Premier Mai 2022.
C’est moche, mais c’est comme ça. À Liège, Cité dite ardente, mais qui perd son ardeur en lorgnant d’un œil désabusé les travaux de ce sacré bon sang de tramway qui n’en finissent plus, la fête du 1er mai n’est plus ce qu’elle était !... Les RV du kiosque en Avroy ne regroupent plus la fine fleur des prolétaires-syndicalistes. Les discours des pères Magloire d’un socialisme alcoolisé, placé sous le signe de Sainte-Véronique, pourraient faire partie du répertoire d’un premier Mai libéral, façon Jodoigne, des dernières années du siècle passé !
Que s’est-il passé ? Sommes-nous devenus tous bourgeois ? N’avons-nous plus rien à dire ?
Le phénomène sévit depuis trente ans : celui de l’Europe qui tient un raisonnement d’une simplicité telle que même GL Bouchez comprendrait.
« L’Europe est engagée dans un processus mondial de compétition dans lequel nous sommes « solidaires » des canards boiteux comme des flèches scintillantes de l’industrie et du commerce. Sous peine d’être en fâcheuse posture, toute subversion, tout mouvement de revendications social ou salarial, c’est le monde entier qui nous tombe dessus ».
Ce discours ultralibéral de l’Europe est repris à fond dans une grand’messe centriste en Belgique ; le prélat en est toujours ce guignol barbu que les Michel ont mis à leur place au MR, en attendant le retour du grand fauve.
La Vivaldi avait pourtant été jouée, « Printemps » compris, de la Quatre saisons. La pauvre Karine Lalieux vendait la pension à 1500 euros comme la revendication phare, sans laquelle les baroqueux libéraux pouvaient se passer de l’appoint du PS et par conséquent, incapables de dénouer la crise.
Nous voilà le 1er Mai, voilà Alexander De Croo devant notre mur des lamentations, voilà tous les espoirs de conclure le doux rêve de Karine s’effondrer, et voilà et voilà… qu’on n’espère plus rien et qu’on a à la fermer, avec ou sans Premier mai !
Au kiosque, certes, le reste des anciennes gloires vitupéreront, mais devant trente deux anciens, quatre ivrognes, deux jeunes aux pancartes de Demeyer, douze vendeurs de muguet et trois touristes japonais.
Oui c’est l’Europe cause de tout, diront-ils. « Non » répondront l’opposition sans le PTB. C’est la faute aux structures de l’état. Tandis qu’en toile de fond, le public s’arrêtant à cinquante pas, puis tournant le dos pour la rue Cathédrale en quête d’une friture, pensera : c’est le virus, c’est l’Ukraine, c’est le gaz, c’est la bagnole, c’est l’inflation, avant de se taper un sachet à 12 euros frites-mayonnaise.
Pendant ce temps, les frères Four-au-Coffre et le vieux centriste de Louis à la caisse dessineront des axels sur la glace du plafond de verre trouée à la VRT par Georges-Louis, pour la bonne cause, avant de se trémousser sous tente pour la fête du muguet.
Mais non de dieu, les gars, c’est pas ça le Premier de Mai, parole !... et de sauter la partie trop sensible pour être entendue du PTB en pleine transe revendicative qui, lui aussi, vaticine en poussettes et cris inutiles, puisqu’il ne ferait nombre qu’avec les syndicats, le PS et la partie Ecolo restée bien burnée.
C’est à peu près tout. On a fait le tour des malheurs. Alors que des syndicalistes résolus, des socialistes de gauche (s’il y en a encore) et un fort contingent PTB auraient dû se saisir de Karine, pleurnicharde et grotesque, qui se fût rappelée instantanément, en ce froid premier mai, de la mission que Paul Magnette lui avait confiée.
La question à deux balles est pourquoi un faux premier mai à effets de manchettes et grognements terribles pour des barricades de fiction, dressées par des penseurs socialistes profondément libéraux ?
De Croo le sait bien, son gouvernement par terre, avec la majorité flamingante au tour suivant, tout autre combinaison est impossible. Election ou pas, aujourd’hui ou dans dix ans, l’Usine à Gaz Belgique est notre Tchernobyl à nous. Les MR, PS et Open Vld sont les dernières arêtes d’un hareng de Zeebruges qui ne s’exportera plus qu’à prix d’or et avec la fine équipe du Vlaams Belang.
C’est donc un Premier Mai qui serait explosif si le PS le voulait.
Pourquoi ne le veut-il pas ?
La réponse est inscrite avant la question.
Nos gauchers sont aussi à l’occasion de grands belgicains, di Rupo féru de royauté et Magnette, girouette carolo, rattachiste par moment, séparatiste par d’autres, mais c’est pour faire peur, car, malgré ses airs de renverser l’armoire, il est toujours en intime harmonie avec les trois couleurs hissées sur la coupole de Laeken.
Ah ! on les tenait les bourges, à ce muguet frileux, on les tenait par « leurs choses de la vie ». Avec de l’entregent et du doigté, quel beau rôle aurait pu jouer Lalieux claquant la porte, rattrapée par un pan de son manteau par Alexander et enfin, offrant un Premier Mai de légende à un mythe qui en manque tellement !
La fête du 1er mai a en réalité deux origines et deux histoires. La première remonte aux cultes celtes et médiévaux tandis que la seconde trouve ses origines dans le mouvement ouvrier du XIXe siècle, dit un historien au micro de la RTBF. Quelques rares flonflons d’une Harmonie villageoise pour l’image et on passera tout de suite à la guerre en Ukraine…