Le travail !... quoi le travail ?
La ou plutôt les significations de ce mot procèdent d’un numéro de trapèze, d’une mystification de cirque, d’une élucubration de jobastre. Ce qui sort du chapeau, c’est aussi bien un lapin blanc, qu’une enclume de 100 kilos.
Tel se rend à son bureau quand il le veut, sa secrétaire fait suivre son courrier et dans l’antichambre de son lieu de travail, une autre secrétaire vous prie d’attendre à seule fin de savoir si Monsieur l’Important voudra vous recevoir.
Tel autre se lève à l’aube court après le bus, arrive essoufflé à la barrière de contrôle, pointe son arrivée, se rue dans les vestiaires endosser son habit de protection, arrivé à son poste il est minuté, séquencé, « ergonomisé » et maîtrisé par des gens qu’il ne connaît pas, qui réfléchissent à sa place. Il ne sait pas ce qu’il fait, à quoi ça sert. On réfléchit en haut lieu de l’éventualité de le remplacer bientôt par une machine. Il sort du boulot fatigué, halluciné, reprend le bus, et se retrouve vidé de toute énergie devant une télé qui lui donne les moyens de somnoler en se distrayant superficiellement.
Le premier est honoré, même si c’est un imbécile instruit, le second est méprisé et traité d’imbécile, même si c’est une intelligence rare prisonnière de la connerie d’une société dite de labeur, mais qui n’est rien d’autre que le produit d’un système économique aberrant.
C’est la pauvreté de la langue française d’appeler du même nom les activités de ces deux personnages aussi distant l’un de l’autre qu’une maison de passe, du Waldorf Astoria, quoique dans ce dernier il s’y passe des choses encore moins recommandable que dans le premier séjour. Et c’est tout le paradoxe de deux hommes de la même essence, mais pas du même destin.
Ceci posé, Wilmès notre Walkyrie des jours meilleurs est en harmonie avec la FEB et Macron. Il faut remettre la machine avec les ouvriers autour en état de fonctionner. Il y va de la reprise de l’utile et de l’inutile, le tout bien malaxé et revendu prêt à l’emploi aux masses haletantes d’impatience d’essayer des nouveautés. La banque l’exige. Le personnel politique, ainsi que domestique de confort autour des milliardaires sont aussi dans des transes.
Il faut que ça reparte. Les petits personnels trop longtemps en pantoufles se prennent vite au jeu de la vie paisible, en pantoufles et en réflexions personnelles. Si l’oisiveté est un bienfait pour intellectuel en haut-lieu, elle est l’acide amer qui rouvre les plaies d’abord par des écorchures, puis par des souvenirs des 30.000 ouvriers assassinés de la Commune de Paris par les aïeux des bourgeois d’aujourd’hui.
Certes, en temps ordinaire on ne le sait pas, mais quien sabe ? Si les petits personnels mettaient à profit leurs temps d’oisiveté pour réfléchir ?
Madame Wilmès n’a pas été placée par Michel, là où elle est, pour rien.
Elle doit absolument expliquer que du travail, la collectivité n’en tirera que des bienfaits.
Voulez-vous que je lui écrive son discours ?
« Le labeur est bon à l’homme. Il le distrait de sa propre vie, il le détourne de la vue effrayante de lui-même, il l’empêche de regarder cet autre qui est lui et qui lui rend la solitude horrible. Il est un souverain remède à l’éthique et à l’esthétique. Le travail a ceci d’excellent encore qu’il amuse notre vanité, trompe notre impuissance et nous communique l’espoir d’un bon événement. Nous nous flattons d’entreprendre par lui sur les destins.
» Ne concevant par les rapports nécessaires qui rattachent notre propre effort à la mécanique universelle, il nous semble que cet effort est dirigé en notre faveur contre le reste de la machine. Le travail nous donne l’illusion de la volonté, de la force et de l’indépendance. Il nous divinise à nos propres yeux. Il fait de nous, au regard de nous-mêmes, des héros, des génies, des démons, des démiurges, des dieux, le Dieu ! Et dans le fait, on n’a jamais conçu Dieu qu’en tant qu’ouvrier » (Anatole France – L’anneau d’Améthyste).
Non, s’écriera la Wilmès, pas comme ça !... C’est trop compliqué. Les âmes simples et frustres ne comprendraient pas, même moi, j’ai du mal…
Bien entendu puisque c’est une intellectuelle, supposée telle, quoique la vraie intelligence est de plus en plus incompatible avec le drame universel qui se prépare, justement, du rassemblement des plus vives intelligences. Mrs Wilmès sera donc dans l’incapacité de comprendre que la liberté des personnes n’est pas la liberté des dividendes et n’en découle pas. Elle suppose et elle accomplit l’épanouissement dont la condition préalable est la maîtrise des besoins et du travail asservissant.