Plus jamais comme avant !
Deux ans se sont passés depuis le début de la pandémie de Covid-19. Presque plus personne ne se souvient des cafouillages du gouvernement Wilmès. La politique a fini par trouver son bouc émissaire, l’inénarrable Maggie De Block. Elle n’a pas vu que ses facéties associées à son comportement de femme un peu forte allaient être moqués et qu’elle allait tout prendre sur elle. Sans avoir l’air d’y toucher, le gouvernement Wilmès avait compris qu’elle allait tout prendre… et elle a tout pris. On la chargea donc des échecs de tout le monde. Cela ne veut pas dire qu’elle était innocente de tous les manquements, elle en cumulait même plusieurs, mais la principale fautive, la cheffe du gouvernement passa entre les gouttes. Elle fut même félicitée pour son remplacement, au pied-levé, de Charles Michel et reconduite comme ministre d’État et ministre des Affaires étrangères chez le suivant.
La première nature du peuple est d’oublier le lendemain ce qu’il affirmait avec fermeté la veille.
Ce qui va compter, ce sera la dernière marche scellant la fin de l’épidémie. Alexander De Croo s’y prépare. Il est contre le pass sanitaire et l’ostracisation des non-vaccinés. C’est bien. Il en aurait irrité plus d’un, mais ce n’est pas grave si tout concourt à sa gloire.
Là est un dernier écueil qu’il faut éviter à tout prix. Parce que si ça repart dans une quatrième vague, sa position deviendra aussi inconfortable que celle de Maggie de Block. À ce compte, ce serait Sophie Wilmès qui serait gagnante sur tous les tableaux, alors qu’elle a été à la barre au moment de la première tempête et qu’on peut dire qu’elle égala en bêtise et satisfaction de soi, les experts et Maggie.
Si c’est la fin prochaine du cadeau virulent de la Chine au monde, on hésite encore à tirer le bilan de la politique sanitaire de la Belgique, handicapée par un libéralisme assimilant les soins hospitaliers à la production d’objets à la chaîne.
On rejoint l’inconséquence des peuples sur le plan social : les aides- soignantes, auxiliaires de vie, transporteurs, caissières, guichetiers, nettoyeurs, ambulanciers, urgentistes, etc., applaudis dans les rues, célébrés par le pouvoir au printemps 2020, ont été renvoyés à l’anonymat du système capitaliste et ses ténébreuses turpitudes, dans ses hangars sans fenêtre de production. Tout cela devant les gens pas plus indignés que cela et qui ont porté leur attention sur autre chose, malgré les promesses d’un « monde d’après » qui subordonnerait les distinctions sociales à l’utilité commune. Ni les conditions de travail, ni le statut de ces services essentiels n’ont progressé. Pire, on a même l’impression que le dépeçage des hôpitaux publics se poursuit au grand jour, souligné par les discours habituels du MR qui y voit la vitalité des entrepreneurs du privé, là aussi. Et on comprend bien pourquoi, le néolibéralisme est la quintessence de l’individualisme forcené, théorisant les bénéfices au-delà de toute mesure pour une toute petite minorité.
Par contre, pour les patrons, le Covid-19 leur a donné l’occasion d’éprouver une divine surprise dans la création du travailleur à domicile traitant du numérique et des tâches administratives. Apple, Amazon, Alphabet, Microsoft et Facebook ont réalisé un profit cumulé après impôt de 75 milliards de dollars au cours du deuxième trimestre, soit presque 90 % de plus que l’année précédente », explique le Financial Times du 31 juillet 2021. Ces résultats traduisent en termes comptables le vaste espace conquis par les plates-formes dans nos vies quotidiennes. Et pour cause : les politiques de lutte contre la pandémie reposent sur elles. Nous avions déjà été fortement entraînés à prendre des dossiers à la maison, par les banques qui depuis près de dix ans se sont peu à peu débarrassées de leur travail sur le client, qui gère son compte chez lui. Ce qui n’empêche nullement de le taxer au lieu de le rémunérer pour le travail qu’il fait.
Du confinement au télétravail en passant par l’enseignement à distance, les décisions des pouvoirs publics vont dans le sens des entrepreneurs qui sont séduits par la disparition d’une bonne partie de leurs employés tenus au même rendement et au mêmes obligations. Les licenciements seront dorénavant plus discrets et comment un personnel peut-il se trouver solidaire d’un employé qu’on licencie et qu’on ne voit pas ?
Les métiers qui exigent la présence continueront évidemment d’exister, sauf que sans pouvoir communiquer avec la partie du personnel devenue invisible, les rapports sociaux n’existeront plus et les syndicats, déjà réduits à des fonctions administratives en Belgique, se verront quasiment rivés à leurs propres services, peut-être même à domicile !
Pendant la pandémie, il n’était pas rare de voir l’indignation monter sur les réseaux sociaux quant à la gestion de l’État et celle des grands entrepreneurs du privé en train de s’enrichir, alors que la classe moyenne de commerçants et d’artisans étaient au plus mal et le sont encore.
Rien ne serait plus jamais comme avant, s’indignait-on. En effet, rien ne sera plus comme avant, mais surtout pas dans le sens qu’on espérait. Les discours de Bouchez en témoignent. Il est temps de reprendre le collier, mais beaucoup plus fermement et avec plus d’enthousiasme qu’avant, dit en substance ce parasite d’État, plus grande gueule que jamais !