Les Gaietés de l’escadron !
Parfois des circonstances particulières font sortir de l’ombre des personnages que nous avons élus il y a très longtemps et qui se sont arrangés pour être réélus à chaque législature, sans que nous sachions vraiment pourquoi ils sont toujours là, même si nous ne nous souvenions plus d’avoir coché leurs noms dans l’isoloir.
C’est le cas de Jean-Claude Marcourt, président du parlement wallon et du bureau, sorti de la boîte de Pandore à l’occasion de l’affaire du greffier Frédéric Janssens.
Le greffier était une sorte de satrape répandant la terreur parmi le personnel, au point que ce dernier n’osait se syndiquer !
Le Bureau du parlement l’a suspendu pendant six mois.
Entendons-nous là-dessus, Frédéric Janssens « suspendu » bénéficie en somme de six mois de vacances payées qui n’auront aucune incidence sur le calcul de sa pension, lorsque l’heure en aura sonné. C’est comme ça qu’on « mate » les fortes têtes dans les ramifications mystérieuses de la haute administration. Georges-Louis Bouchez devrait mettre son nez là-dedans, plutôt que serrer la vis aux chômeurs. Il aurait du grain à moudre.
Le grand thaumaturge de toute cette affaire est le socialiste Jean-Claude Marcourt. C’est un personnage de vaudeville. On le verrait bien tenir deux rôles dans les Gaietés de l’Escadron de Georges Courteline, à la fois capitaine Hurluret et adjudant Flick.
Si le greffier Janssens n’a pas été remercié pour faute grave (menace de mort à l’encontre d’un employé) c’est que le bougre est un adhérent du PS de première catégorie et que depuis qu’il vaque aux affaires régionales, il doit avoir des dossiers sur tout le monde.
Marcourt en capitaine Hurluret ferait merveille. Hurluret est le type de l’officier de carrière sorti du rang, dissimulant sous des dehors bourru, une indulgence sans borne pour les « rossards » qui le bernent. Car, sait-on jamais, comment ils pourraient se venger quand on les tient trop serrés ?
En adjudant Flick, il donnerait sa pleine mesure. Flick est plus qu’un personnage. C’est une silhouette proverbiale de l’insuffisance mentale et de la hargne qu’on prêtait aux sous-officiers de carrière, quand l’œuvre fut écrite quelques années avant 1900.
La guigne… « cette guigne persistante qui m’a suivi et poursuivi à toute heure de ma vie sans que j’aie encore pu découvrir le pourquoi de cet entêtement déplorable – a voulu que je fisse mon service militaire dans des conditions toutes spéciales d’abandon, d’ennui et de tristesse ; en sorte qu’aujourd’hui le temps du régiment n’apparaît plus à mon souvenir qu’avec cette amertume cruelle, mêlée d’une pointe de douceur, des épreuves autrefois subies et par lesquelles on ne passera plus», écrit Courteline. Cette guigne est celle de l’électeur d’aujourd’hui obligé de subir ces ganaches persistantes de ministres régionaux qui ont réussi à ridiculiser la démocratie par la caricature qu’ils font d’eux-mêmes. Courteline partait à l’assaut du militarisme belliqueux des années 1880. L’électeur sensible en 2022, brandit l’étendard de la révolte par le rire et l’ironie face aux suppôts de Di Rupo et de Borsus, son compère, attelés aux péripéties flaccides des gouvernances wallonnes.
La pièce de théâtre n’eut pas le succès escompté. Dans le climat délétère qui régnait alors en France, le public n'apprécia pas cette charge irrespectueuse de l'armée française et un ancien officier, présent dans la salle, menaça même les auteurs de leur « botter le derrière ».
En 2022, le public accablé par ses soucis domestiques ne croit pas que le gouvernement wallon et, par de-là le fédéral et l’européen ont une responsabilité dans le marasme dans lequel la Belgique se noie.
Des propos comme les miens sont jugés malveillants et irresponsables, pour ne pas dire pire !
Pourtant rien qu’à considérer l’affaire Janssens, c’est hallucinant que le Bureau ait placé le greffier en mesure de faire du ski à Garmisch-Partenkirchen à nos frais et stipulé que sa première action serait d'organiser une rencontre avec le conseil du personnel de manière à établir un programme de consultations. Dans l'évolution du dossier, le Bureau examine la possibilité de se faire accompagner d'un organe extérieur pour lui permettre d'atteindre les objectifs fixés.
Hurluret-Marcourt réserve son côté Marcourt-Flick aux rencontres avec le conseil du personnel. Mais attention, jamais d’exposition aux jugements critiques des citoyens, les gens doivent garder en mémoire l’image lisse d’un grand homme d’État. C’est son avocat, qui se fera un plaisir de rencontrer son homologue en représentation du personnel. La « petite » note des frais et les arrhes à convenir sont à la charge des citoyens, bien entendu.
"Le Bureau espère que ces premières mesures participeront à apaiser le climat au sein du greffe et entend poursuivre la réflexion sur les réformes à adopter, tant au niveau du climat social que dans la gestion du Parlement". Amen.