Les retraites d’une traite.
La réforme des retraites de Macron a pris un sacré coup hier lors des manifs des opposants. Deux millions de personnes pour l’Hexagone et 400.000 à Paris, c’est un début en fanfare.
Pressé par l’Europe, le charmant jeune homme de l’Élysée, qui remit d’un sacre à l’autre sa big réforme, a beau gloser sur la nécessité d’allonger le temps de travail, on se demande s’il en est convaincu lui-même.
À force de dire tout et son contraire, il apparaît comme le bon élève de la banque Rothschild qui aura réussi un coup politique à un moment favorable et qui n’a finalement rien apporté d’original en transposant son petit bagage d’économiste aux Finances de François Hollande, jusqu’à sa propre candidature à la présidence de la République. Son succès auquel personne ne croyait, avant le tour final contre Marine Le Pen, ne faisait pas un pli. Il serait élu par défaut !
Sa grande réforme des pensions le met aujourd’hui face à ses contradictions dans le programme repris de son premier mandat. Celui du second n’a, semble-t-il, jamais existé.
Il est vrai qu’à la suite du recul des gauches, quasiment tous les membres de l’UE ont allongé le temps de travail, comme le lui a fait remarquer la Commission européenne qui le presse d’en faire autant.
C’est sans compter sur le peuple français qui n’en veut pas.
Que va-t-il se passer ? Persister dans son projet, contre l’opinion publique, d’autant qu’au Parlement, il est presque certain qu’il disposera sur sa droite des votes nécessaires pour que Madame Borne n’ait pas à rejouer du 49.3.
Quid de la rue ? Lui qui a frôlé le désastre lors de la crise des Gilets Jaunes, devra y regarder à deux fois avant d’imposer sa réforme telle qu’elle plaît à Ursula von der Leyen et Charles Michel.
Un deuxième grand mouvement d’ensemble, hors des partis et des syndicats, c’est une lame de fond qui pourrait cette fois tout emporter.
Sur le principe, de quoi l’Europe se mêle ? Et s’il plaît aux gens de poursuivre le régime actuel des pensions, quitte à en améliorer ici ou là quelques paragraphes aux bénéfices des plus fragiles exerçant des métiers contraignants, « femmes de ménage », aides-soignantes et encore bien d’autres métiers dont la pénibilité n’est pas reconnue. L’argent ? Il y en a. il suffit d’avoir le courage d’aller le chercher là où on le planque.
Comme les choses vont selon les directives du locataire de l’Élysée, on court vers un rapport de force entre une majorité dans la rue, contre une courte majorité des députés siégeant au Parlement, pour tout autant qu’une partie des Républicains d’Éric Ciotti qui avait déjà exprimé son attachement au recul de l’âge de la pension, ne se dégonfle pas.
Les jours qui viennent seront scrutés avec attention par toutes les parties en présence. En cas de force majeure pour sortir de l’impasse, le pouvoir pourrait imaginer un referendum. Si le tollé se transforme en manifestations spontanées et en émeutes, le gouvernement Borne pourra craindre le résultat en préparant sa lettre de démission. Ce sera son chant du cygne, une sorte de capitulation devant l’hostilité générale, sa dernière parade pour que retombent les tensions.
Le temps plus ou moins long de la mise en place du processus peut être utile pour Macron qui se lancerait dans un dialogue sans intermédiaire avec le « peuple », cette sorte de bavardage vain qu’il avait entrepris avec des foules complices, au temps des Gilets Jaunes.
Deux perspectives qui en découlent scelleront le destin du président Macron. En maintenant sa loi sur les pensions contre l’avis des gens, il sera haï le restant de son mandat. Dans le cas contraire, il passera pour pusillanime et on rira sous cape de ses discours et de sa personne.
Comme les possibilités d’échappatoire sont circonscrites à ces deux perspectives, la fin de son mandat sera de toute manière une longue marche tristounette vers la sortie, sans aucune possibilité de revenir, après qu’un autre président se soit installé à sa place durant cinq ans.
Tout reste pendant du côté de l’Europe. Si la réforme ne se fait pas, ce sera un pied de nez au système ultralibéral d’Ursula von der Leyen et un encouragement des gauches à relever la tête pour des jours meilleurs.
Quoi qu’on dise, le Peuple français a toujours montré la voie dans le social et le droit des gens, depuis 1789, au reste de l’Europe.
Gonflé à bloc par l’unanimité des syndicats, des associations et du peuple de la rue, il porterait un coup dur aux thuriféraires d’une société néolibérale, déjà fragilisée de ses échecs.
On reste suspendu aux nouvelles venues de France pour la suite du bras de fer.
La Belgique est directement concernée par ce qui pourrait advenir en France.