Sagesse des gens !
Qu’est-ce que les gens demandent ? Pas grand-chose : un boulot qui paie bien, pas trop chiant, que ceux qui se croient au-dessus de tout le monde les respectent et qu’ils puissent aller librement n’importe où, même la nuit, sans avoir peur de se faire assassiner pour leur Smartphone. Ils demandent qu’on leur fiche la paix. C’est tout.
Rien que de très raisonnable, mais comme aucune de ces conditions n’est remplie, ils rouspètent. L’Haut-lieu (1) n’a aucun argument, il les traite comme si le moindre petit raisonnement était trop pour leur cervelle d’oiselet !
Du travail, il n’y en a guère. Plus il est abrutissant, moins il est payé. Ce devrait être le contraire. Et pourquoi est-il mal payé ? Parce que l’Haut-lieu considère qu’un travail abrutissant est fait pour un abruti. Plus on est abruti, moins on rouspète. Pour l’Haut-lieu, un abruti, c’est du nanan. L’abruti est une chiffe molle. Il se fait avoir du patron et du syndicat. C’est une source de souffrance que l’Haut-lieu ne comprendra jamais.
Au contraire, il a élaboré une échelle des valeurs fondée sur le diplôme. C’est un certificat qui signifie que le récipiendaire a retenu qu’Auguste s’appelait Octave et qu’il était le fils adoptif de Jules, et encore que le syndrome de Takayashu est une absence de pouls, dans certains territoires de l’organisme. Mais, est-ce que savoir ça donne de l’intelligence ? La preuve, il y a autant d’abrutis dans l’Haut-lieu que dans les bistrots, mais au bistrot la conversation est plus variée (2). Ce n’est utile à l’Haut-lieu que pour classifier les parcours, donc mal payer les uns, au point qu’en surpayant les autres, il fait encore des bénéfices.
Aller n’importe où la nuit est de plus en plus hasardeux, voire dangereux. Quand vous vous lancez dans les pourquoi et les comment, les chefs imaginent qu’on fait des réflexions dans leur dos. Quand le pouvoir est centre-gauche vous passez pour pétainiste tendance Zemmour, centre-droit pour islamo-gauchiste. Zemmourien, apologue de Mahomet ou sans opinion, si vous refusez la pensée unique, vous êtes complotiste !
Les quartiers sont traversés par les bandes et les bandes ça se réunit la nuit. Tous les gouvernements le savent, l’Haut-lieu aussi. Et pourtant, il ne fait rien. C’est une nature indécise, eunuque dirait Flaubert. L’Haut-lieu qui dort la nuit, se venge sur le peuple, le jour.
La Covid-19 est l’épice qui accélère la fermentation, saupoudrée par des criminels, selon les uns, foutrement briseuse de croissance disent les autres. L’Haut-lieu atlantiste et libéral cache sous le masque, l’inquiétude d’une crise économique. De nuit par les bandes, de jour par l’Haut-lieu, les gens sont traqués par des bandes différentes, c’est tout.
Depuis que la pizza quatre fromages fait part de ses remarques, les gens pensent sérieusement que c’est inutile d’exposer leurs arguments à l’Haut-lieu. « Le travail est noble et gratifiant. La police veille sur nous surtout la nuit. L’Université, du haut de sa bienveillance, porte un œil indulgent sur la plèbe, bois brut qu’il convient aux licenciés de transformer en œuvre d’art, qualifiant les copeaux de déchets sans intérêt. »
Comment voulez-vous que l’on ne complote pas ?
Les gens y sont obligés. Le pouvoir ne comprend pas son véritable intérêt : assimiler la matière avant de critiquer, vivre la chose avant de condamner.
Et le « pas grand-chose à savoir » devient « Mais qu’est-ce que croient les gens ? Ils ne vont tout de même pas s’imaginer que c’est l’Haut-lieu qui va régler la facture ? ».
Le pouvoir n’est pas devenu plus intelligent à l’épreuve de la Covid. Au contraire, l’intelligence, qui semblait lui faire défaut lors du drame des Gilets Jaunes, est carrément absente à la pandémie. Ce super drame devrait être leur apothéose. Il les révèle, au contraire, vaniteux et irresponsables. Un doute sérieux sur leur capacité intellectuelle vient à l’esprit de celui qui les observe. Pour cela, il suffit de les regarder longuement (3).
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1. Je sais, je devrais écrire le Haut-lieu. J’écris l’Haut-lieu parce que c’est péjoratif exprès.
2. Yvan Audouard.
3. Flaubert.