L’informe information.
Nous ne le savons que trop, l’information est à la chasse de l’électeur pour lui délivrer un message bien typé, vouée qu’elle est à célébrer un monde exclusivement libéral, par sa voie éditoriale.
Il est exclu d’en imaginer un autre. Les rares projections sur « une société différente » sont destinées à décourager toute curiosité pour une autre économie que celle de marché.
Les médias ont un rapport direct avec tout ce qui touche à la diffusion, publicité incluse, d’un monde imaginaire où tout serait fête et travail montrant l’humanité heureuse. Si bien qu’à force de faire croire qu’en cas d’échec, la faute nous incombait. Tout le monde l’a cru jusqu’au Covid-19.
Quand la pandémie nous est tombée dessus, les gens se sont aperçus qu’ils étaient une majorité à souffrir beaucoup, alors que le système s’autocélébrait dans ses journaux de la même manière qu’avant, ne sachant rien faire d’autre.
Les médias ont réalisé des audiences record depuis mars, mais dans le même temps perdu beaucoup d’argent. Le marché publicitaire s’est effondré par l’arrêt de l’activité au détail.
Le dégraissage en 2019 de RTL-Tvi était prémonitoire. C’est moins visible dans les journaux écrits, les personnels ayant été réduit à l’os, à commencer par les pigistes les éternels dindons de la farce écrite.
C’est plus visible en France où BFMTV/RMC prévoit de supprimer près de 600 postes, soit un tiers des effectifs.
Les médias numériques devraient toutefois être moins touchés.
Le coronavirus a révélé que le monde libéral atteignait les limites du modèle ancien de la presse. Pourquoi souscrire à un abonnement puisqu’il existe des sources gratuites ? L’information n’allant jamais que dans un sens, il était inutile de chercher à la recouper dans un monde à l’identique.
Covid-19, n’est que la goutte d’eau qui fait déborder un vase plein depuis longtemps. Ça n’est pas un phénomène conjoncturel, mais la conjoncture ne fait qu’accélérer le processus.
L’aspect financier de la « réclame » ayant moins d’influence sur le contenu, on pouvait se mettre à rêver d’une presse diversifiée ! Les propriétaires n’ont pas consenti des sacrifices et faits des investissements pour réinventer la liberté d’expression, mais pour mettre en valeur l’opinion libérale. On aura même à se méfier des événements rapportés en cours.
Un événement tragique est venu compléter le désastre en France, qui touchera demain la presse belge. Ce n’est pas une conséquence directe du Covid-19, mais plutôt un effet calendrier catastrophique qui pourrait se produire en Belgique.
Le distributeur de presse Presstalis, déjà fragilisé avant le confinement, a fait faillite malgré un énième plan de sauvetage de l’État de 33 millions d’euros. Cela a eu des conséquences désastreuses sur la presse écrite qui a perdu des dizaines de millions d’euros de recettes des ventes de magazines. Rien que pour le groupe Le Monde (dont Le HuffPost fait partie), la perte des recettes sur les ventes en kiosques est chiffrée à 7 millions d’euros par la direction. Dans ce contexte économique difficile, le groupe a décidé d’abandonner la parution papier du bimestriel “Le monde des religions”. Décision similaire pour le magazine Grazia qui cesse sa parution hebdo et va supprimer 31 postes. (In le Huffington Post)
Les librairies chargées de la distribution de la presse et des magazines en Belgique ont beaucoup souffert aussi du confinement. Des points de vente ne reprendront pas leurs activités en septembre. On n’en connaît pas le nombre. Mais cela va faire mal.
Bon débarras diront les gens qui n’ont pas des opinions « conformes » au libéralisme ambiant ; mais, c’est aussi une possibilité qui n’existera plus, de revoir un jour une presse débarrassée des marchands de papiers ou des tonitruants libéraux à la télé comme Deborsu.
Il existe seulement trois grands groupes de presse en Belgique, défendant à quelques nuances près, la même grosse soupe libérale.
Le fait de passer du papier au digital ne va pas être suffisant. La presse belge ne compte plus assez de journalistes de talents pour organiser des colloques ou des animations de soirée capables de diversifier la diffusion d’une communication écrite ou parlée, Sachat Daout et Dominique Fontenoy n’en sont pas capables.
Les actionnaires ont peur d’investir dans quelque chose qui leur échapperait depuis l’essor de FB et quelques autres supports gratuits où les internautes s’improvisent informateurs, pas toujours dans de bonnes conditions et d’intérêt pour la collectivité.
Une ‘plateformisation’ de l’information” reste ouverte. Il s’agirait de vendre des « bouquets » d’information venant de différents médias. Le temps de la lecture du journal « La Meuse » par le chauffeur du bus au terminus de la ligne 22 est révolu.