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Humour toujours !

Les francophones de Belgique n’ont pas à rougir devant les lazzis que nous distribue avec fatuité une certaine « élite » française qui nous traite familièrement de ploucs, de lourds, sinon de lourdauds, mais que sauve presque directement la qualification de surréalistes, depuis qu’à partir de Magritte, nous en serions abondamment pourvus.
Nous contribuons à la folie ambiante en ouvrant des portes étranges et inattendues, ce qui supposerait que nous ayons une certaine supériorité sur l’hexagone en imagination et en drôlerie, quoique à partir de ce dernier qualificatif, nous méritions parfois d’être traités de ploucs !
Les francophones de Belgique sont perméables à l’imaginaire et n’hésitent pas à se vautrer dans la fiction, rendant poreuse la frontière linguistique, sauvant ainsi de l’esprit germain, le seul vraiment lourd de toute l’Europe, quelques Flamands mâtinés de français. Cela les exonère de la plaisanterie pataude qui date au moins de Guillaume II.
Un de nos écrivains des plus farfelus est Jean Rey, gantois et bien Flamand, mais qui écrit en français ce qui sauve tout et à qui nous pourrions donner l’accolade et traiter de confrère en surréalisme, qu’on en juge : en 1936, il publie 96 fictions originales et près de 300 articles, alors qu’en 1937, ce sont 108 fictions originales et toujours quelque 300 articles… en temps de guerre, publication aux Auteurs Associés des recueils Le Grand Nocturne (1942), Les Cercles de l’épouvante (1943), Les Derniers Contes de Canterbury (1944), ainsi que des romans Malpertuis (1943) et La Cité de l’indicible peur (1943).
On ne sait par quel bout prendre son côté fantastique un rien schizophrène, sinon par son aspect farfelu rendant « la peur indicible » plus comique qu’autre chose.
À Liège, nous avons tout un rayon d’excentriques que les Français nous envient et parmi lesquels le plus « performant » pour ses contributions physiques, tout au moins, est noël Godin.
Dite sur un ton prophétique plein de drôleries, sa philosophie se tient et nous oblige à la trouver juste.
Cet auteur d’une roborative « Anthologie de la subversion carabinée » est devenu l’inquisiteur en chef des vanités contemporaines.
Voilà bien tente ans qu’il a inventé son terrorisme pâtissier, héritier de Mack Sennet et de Ravachol.
Le Liégois s’est donné pour mission « d’entarter » certaines des fausses « vraies » gloires de notre temps.
Cet artisan de la plaisanterie a commencé petit et solitaire pour s’étoffer par des ralliements complices, depuis que devenu célèbre au lancé, il a fallu des subterfuges pour ne pas être aperçu, à mesure que son combat prenait de l’ampleur. La rançon de la gloire en quelque sorte.
Comme rien ne l’effraie, il s’est attaqué à des personnalités mondialement connues comme Bill Gates.
Certaines de ses victimes ont été entartrées jusqu’à sept fois !
Fervent cinéphile, Godin s’en est pris aux vedettes du septième art ; il a exercé son terrorisme pâtissier sur Jean-luc Godard à cause de son film « Je vous salue Marie ». Jean Delannoy pour Bernadette, Marco Ferreri et Marguerite Duras, pour leurs élucubrations ubuesques
Du côté politique et médiatique, on a vu Godin entartré Douste-Blazy, Chevènement, Sarkozy, Elkabach.

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Mais son exploit le plus constant sont les lancés tous réussis sur Bernard-Henri Lévy, champion dans le genre puisqu’il le fut sept fois !
L’écrivain finit par redouter la présence de son ennemi intime, toujours grimé et caché sous diverses identités, notamment reprise plusieurs fois sous le nom de « Le Gloupier ».
On se souviendra de la première tarte à la RTBF, lorsqu’il y fut plaqué au sol par deux vigiles, tandis que Lévy lui ordonne en direct de se lever « ou je t’écrase à coups de talon ». La scène entièrement filmée pourrait repasser de temps en temps afin d’édifier les générations futures.
Godin ne fait rien au hasard. Il signe ses attentats, soit un bristol est disséminé dans la meringue crémeuse, soit Godin diffuse un communiqué de presse.
Au cœur de ses entartrages, il fit les beaux soirs de Coluche, Desproges, tandis que Renaud en fera une chanson.
Noël Godin est tout et son contraire. Est-ce une farce inutile et gratuite, un canular à la liégeoise en règle contre l’esprit de sérieux et souvent prétentieux qu’on relève chez presque tous les personnages de notoriété publique ?
Certains l’ont célébré comme un homme en quête de reconnaissance ou performance esthétique proche de l’art contemporain.
Le mystère demeure. Ce qui fait qu’à travers le temp cette démarche singulière restera comme un moment spécial dans une drôlerie faisant revivre les scènes du cinéma américain des années trente, c’est que, le côté physique de l’exploit, conférent à l’humour une dimension artisanale.
À l’heure de la réalité virtuelle, Le Gloupier est à la fois le dernier homme libre et le premier cyborg.
Il se pourrait que la Belgique soit à l’avant-garde de « l’étrangement drôle » et se la pète un peu devant les Français grâce à lui plutôt que certains humoristes ratés, comme les Frères Taloche, que Godin aurait dû entarter, mais l’âge venant, qu’à près de quatre-vingts ans, il n’ait plus le poignet adéquat pour des lancers réussis, on le comprend !

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