GLB, corporatiste ?
Oh ! le marlou… oh ! le faux derche… les épithètes s’adressent à Georges-Louis Bouchez, qui a failli faire capoter le gouvernement De Croo, déjà si fragile, à propos des Droits d’Auteur. Non pas ceux des chanteurs, des écrivains et des musiciens, ceux-là l’État les passe à la moulinette. La plupart des artistes sont des accidentés d’un système qui se fout des troubadours. Eux l’ont compris, ils ne demandent rien à personne et se font tondre comme vous et moi, en silence.
Non, non… il s’agit des droits d’auteur des avocats, illustre corporation dont Georges-Louis espère bien recueillir les voix pour son futur triomphe en 2024, attendu qu’il a fait partie un court instant de la confrérie, juste le temps de s’apercevoir qu’on pouvait se faire du blé en politique rien qu’avec le titre magique d’avocat, sans plaider jamais. Il fallait juste arrêter l’effet de manchette et la plaidoirie en pro deo et se faire mousser dans ce bon vieux parti libéral, refuge de toute la flibuste bourgeoise, regorgeant de professions aux statuts particuliers.
Les droits d’auteur d’avocat, une affaire, embrouillée à souhait, dont on a difficile à obtenir des éclaircissements des intéressés eux-mêmes, et pour cause. Il faut gratter dans le Moniteur et, avec un peu de chance, on tombe sur le pot-aux-roses après quelques heures de lecture.
Depuis quelques années, on observe un réel engouement de la part de certains contribuables pour la technique de la cession des droits d’auteurs, qui permet une déduction dans le chef de la société qui les attribue et une taxation très favorable dans le chef du bénéficiaire. En effet, jusqu’à un plafond de 57.080 EUR (exercice d’imposition 2014), seul un précompte mobilier libératoire de 15% s’applique sur les revenus de droits d’auteur. En outre le montant brut perçu bénéficie d’un forfait de charge qui est de 50% pour la première tranche de revenus de 15.050 EUR et de 25% pour la tranche allant de 15.220 EUR à 30.440 EUR. Un contribuable qui perçoit de sa société 15.000 EUR de droits d’auteur ne paie donc que … 7,5% d’impôt. Difficile de faire mieux en Belgique !
Hé oui ! le législateur a toujours été très tendre pour les professions libérales, avec une petite faiblesse supplémentaire pour les avocats. Serait-ce à cause du nombre impressionnant de diplômés du métier ayant déserté la profession, pour se ruer sur les mandats mieux rémunérés qu’offrent la démocratie à tous ses citoyens ?
Le mentor d’entre tous, fut maître Chicanneau des Plaideurs de Jean Racine, repris sans payer des droit d’auteur à l’illustre dramaturge en supprimant un « n » pour en affubler un des personnages « cartoon », de l’entourage de Mickey Mouse.
Même si toutes les professions ne sont pas appelées à bénéficier du régime fiscal des droits d’auteur, il est intéressant de se pencher sur le cas des avocats. Certes, leurs plaidoiries se prêtent difficilement à la qualification d’œuvres protégeables au sens de la loi du 30 juin 1994 (sauf dans le cas où de telles plaidoiries seraient utilisées par des confrères moyennant rémunération). En revanche, s’agissant des écrits qui sont le reflet de telles plaidoiries, les règles suivantes doivent être d’application. Si ces écrits ne permettent qu’à son client d’en bénéficier dans le dossier dont il est l’objet, la rémunération de ces écrits doit être taxée au titre de profits. Mais si l’avocat concède à son client ou à tout tiers le droit de reproduire ou de communiquer l’argumentation déployée, il est parfaitement admissible qu’il perçoive à ce titre une rémunération qui doit être qualifiée de droits d’auteur au sens de l’article 17, §5 du CIR. Si l’avocat exerce en société, il faut donc considérer que sa société bénéficie de l’apport créatif de ce dernier et puisse lui allouer dans une proportion raisonnable, des droits d’auteur soumis aux règles fiscales favorables au même article.
La notoriété de l’avocat qui s’est construite après des années (voire des décennies) ont permis à la société de percevoir des revenus sans cesse croissants. N’est-il donc pas naturel que la société lui rétribue des droits d’auteur ? Georges-Louis en est convaincu et derrière lui les élus ex avocats et ceux qui sont restés dans la profession.
Payer 7,5 % d’impôt au lieu de 25 %, ça vaut le coup de monter au créneau, quitte à secouer le gouvernement et courir le risque de le renverser. Est-ce une juste politique que de défendre des privilèges ? Pour Georges-Louis Bouchez, c’est un combat à mener. Il le mène, mais c’est petit… petit !
De cette semaine agitée, le gouvernement sort très affaibli. Pour se sortir des griffes du vélociraptor MR, il a fallu changer quelques termes de la nouvelle mouture, laissant en pâture aux manieurs de mots, suffisamment d’herbes à brouter pour assurer l’ambigüité nécessaire au maintien du statu quo.
Au cours des joutes verbales tempétueuses qui se sont succédé, un vote eut lieu dans une commission traitant du sujet. Seule la présidente, Madame Marie-Christine E.F. Marghem vota contre.
Normal, licenciée en droit de l’Université de Liège, la dame est aussi avocate.