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L’art et la manière…

À les voir sur les plateaux de télé ou comme Georges-Louis Bouchez en représentation permanente, c’est tout désir de convaincre, la proie d’une passion irrépressible pour l’humanité, d’altruisme, un panaché d’amour de la patrie et d’amour des gens, ces élus.
Les accommodements avec la réalité, les passions mesurées à l’aune des profits, les nécessaires compromis des fatalités politiques qui font qu’une législature ne soit jamais conduite par une seule tendance, mais par plusieurs, font de la réalité une vaste inconnue aux yeux du public, rendant aléatoire tout système démocratique à commencer par celui-ci.
Les défraiements au passage d’opportunités, l’égo redimensionné en hubris secret, le plaisir de trancher de tout, l’amour du pouvoir et surtout de son exercice, font de la joie en ragoût. Le surplus, le dérapage volontaire et l’abus de confiance, ne sont que des formes de mépris, une cerise sur le gâteau !
Jouer des coudes, semer des peaux de bananes, reprendre en se moquant la syntaxe malheureuse d’un concurrent, affecter plus d’habileté, ce n’est pas se coller une étiquette malencontreuse d‘arriviste, un descendant d’un Rastignac de la Comédie humaine de Balzac, c’est se montrer définitivement plus efficace qu’un concurrent audacieux à occuper le terrain.
Un élu n‘a pas besoin d’être compétent. L’opportunisme, se vouloir en situation d’aubaine, se faire passer pour plus intelligent que les autres rendent plus crédible l’élu aux yeux de son public. Il n’y entre aucune qualité due au mérite personnel, à l’opiniâtreté de connaître avant de décider, seule la notoriété tient lieu de tout. Elle n’est pas due au hasard et surtout pas au mérite. Elle est le fruit de basses manœuvres, d’attitude peu chevaleresque et de la connaissance fine de l’art de s’approprier des triomphes, même imaginaires, et d’accuser les autres de ses propres erreurs, de ses manquements et de ses échecs. Et surtout que tout se sache dans la manière dont on veut que les choses soient comprises par le plus grand nombre.
Dans des pays de grandes libertés, à condition de ne pas critiquer les religions, de trouver enthousiasmant qu’il y ait des LGBT jusqu’aux Armées, de ne pas dresser les Juifs contre les Arabes et vice versa, de trouver Adolf exécrable et la queen de la famille royale britannique absolument remarquable, de ne jamais aborder la question de l’immigration dans une Europe laxiste, de ne pas se définir par rapport à la couleur de peau, et de trouver criminel notre passé colonialiste, vous avez une chance de faire une belle carrière dans n’importe quel parti de la majorité. Un patronage d’un ancien « dont on se souvient avec émotion », d’un parent proche et attentif, d’une maîtresse dont vous fîtes la conquête dans les coulisses d’un Congrès du parti, égérie du Président lui-même, sont évidemment des petits plus qu’il n’est pas interdit de cumuler.

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Le pouvoir, outre qu’il suppose le plaisir d’une certaine immunité, est une addiction à l’autorité dont l’intense plaisir reste dans la mémoire et dont on ne se défait pas facilement lorsqu’on la perdu. La nature du respect que les jeunes arrivistes témoignent aux anciens est proportionnelle aux fonctions qu’ils ont exercées avec une autorité naturelle ou dans la confusion d’une autorité feinte.
Selon Platon, pour bien gouverner, il faut renoncer au plaisir. Le philosophe postule que tout pouvoir tend à l’absolu. Une fois atteint, cet absolu s’appelle despotisme. Le despote ayant goûté à tous les plaisirs par la facilité qu’il a de les atteindre une fois au sommet, n’en éprouve plus aucun. Ainsi, nos petits despotes des Régions, nos Denis, tyran de Syracuse des pouvoirs fédérés, sans plaisir au départ n’en auraient pas à l’arrivée. Je ne sais pas ou Platon a observé cela. Sans doute a-t-il imaginé un monde doté d’un tyran unique, supérieur et sans rival. La République n’est plus de saison. Les tyrans se sont multipliés, surtout en Belgique, avec tous ces commandements éclatés à tous les niveaux.
S’ils sont parfois rivaux, les tyrans se respectent souvent, tant ils ont parfois besoin des uns et des autres pour asseoir leur tyrannie. Que serait Michel sans Bart De Wever et Elio Di Rupo sans Hedebouw ?
L’ivresse du pouvoir, la volupté d’être obéi, la crainte que l’on inspire sont-ils néfastes au bien commun ?
On pourrait le croire, tant ce pays est comme une terre trop labourée par les principes et la qualité du soc des charrues. Sauf, que la situation déplorable dans laquelle le personnel politique nous a mis n’est revendiquée par personne. Ce n’est pas demain qu’un élu fera son autocritique.
Il y a bien un plaisir inavouable à gouverner.

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