Pour une gauche frumentaire.
La crise déclenchée par Covid-19 a ouvert les yeux d’un grand nombre de citoyens sur l’impossibilité de concilier une économie de marché avec un futur où les décisions politique de sauvegarde collective vont devenir monnaie courante, sous peine de déchoir.
C’est particulièrement vrai dans un pays comme le nôtre, dans lequel on s’est ingénié à multiplier les instances de commandement. Évidemment, ce paradis des intermédiaires percevant des indemnités confortables de la poche des contribuables n’est pas perdu pour tout le monde, on s’en doute.
Mais le holisme (1) y est impossible en raison même des appétits de certains particuliers.
Avec Covid-19 en prolégomènes, ce qu’il faut éviter, nos bourgeois nous y précipitent. Comment rectifier cette évidence, afin d’éviter des situations malheureuses, alors que les décisions à prendre sont dans les mains de ces maladroits volontaires ?
L’imbroglio des pouvoirs intermédiaires, ajouté aux dévastations en cas d’épidémie des conditions de fonctionnement du marché libéral, rend pratiquement toute réforme élémentaire impossible.
Une solution qui ne serait même pas radicale, mais qui ferait quand même que la brinquebalante machine prenne un bon chemin – celle de Jean-Luc Mélenchon qui vient d’obtenir qu’en France le régime se dote d’un haut-commissaire au plan – est considérée comme une abomination par Sophie Wilmès.
Non seulement parce que cette proposition n’est pas libérale, mais quand bien même, cela serait impensable en Belgique. Un seul haut-commissaire pour l’ensemble du pays ! Et les Régions et les Provinces et jusqu’au fédéral qui voudrait reprendre les rênes de l’attelage, vous n’y pensez pas !
Évidemment à nos six ministres de la santé, ajouter six hauts commissaires au plan, c’est fichu d’avance.
L’électeur voit bien l’impasse. À Bruxelles, c’est Byzance ! Le danger serait que l’électeur flamand en appelle aux Turcs de la N-VA et du Vlaams Belang réunis.
La Belgique est un cas d’école pour toutes les démocraties. Ce pays a besoin d’un coup de neuf emportant l’habitude des laborieuses mesures linguistiques et les mirobolants états de fait, entre autres.
Et encore, on ne peut compter sur une génération snowflake (2), avec comme porte-drapeau la bourgeoisie libérale qui est tout ce qu’on veut, sauf démocrate ! Prête à tout, y compris une oligarchie N-VA-Vlaams Belang – sauf un État vraiment issu du peuple – alors, la bourgeoisie en question, n’est plus dans le coup. Elle n’y verrait qu’un début de guerre civile.
Voilà la situation. Elle est inextricable, puisque des urnes ne pourraient surgir que des partis toujours les mêmes avec plus ou moins de force pour ne conduire à rien d’autre, finalement, qu’un nationalisme flamand triomphant que les bourgeois accepteraient, tant il est aussi très conservateurs et passéistes, sur les notions de marché et de procédure libérale du MR.
À l’aube d’une deuxième vague du Covid-19, les menaces très actuelles d’un réchauffement climatique, d’une montée des eaux certaine, d’un dégel du permafrost libérant d’autres virus auprès desquels Covid-19 serait un hors-d’œuvre et devant l’obstination des milieux dirigeants à vouloir à toute force de la croissance et des tas de lois, renforçant les tubes et les machins de notre usine à gaz, risée de l’Europe : « non bis in idem (3) ».
En attendant Godot, c’est-à-dire une majorité anti-conservatrice qui rendrait de la couleur à la démocratie, pourquoi pas refonder l’État, non pas de manière utopique, mais de façon concrète à la manière déjà vue dans l’Histoire, d’une révolte des clairvoyants ?
Ce destin dévolu à l’extrême gauche serait un nouveau siècle des Lumières.
Il passerait par un large débat, rendu public. Il serait scruté, surveillé par la bourgeoisie inquiète et son gouvernement à sa botte, voire même interdit, mais c’est un risque à prendre. Et il est urgent de creuser l’idée et encore plus urgent de la mettre en pratique.
Ces gens actuellement au pouvoir ne valent rien, nous sont néfastes, oblitèrent notre avenir. En interprétant ce qu’ils disent, en essayant d’améliorer leurs mesures, nous leur faisons trop d’honneur pour ce qu’ils valent. En objectant des raisons en faveur du peuple, nous leur permettons d’ironiser sur nos propositions qui, de fait, sont inapplicables dans une situation libérale des marchés.
Restons donc à l’écart de leurs combines et préparons un autre avenir aux populations, en-dehors de leur dépendance, pour ébaucher une alternative à ce désastre.
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1. Le holisme : un tout est plus que la somme de ses parties, l’essence même du socialisme réfutant toute idée d’intérêt privé passant devant l’intérêt collectif.
2. Une génération d’individus peureux et lâches.
3. Pas deux fois la même chose.