MEA-CULPA !
Nous avons un formidable atout inexploité en Wallonie : notre jeunesse.
Nous nous répandons en propos amers quand nous la voyons boire des bières jusqu’à plus soif au carré (centre de Liège) dans la nuit.
Des bagarres éclatent, la police intervient, nous ne sommes pas mécontents d’accabler nos enfants, les accusant d’une mauvaise éducation, alors que c’est nous qui la leur avons donnée !
Mieux, nous ne comprenons pas cette course à l’abîme et la vocation d’une jeunesse pour les drogues. Nous ne voulons pas voir que le chemin par lequel on y arrive est celui que nous avons tracé dans notre refus de voir les choses en face.
Les premiers responsables de ce gâchis sont tous issus de la génération précédente. La nôtre !
Au lieu d’associer la jeunesse aux moyens d’arrêter les déboires de la Région, de les mettre devant des responsabilité citoyennes, nous nous sommes lamentés sur les partis politiques qui conduisent ce pays à la ruine.
En leur transmettant le sentiment qu’il n’y a plus rien à faire, ils sont devenus aquoibonistes.
Lâches comme il n’est pas permis, nous les avons poussés dans des écoles selon les critères de Caroline Désir, dont on connaît la philosophie, un métier d’abord ! La suite de ce fiasco était prévisible. Ils ne sont pas devenus des citoyens, des humanistes, mais des machines à faire du fric, en s’aliénant dans des métiers sans autre issue que celle de prévoir l’avenir dans autre chose, tant le système Désir fait des personnels hantés par la précarité et le chômage.
N'ayant rien à gagner d’une pareille éducation, la jeunesse à quelques exceptions près s’en est éloignée, au point que la plupart sait à peine lire et écrire. Et comment en serait-il autrement ? On ne leur a jamais parlé d’auteurs classiques, d’historiens capables d’éveiller en eux la curiosité des grands événements qui ont fait la vraie histoire des Hommes, des mille et une manière d’aimer la langue française. La plupart n’a jamais vu une pièce du théâtre. Molière est ce parfait inconnu qui porte le nom d’une paire de chaussures. Par contre, Madame Désir a pour objectif de faire apprendre le flamand dès l’école primaire !
Pendant que nous râlions sur l’incompétence du gouvernement régional, sans trouver d’autres solutions que de nous exclamer devant des dépenses somptuaires pour des voyages ou des constructions inutiles, comme la gare de Mons, il sont allés danser et boire et nous ne les avons pas retenus par des projets et des pensées positives.
Ils se sont rendu compte que nous fulminions contre les élus dans leur responsabilité d’avoir permis la frontière linguistique et l’abominable droit du sol flamingant, mais que ces mêmes histrions de la politique sont toujours réélus et par qui ? justement par ceux qui râlent le plus ! pour refaire quoi, mais pour peaufiner l’usine à gaz, dont ils sont fiers !
La jeunesse désabusée de tout, est devenue désabusée de nous.
C’est le grand schisme de notre génération et de la leur.
Ils ne nous croient plus et ils ont de bonnes raisons pour cela. Nous sommes devenus aussi peu crédibles que le type qui vante l’état d’une bagnole d’occasion qu’il veut vous vendre.
Certes, ce sont tout de même nos enfants et nous les accueillons toujours sans barguiner quand ils sont dans des situations financières difficiles. Cependant ils ne font rien ou pas grand-chose pour s’en sortir. Nous le leur reprochons amèrement, suscitant le conflit classique des générations ; alors que c’était à nous de leur créer une vie plus facile dans une société équilibrée où il est aisé de trouver un emploi bien rémunéré. Nous leur rappelons leur état de besoin en les humiliant inutilement, pensant que notre « sacrifice » les touchera quelque part. Nous sommes si maladroits que c’est le contraire qui se produit et par notre manque de sensibilité, nous les reconduisons à la rue dans notre inconscience totale.
Cette jeunesse qui nous file entre les doigts, que nous ne comprenons pas, c’est nous au double de notre image. C’était aussi ce que nous pensions de nos parents. Qu’ont-ils fait pour nous après nous avoir mis au monde ? Ils se sont souvent comportés en bons parents nous donnant selon leur moyen tout ce qu’ils pouvaient, mais à part le nid dans lequel nous avons passé notre petite enfance, qu’ont-ils fait pour que l’en-dehors ne nous soit pas hostile, pour que nous soyons respectés et compris par la démocratie fabriquée de leurs propres mains !
La jeunesse actuelle pense exactement la même chose, mais dans un autre contexte.
Celui de la dégradation des existences dans une économie sourde à nos revendications et particulièrement ouvertes auprès des classes plus aisées. L’aide que nous apportaient nos parents, la plupart d’entre nous seraient bien en peine d’en faire autant pour leurs enfants.
Au lieu de combattre le fléchissement de notre pouvoir d’achat, nous nous sommes résignés et même si certains continuent à se saigner aux quatre veines pour aider leur progéniture, beaucoup ont lâché la rampe et dégringolent avec leurs enfants dans une absolue misère.
Que ce soit la conjoncture, le triomphe de l’égoïsme des « casés » des partis politiques dans les hautes sphères du pouvoir, des événements extérieurs, de l’Europe et des guerres à ses frontières, tout se passe sous notre nez sans que nous puissions intervenir. Même de ça nous sommes responsables. N’avons-nous pas cette économie de marché que nous voulions ? N’avons-nous pas rêvé de vivre comme les Américains ? Ne sommes-nous pas les victimes de nous-mêmes, faibles avec les riches et durs avec les pauvres ?
N'avons-nous pas ce que nous méritons ?