéral seraient encore plus nulles.
Bien entendu, un autre argument a été évoqué, avant que le coronavirus emporte tout sur son passage. Pour dissoudre les Chambres et aller vers des élections anticipées, il faut une majorité au Parlement qui considère que la dissolution est la meilleure option.
La politique qu’on a oubliée est à la fois lointaine et proche. Elle nous reviendra comme un boomerang. On l’a mise sous le tapis. On n’en parle plus. On a tort.