Seule la grenouille y croâ !
Ce qui saute aux yeux dès qu’on parle de la laïcité en Belgique, c’est l’extrême religiosité des chefs d’État qui se sont succédé sur le trône. Il me semble, en toute objectivité que les te deum, les cérémonies religieuses de toutes sortes devraient être d’ordre personnel. On se souvient encore du roi Beaudouin, cagot par excellence, marié à une dévote comme on ne fait plus. Certains ont encore en mémoire son refus de parapher la loi sur l’avortement et le simulacre d’une mise en indisponibilité de régner qui fut une véritable mascarade.
Depuis, les suivants n’ont pas démenti une foi depuis toujours publique de la monarchie. On aurait pu supposer qu’Albert eût eu une attitude plus discrète à son appartenance à un culte quasiment national. Il n’en a rien été, même si l’évolution des mœurs rend son église petit à petit obsolète.
Les épouses des trois derniers rois sont allées s’agenouiller devant le pape, le voile sur la tête, vu d’un mauvais œil mais pour d’autres motifs sur le chef des femmes musulmanes.
La dynastie a toujours servi la Belgique ainsi. L’État, dirigé par des personnels politiques de droite, a fonctionné pareillement, sous la tutelle discrète du clergé. Il a emboîté le pas du souverain en place. On ne compte plus les premiers ministres qui se sont fait un devoir d’être les propagandistes de la religion emblématique de la dynastie.
Pourtant, la Constitution est résolument séparatrice. Elle continue à faire les yeux doux aux cultes, en les finançant; en admettant qu’ils interviennent dans l’enseignement public, par les cours de religion; en perpétuant leurs privilèges archaïques dans l’espace public, exactement comme en 1900 à l’apogée « du sabre et du goupillon ».
Pour rappel, en Belgique, les cultes reconnus ont accès à un financement public important. Ils sont six à coûter chaque année une pincée de millions d’euros aux citoyens, même athées
: catholicisme, protestantisme, anglicanisme, judaïsme, orthodoxie et islam. Depuis 1993, ce financement est accessible aux organisations philosophiques non confessionnelles, aujourd’hui la laïcité organisée, et demain, le bouddhisme.
L’article 19 de la Constitution consacre la liberté des cultes. La prise en charge par l’État des traitements et des pensions des ministres du culte fait partie de l’article 181 de la Constitution.
Tous les États de l’UE n’ont pas notre générosité. Je me suis laissé dire, mais sans confirmation, que
certains Lands pratiquent une contribution volontaire du citoyen pour le culte de son choix. Ce qui paraît être bien plus juste qu’une contribution générale des citoyens chez lesquels on demande, pour certains, de financer et d’entretenir des propagateurs de sornettes.
On pourrait penser a contrario que ce financement pouvait passer pour une manière de contrôler le pouvoir des églises. L’article 268 du Code pénal selon lequel « seront punis d’un emprisonnement de huit jours à trois mois et d’une amende de vingt-six [euros] à cinq cents [euros], les ministres d’un culte qui, dans l’exercice de leur ministère, par des discours prononcés en assemblée publique, auront directement attaqué le gouvernement, une loi, un arrêté royal ou tout autre acte de l’autorité publique ». Si les curés de ce point de vue se sont calmés, par contre les Imans semblent avoir pris le relais dans la débine et la déconsidération du pays où ils exercent leur culte, à savoir la Belgique : misogynes comme il n’est plus permis, racistes, défaitistes considérant foutu le pays qui les accueille, on pourrait facilement en mettre une bonne part sur la touche pendant un certain temps. C’est probablement la même veine que la couardise qui empêcha jadis certains magistrats d’envoyer des prêtres catholiques méditer quelques jours en tôle, qui prévaut actuellement chez les procureurs d’aujourd’hui par crainte de la branche guerrière de l’Islam !
Autre flèche à l’Arc d’Artémis, un décret révolutionnaire, toujours d’application aujourd’hui, interdit aux ministres du culte de traiter, en chaire, d’autres questions que celles liées au culte.
A partir du socle protecteur de la bienveillance et du financement, les revendication fondées sur la liberté s’épanouissent au détriment de la laïcité. Sans immixtion de l’autorité publique, l’église peut intervenir dans les domaines scolaires et caritatifs. Nul doute que la concurrence islamique n’attend que l’occasion pour s’engouffrer dans la brèche et prendre les places laissées vacantes par les cathos.
Le système est à ce point mal fichu qu’il n’existe pas de loi qui organise la reconnaissance des cultes en tant que telle. Celle-ci se déduit de la législation relative au temporel des cultes. C’est incidemment en modifiant la législation relative aux fabriques d’églises et aux autres lieux de culte que le législateur a reconnu implicitement l’existence de certains cultes. Si un farfelu obtenait d’un gros paquet d’adhérents de vouer un culte à un poil de barbe d’un anachorète mort d’une soupe aux champignons sur la Semois en 1912, l’État serait tenu d’entretenir ses druides et ses faunesques.
On en est là !...