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Un gorgeon, mec... le der !

– Un p’tit dernier, Émile…
– J’peux pas, Roger, déjà qu’ si on t’voyait d’la rue, ils fermeraient « Les bons amis » !
– Mais nom de dieu Émile ! il est déjà fermé.
– Ouais, c’est rien qu’ le volet… pour le coup, ce serait la définitive…
– Qu’est-ce que t’es con, tout de même, allez un p’tit dernier !
– Un vite fait alors ! Quèqu’ tu prends ?
– Un armagnac… dans mon verre à bière.
– Tu déconnes, ou quoi ? Tu sais combien ça t’coûte déjà dans un verre à fine…
– Alors là, ce culot ! Ça t’revient à peau d’balle. Les grossist’ d’l’alcool bradent à cause des confinements. T’as la bouteille d’champ’ à huit euros chez Carr’four… l’Armagnac à vingt !
– Si j’te disais qu’on va au désastre, depuis qu’Alexander pousse à la consommation ?
– Quoi, son vieux maltôte encor’ ?... en ont jamais assez, v’là c’ qu’ j’en pense !
– Là pense plus Roger… t’es limite…
– C’est pas toi Émile, qui vas m’ dire la limite… quand j’ pense !
– Tiens, j’t’en mets un doigt, offert par la maison.
– Merde, elle est pas généreuse la maison… Note, si j’insist’, c’est qu’ j’ai peur d’rentrer chez moi.
– T’as peur d’ la Fernande…
– Fais pas chier avec Fernande. Qui c’est qu’est l’port’ drapeau dans l’ménage ?
– Ça pour les porter, tu les portes, même parfois qu’tu les traînes…
– J’te cause pas de sa vie de femm’ à c’te pauvr’ chout’. J’ai peur d’rentrer à la piaule à cause du Clark… vital… Larinxval… a un non à faire roter des rossignols… Clarinval.

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– Parle-pas d’ ce tas Roger… Déjà qu’ t’as sa gueul’, tu m’ mets les boules rien qu’à t’ voir pousser l’battant ! Il a plombé mon débit d’boisson… tué ma clientèle…
– Tu m’en files un dernier, juste pour pas partir sur un pied-bot…
– Clarinval, j’t’avais prév’nu Roger, plus jamais qu’tu l’ prononces d’vant moi… Tiens, j’vais m’en prendre un aussi. Clarinval, quand j’te vois. Tu d’vrais plus v’nir… tu m’ fous la poiss’.
– Tu m’ charries, j’ lui ressembl’ pas… mais, j’en ai après, moi perso… pourtant j’vends pas de la bibine… j’suis pas troquet, l’assassin des foies, comme toi…
– Abrège, qu’è qu’t’a fait l’Clarinval ?
– Enfin, je sais pas si c’est lui ou un aut’ de la bande, mais ça va entrer au palmarès, l’réveilon ! j’ te jure…
– Ah ! tu fais chier des gouttières hongroises… T’accouches quoi !...
– Ouais, avec Fernande on avait pris de la bibine pour vingt-sept qu’on est en famille. C’est l’moment, c’est pour rien. Ça vide les caves… i’ z’éparpillent.
– Forcément, nom de dieu de nom de dieu, nous aut’ les troquets on est fermés…
– … comment qu’tu veux qu’on boive le Picon, la Napoléon des dames et le Calva des hommes, même si Fernande et moi on a une bonne descente… de trente-sept qu’on s’rait à gueuler sous l’sapin…on n’est plus qu’à deux !
– T’as pas dit vingt-sept ?
– Qu’è qu’tu fais d’la réserve au cas où qu’ les voisins viendraient… sans compter Fernande qui pourrait ramener des copines !
– T’as raison, Roger, t’as raison… I’ poussent à la consommation, sur le temps qu’nous on joue fermé, ces crapules !
– Voilà pourquoi j’ai les sphincters à la moule de Joz…sef…
– … Joseph
– Joseph… tza… dèr…
– Szajer
– Comme tu dis…
– I’ ferment tout… ils lâchent la brasserie du coin, tu sais la belle qu’éclaire d’ la nuit et les autr’ pareils où c’que les tapineuses reprisent leurs filant’, et les zincs honnêt’ comme moi… Clarinval concentre, la bibine sur l’habitant, solidair’ obligé d’ tout boir’… Et dire que je votais MR…
– Si j’ai un’ cirrhose… ce s’ra d’ sa faut’.
Emile et roger se mettent à chanter à tue-tête.
– « C’est pour la paix que mon marteau travaille, loin des canons, je vis en liberté !... ».
La porte s’ouvre avec fracas, deux flics armés de mitraillette entre dans le café.
Le flic le plus gros tout rouge qui a l’air d’avoir picolé – Vous gênez pas bordel ! Débit de boisson ouvert alors qu’ils sont fermés. Ivresse sur la voie publique.
– Comment ça sur la voie publiqu’, on est dedans, pas dehors… hein, sauf vot’ respect !
– Et comment qu’vous allez faire pour sortir sans être sur la voie publique, p’tit merdeux ?


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